* Des dizaines de milliers de manifestants présents au lever du jour

* Rumeurs d'intervention avant l'anniversaire de la fondation du Parti communiste

* Le chef de l'exécutif appelle à la fin du mouvement de contestation

* Pékin demeure intransigeant (Déroulement de la cérémonie sans incident)

par Clare Baldwin et James Pomfret

HONG KONG, 30 septembre (Reuters) - Des dizaines de milliers de manifestants continuaient d'occuper les rues de plusieurs quartiers de Hong Kong mercredi matin alors que se déroulait dans une ambiance gênée une cérémonie marquant la Fête nationale chinoise.

Depuis les violents heurts survenus ce week-end, la police anti-émeute se tient à l'écart mais certains redoutaient une nouvelle intervention à l'occasion de la célébration du 65e anniversaire de la création du Parti communiste chinois en 1949.

Une cérémonie de lever de drapeaux, celui de la Chine et celui de Hong Kong, s'est déroulée sans incident sur la place Bauhinia près de laquelle quelques centaines de manifestants s'étaient rassemblés après un appel au calme lancé sur internet.

Certains contestataires ont sifflé lorsqu'a retenti l'hymne national tandis que le chef de l'exécutif de la "région administrative spéciale", Leung Chun-ying, serrait tout sourire la main de plusieurs de ses partisans présents.

"Nous ne célébrons pas le 65e anniversaire de la Chine. Face à l'agitation politique à Hong Kong et les persécutions continues contre les défenseurs des droits de l'homme en Chine, je pense que cette journée n'est pas celle des célébrations, mais un jour de tristesse", a commenté Oscar Lai, porte-parole d'un groupe d'étudiants.

Ni la cérémonie de la matinée, ni les orages et la pluie de la nuit n'ont toutefois entamé l'atmosphère de fête qui règne parmi les manifestants, en majorité des étudiants fédérés par le mouvement Occupy Central créé en janvier 2013, qui réclament des élections libres et la démission de Leung au pouvoir depuis 2012.

Ce dernier, mis en demeure par les chefs de file étudiants de la contestation de venir s'expliquer devant eux, a dit que Pékin ne céderait pas face à des manifestations considérées comme illégales, mais a aussi déclaré que la police de Hong Kong serait capable d'assurer l'ordre sans l'aide de l'Armée populaire de libération (APL).

Dans un message publié mardi soir, il a une nouvelle fois appelé les manifestants à quitter les lieux. "L'impact sur l'image internationale de Hong Kong est de plus en plus fort", a-t-il dit. "J'espère que vous y réfléchirez tous."

UN MOUVEMENT CIVIL

La Chine, à laquelle l'ancienne colonie britannique a été rétrocédée en 1997, administre ce territoire suivant le principe "un pays, deux systèmes" qui garantit à ce dernier un degré d'autonomie. (voir )

Selon les organisateurs, au moins 80.000 personnes ont envahi les rues depuis que l'intervention policière musclée contre des étudiants, dans la nuit de vendredi à samedi, a galvanisé le mouvement démocrate. Aucune estimation indépendante n'a pu être fournie pour confirmer ce chiffre.

"Il faut souligner que les événements qui se déroulent ne peuvent pas être seulement attribués aux étudiants ou à Occupy Central. Cela s'est transformé en un mouvement civique", a commenté Alex Chow, chef de la fédération des étudiants locaux.

Se préparant à un mouvement appelé à durer, les manifestants se sont ravitaillés en fruits, bouteilles d'eau, biscuits, imperméables, serviettes, masques et toiles de tente. Sur l'un des lieux de manifestation, des camionnettes ont été garées en cercle afin de bloquer la rue.

"CONSTERNATION ET INQUIÉTUDE" À LONDRES

Ce mouvement, le plus important depuis la rétrocession du territoire il y a 17 ans, place Pékin face à un dilemme. Une répression trop violente pourrait inquiéter les investisseurs sur le marché hongkongais. Ne pas réagir assez fermement pourrait inspirer des mouvements similaires sur le continent.

La Bourse de Hong Kong a fini en baisse de 1,3% après avoir perdu 1,9% lundi. Les Bourses de Chine continentale n'ont pas été affectée. La place de Shanghai a gagné 0,26%. Celle de Shenzhen a fini en petite hausse.

Selon l'Autorité monétaire de Hong Kong, qui fait office de banque centrale, 37 bureaux ou succursales de 21 banques ont été fermés temporairement en raison des manifestations.

Malgré la poursuite du mouvement, les autorités de Pékin demeurent inflexibles. "Dans la Chine d'aujourd'hui, s'engager dans un système électoral d'un homme, une voix, conduirait rapidement à l'agitation, à des troubles et même à une situation de guerre civile", écrit dans Le Quotidien du Peuple le directeur adjoint de la commission des affaires internes et judiciaires du Congrès national populaire chinois.

A Londres, le vice-Premier ministre britannique Nick Clegg a annoncé qu'il convoquerait l'ambassadeur de Chine pour lui faire part de "(sa) consternation et de (son) inquiétude".

"Les autorités chinoises à Pékin semblent décidées à refuser de donner à la population de Hong Kong ce qu'elle est parfaitement en droit d'attendre, c'est-à-dire des élections libres, équitables, ouvertes fondées sur le suffrage universel", a-t-il ajouté.

Les Etats-Unis, qui s'efforcent de maintenir une position équilibrée, ont appelé de leur côté les autorités locales à la retenue et les manifestants à des actions pacifiques.

Le secrétaire d'Etat John Kerry devrait transmettre le message au ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, attendu ce mardi à Washington pour préparer le sommet prévu en novembre à Pékin entre les présidents des deux puissances, Xi Jinping et Barack Obama. (Pierre Sérisier, Danielle Rouquié et Henri-Pierre André pour le service français; édité par Eric Faye)