* Quelque 50.000 Chinois vivent dans la région de Florence

* Les violences sont inhabituelles dans cette communauté

* Beaucoup travaillent dans le textile et la maroquinerie

* Le secteur pourrait être un bastion du crime financier (Actualisé avec autre enquête sur des violences raciales en fin de dépêche)

par Silvia Ognibene

FLORENCE, Italie, 1er juillet (Reuters) - Des affrontements se sont produits cette semaine entre la police italienne et la communauté chinoise de Prato, près de Florence, qui abrite une des plus grandes concentrations d'Europe d'entreprises gérées par des Chinois.

Prato, capitale de l'industrie textile italienne, est une terre d'immigration chinoise depuis le milieu des années 90. Environ 50.000 Chinois y travaillent dans le textile et la maroquinerie, pour le très prisé label "fabriqué en Italie".

Beaucoup de ces sociétés profitent du travail des migrants clandestins, ne respectent pas les règles de sécurité et pratiquent la fraude fiscale.

La région est aussi au centre d'une enquête pour transfert de fonds douteux vers la Chine d'un montant de 4,5 milliards d'euros entre 2006 et 2010.

Les heurts ont commencé mercredi lors d'une inspection d'un atelier de fabrication textile par les autorités sanitaires. Les contrôles ont été accrus en Italie après la mort de sept personnes en 2013 dans l'incendie d'un atelier de confection.

Le propriétaire contrôlé a réagi avec colère aux remarques d'un inspecteur portant sur des violations, mineures, des règles concernant la santé et la sécurité du personnel. Il a bousculé l'inspecteur et les policiers qui l'accompagnaient, dit-on de source policière.

Les employés chinois se sont ensuite barricadés à l'intérieur de l'usine tandis que des centaines d'autres se rassemblaient à l'extérieur. Ils ont lancé des pierres et des bouteilles sur les policiers équipés de matraques et de boucliers qui avaient été appelés en renfort pour disperser la foule.

Deux ressortissants chinois et un policier ont été blessés.

EVASION FISCALE ET BLANCHIMENT

Le président de la région, Enrico Rossi, a déclaré vendredi avoir discuté de l'incident avec le ministre italien des Affaires étrangères Paolo Gentiloni.

Enrico Rossi s'est engagé à lutter contre la délinquance financière dans la région. Selon lui, la moitié de la production économique s'y fait de façon illégale, le manque à gagner pour le fisc est d'un milliard d'euros et l'argent est blanchi via des transferts internationaux.

"La situation est inacceptable", a déclaré Enrico Rossi à Reuters. "Il faut que la communauté chinoise respecte la loi et s'intègre; nous ne pouvons avoir des 'zones franches'. Nous allons continuer les inspections pour nettoyer cet immense système de production."

Les représentants de la communauté chinoise de Florence se sont rendus sur le lieu où se sont produits les heurts. Le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Hong Lei, a déclaré lors d'une conférence de presse vendredi que la situation était maîtrisée.

La Chine a demandé à l'Italie d'"appliquer la loi de façon civilisée, de mener une enquête avec équité et de protéger les droits et intérêts (...) des citoyens chinois en Italie."

Hong Lei a conseillé aux Chinois habitant en Italie de "défendre leurs droits et intérêts en respectant la loi et de façon rationnelle", selon le site internet du ministère.

Après les affrontements, le propriétaire de l'entreprise et un salarié ont été interpellés.

Des manifestants se sont rassemblés devant le tribunal qui a confirmé l'ordre d'interpellation. Ils ont accusé les autorités régionales d'avoir fait un usage excessif de la force lors de l'inspection des ateliers.

Par ailleurs, le parquet de Prato enquête sur un gang chinois soupçonné de violences contre d'autres non italiens, principalement des personnes d'Afrique du Nord.

La police dit avoir confisqué des matraques et des barres de fer au groupe qui s'est dénommé la "Cité du cerf blanc". Ses membres sont soupçonnés d'avoir organisé des patrouilles contre chasser des Nord-Africains qu'ils accusent de vol.

De source proche de l'enquête, on indique que le gang n'a pas de lien avec des heurts de mercredi. Depuis le début de l'enquête en 2015, sept personnes ont été visées mais elles n'ont pas été interpellées. (Danielle Rouquié pour le service français)