* Iliad propose de reprendre 56,6% du capital pour $15 mds

* L'offre serait financée par un cocktail dette/fonds propres

* Iliad moins exposé à des problèmes de concurrence que Sprint (Avec CFIUS §12-13)

par Leila Abboud et Soyoung Kim

PARIS/NEW YORK, 31 juillet (Reuters) - Iliad a annoncé jeudi une offre surprise pour prendre le contrôle de T-Mobile US, un projet qui pourrait contrecarrer les plans de Sprint, également intéressé par la filiale américaine de Deutsche Telekom.

La maison mère de Free, qui a révolutionné le marché français du mobile en France avec ses abonnements à petits prix, propose de reprendre 56,6% du capital de T-Mobile US pour 15 milliards de dollars en numéraire (11,2 milliards d'euros), soit 33,0 dollars par action.

Le groupe évalue le solde de 43,4% du capital de T-Mobile US à 40,5 dollars par action, en estimant à 10 milliards de dollars les synergies de l'opération qui bénéficieraient aux actionnaires de l'opérateur mobile américain.

Au total, Iliad estime que son offre valorise le groupe américain à 36,2 dollars par action, soit une prime de 17% par rapport au cours de clôture de mercredi. A la suite de cette annonce, le titre T-Mobile s'est adjugé 6,46% à Wall Street, à 32,94 dollars, à rebours de la tendance fortement baissière du marché, alors que Sprint a décroché de 5,28%.

"Le marché mobile américain est à la fois vaste et particulièrement attractif", a souligné Iliad dans un communiqué. "T-Mobile US s'est imposé avec succès sur ce marché par son positionnement en rupture qui, à de nombreux égards, est similaire à celui d'Iliad en France".

Iliad, qui n'est pas aujourd'hui présent sur le marché américain, fait valoir que son offre ne devrait pas présenter de problème de concurrence aux Etats-Unis, ce qui ne serait probablement pas le cas dans le cadre d'un rapprochement entre Sprint et T-Mobile US qui sont respectivement numéro trois et quatre de la téléphonie mobile dans le pays.

"BIENVENUE"?

Début juin, une source proche du dossier avait dit à Reuters que Sprint, contrôlé par le groupe japonais Softbank, allait proposer de racheter T-Mobile US à un prix de quelque 40 dollars par action, qui valoriserait la filiale de Deutsche Telekom à près de 32 milliards de dollars.

Mardi, d'autres sources ont dit que la fusion ne se ferait sans doute pas avant septembre, les deux groupes préparant un dossier détaillé pour les autorités de tutelle.

Il y a trois ans, la Commission fédérale des Communications (FCC) avait refusé une OPA amicale de 39 milliards de dollars d'AT&T sur T-Mobile US au motif que ce rapprochement serait néfaste pour la concurrence.

La FCC et le département américain de la Justice ont déclaré à plusieurs reprises souhaiter ouvrir le marché, actuellement dominé par AT&T et Verizon, à au moins deux nouveaux entrants.

"Softbank s'est fait dire de manière codée mais très claire que le département de la Justice et la FCC n'avaliseraient probablement pas l'acquisition (par Sprint)", a déclaré Reed Hundt, un ancien président de la FCC. "Pour moi il ne fait pas de doute que la FCC dirait 'bienvenue' (mot prononcé en français NDLR) à l'opération que propose Iliad."

Des experts notent que le projet d'Iliad devra sans doute aussi obtenir le feu vert de la Commission fédérale des investissements étrangers aux Etats-Unis (CFIUS), qui est saisie des opérations impliquant des sociétés étrangères et pouvant nuire à la sécurité nationale. Or le secteur des télécoms fait partie des domaines jugés stratégiques en matière de sécurité.

"Ce n'est pas gagné d'avance. Cela ne veut pas dire que l'accord sera rejeté ou quelque chose dans le genre, mais cela veut dire qu'il sera passé à la loupe", a déclaré un expert de la CFIUS souhaitant rester anonyme. "Pas facile mais pas impossible", a commenté un autre expert de la commission, Jim Lewis, du Center for Strategic and International Studies.

UN GROS MORCEAU

T-Mobile US, détenu à 66,67% par Deutsche Telekom, a annoncé jeudi avoir renoué avec les bénéfices au deuxième trimestre et a fait état de 1,5 million de nouveaux clients, contre 1,1 million un an plus tôt, grâce à sa campagne de promotions agressives.

"Nous savons que c'est une industrie d'échelle. L'échelle vous procure un avantage", a déclaré son directeur financier Braxton Carter à Reuters à cette occasion. "Pour l'instant, on n'a eu qu'un aperçu de ce que serait une réelle concurrence dans ce secteur. Si on nous laissait mettre le turbo, il y aurait une occasion formidable d'apporter de la concurrence sur ce marché".

Cette vision est certainement partagée par Xavier Niel, le fondateur d'Iliad, au vu des résultats de Free dont l'arrivée sur le marché français en 2012 a fait chuter les prix de 30% et fragilisé les opérateurs installés Orange, SFR et Bouygues Telecom.

Mais le Français, qui a aussi fait des acquisitions en Israël et à Monaco et se classe 133e fortune mondiale selon le magazine Forbes avec 9,5 milliards d'euros, devra pour cela se mesurer à un autre challenger : Masayoshi Son, le patron de Softbank et président du conseil d'administration de Sprint, qui entend lui aussi bousculer le marché américain de la téléphone mobile.

L'entrepreneur japonais détient 19,3% de Softbank et est 46e du classement de Forbes avec une fortune de 18,4 milliards de dollars.

Iliad a indiqué que son offre en numéraire serait financée par une combinaison de dette et de fonds propres, et a ajouté s'être assuré du soutien de "banques internationales de premier plan pour la dette d'acquisition".

Le financement en fonds propres serait d'environ deux milliards d'euros et Xavier Niel participerait à l'augmentation de capital.

Une telle opération serait néanmoins un gros morceau pour Iliad, dont la capitalisation boursière est légèrement supérieure à 16 milliards de dollars (11,9 milliards d'euros) alors que celle de T-Mobile US est de quelque 25 milliards de dollars (18,7 milliards d'euros).

Iliad a précisé que son offre indicative était soumise à certaines conditions, notamment à la réalisation d'une évaluation (due diligence) de T-Mobile US.

BREAKINGVIEWS-Flaky Iliad bid muddies T-Mobile US sale odyssey

* Le communiqué d'Iliad http://bit.ly/1koMPX6 (Avec la contribution de Jean-Michel Bélot à Paris, Edwin Chan à San Francisco, Supantha Mukherjee à Bangalore, Marina Lopes à New York, Harro Ten Wolde et Peter Maushagen à Francfort, édité par Véronique Tison)