(Corrige le nombre de blessés § 2)

* Mobilisation générale des forces de l'ordre pour samedi

* Le gouvernement multiplie avertissements et appels au calme

* Les syndicats de police redoutent de graves débordements

par Emmanuel Jarry

PARIS, 5 décembre (Reuters) - Le gouvernement se prépare à un samedi à haut risque face aux violences liées aux manifestations des "Gilets jaunes", qui ont poursuivi mercredi leurs actions sporadiques, en attendant un "Acte IV" redouté de leur mobilisation.

Après de violents incidents à Paris et en province, qui ont fait 263 blessés dans toute la France samedi dernier, l'heure est à la mobilisation des forces de maintien de l'ordre pour éviter de nouveaux débordements, notamment à Paris lors d'un week-end crucial pour les commerçants à deux semaines de Noël.

"Aux factieux, aux casseurs, je veux dire nous leur ferons face et nous serons intraitables", a déclaré à l'Assemblée nationale le Premier ministre, Edouard Philippe.

Signe de l'inquiétude de l'exécutif, Emmanuel Macron a demandé aux forces politiques, syndicales et patronales de "lancer un appel clair et explicite au calme".

Le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner a pour sa part invité les "Gilets jaunes" à ne pas venir manifester samedi à Paris. Non pour "faire taire leurs revendications", a assuré Edouard Philippe, mais pour éviter d'être "piégés par ceux qui s'organisent déjà pour semer le désordre et le chaos."

Toutes les forces de police et de gendarmerie disponibles dans le pays seront de nouveau mobilisés à Paris et en province, a-t-il ajouté, et "toute personne qui sera prise en flagrant délit de violence ou de dégradations" sera interpellée.

Selon une source syndicale, 55 des 60 compagnies de CRS déployées en métropole seront ainsi mobilisées.

Selon des sources proches des forces de l'ordre, des militaires, notamment du dispositif Sentinelle contre le terrorisme, pourraient être mis à contribution pour assurer la garde statique de sites administratifs et institutionnels.

MOBILISATION GÉNÉRALE

Cette mesure, à laquelle les armées sont traditionnellement réticentes parce que pas formées au maintien de l'ordre, permettrait de dégager des policiers supplémentaires.

Il est déjà prévu de mobiliser à Paris et dans les départements limitrophes 100% des brigades de police-secours ainsi que la police des transports, de rappeler les brigades anti-criminalité et "de contact", dit-on de source syndicale.

Il en sera de même des compagnies de sécurisation et d'intervention (CSI) de la préfecture de police de Paris.

Christophe Castaner a déclaré mardi au Sénat que l'accent serait mis à la fois sur la mobilité et la fermeté des unités déployées, pour mettre en échec les casseurs eux-mêmes.

Cela pourrait comprendre le déploiement sur le terrain d'un plus grand nombre de groupes dédiés aux interpellations et d'officiers de police judiciaire.

Selon la Chambre de commerce et d'industrie de Paris, 237 entreprises ont été affectées plus ou moins gravement par les émeutes de samedi dernier dans la capitale.

Au total 349 majeurs et 34 mineurs ont alors été placés en garde à vue, 99 majeurs ont été jugés en comparution immédiate lundi et mardi, pour 122 autres la procédure a été classée sans suite, selon le parquet de Paris.

Parmi les 99 prévenus jugés en comparution immédiate, 28 ont été condamnés à une peine de prison avec sursis, 26 à de la prison ferme, dont neuf avec mandat de dépôt, six à des amendes et un à un travail d'intérêt général. Mais la plupart n'avaient pas le profil du casseur professionnel et d'activistes d'ultra-droite ou d'ultra-gauche. et

Seulement 13 personnes ont été mises en examen à ce stade pour le saccage de l'Arc de Triomphe.

INQUIÉTUDES

Des responsables syndicaux de la police se montrent très inquiets des risques de nouveaux débordements samedi, alors que "des appels à la violence contre des policiers circulent sur les réseaux sociaux", selon la Police nationale. "J'ai peur qu'on aie beaucoup de dommages collatéraux", renchérit le secrétaire général d'Alternative Police, Denis Jacob.

Syndicats de police et pouvoirs publics redoutent de nouveau une convergence des activistes d'ultra-droite et d'ultra-gauche avec les "Gilets jaunes" les plus violents.

Selon le ministère de l'Intérieur, 6.740 "Gilets jaunes" étaient mobilisés mercredi à 14h00 dans toutes la France pour mener 470 actions. Loin du pic du 19 novembre à la même heure. "Mais ce sont les plus déterminés", dit-on de même source.

Total signalait mercredi matin 145 stations services à court de carburant à causes des blocages des "Gilets jaunes". Selon la gendarmerie, une quarantaine d'entre eux ont aussi bloqué une plateforme Amazon à Bouc-Bel-Air (Bouches-du-Rhône).

Plusieurs dizaines de lycées ont été perturbés par des manifestations de lycéens, qui ont parfois donné lieu à des heurts avec les forces de l'ordre comme à Saint-Jean-de-Braye (Loiret) où l'un d'eux a été blessé.

Le parquet de Bordeaux a par exemple annoncé que six mineurs avaient été placés en garde à vue pour des faits commis en marge de ces manifestations de lycéens. (Avec Service France, édité par Yves Clarisse)