* Les pourparlers se poursuivent plus de 24 heures après la date butoir

* Aucune garantie de résultat, selon les diplomates

* Fabius: "Les derniers mètres sont les plus difficiles"

* L'Iran estime que le succès dépend du P5+1

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par Louis Charbonneau et John Irish et Parisa Hafezi

LAUSANNE, Suisse, 2 avril (Reuters) - Les grandes puissances et l'Iran ont entamé mercredi soir à Lausanne une deuxième nuit de négociations au-delà de la date butoir qu'ils s'étaient fixée pour parvenir à un accord préliminaire sur le programme nucléaire de Téhéran.

Les discussions entre Téhéran et le P5+1, qui regroupe les cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies (Etats-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni) et l'Allemagne, peuvent aussi bien aboutir que s'effondrer dans les prochaines heures, disent les diplomates réunis au bord du lac Léman.

Les pourparlers, qui visent à bloquer la possibilité pour l'Iran d'acquérir l'arme atomique, en échange d'une levée des sanctions imposées à Téhéran, achoppent sur des points cruciaux, même si les grandes lignes d'un accord semblent acquises.

Le secrétaire d'Etat américain John Kerry et le ministre allemand des Affaires étrangères Frank-Walter Steinmeier ont indiqué qu'ils resteraient au moins jusqu'à jeudi à Lausanne pour tenter de conclure cet accord politique, qui doit ouvrir la voie à un accord définitif d'ici la fin juin.

Le chef de la diplomatie française Laurent Fabius, qui était rentré à Paris mardi soir en jugeant les progrès insuffisants, est reparti en Suisse dans la soirée de mercredi. "On est à quelques mètres de l'arrivée mais les derniers mètres sont les plus difficiles et on va essayer de les franchir. Ce n'est pas encore fait", a-t-il dit à son retour à Lausanne.

Pour le ministre français des Affaires étrangères, il y a encore des efforts à faire côté iranien. "Nous voulons un accord robuste et vérifiable et il reste des points où il faut progresser, notammment du côté iranien", a-t-il insisté.

WASHINGTON APPELLE L'IRAN À AGIR

Le programme nucléaire iranien empoisonne les relations entre l'Iran et les Occidentaux depuis 2002 et a conduit l'Onu, les Etats-Unis et l'Union européenne à imposer depuis 2006 des sanctions qui étouffent l'économie iranienne.

La République islamique est soupçonnée de vouloir la bombe atomique, ce qu'elle dément, disant seulement vouloir produire de l'électricité à partir de l'énergie nucléaire.

L'Iran et les pays du P5+1, tout en reconnaissant avoir rapproché leurs points de vue, se reprochent mutuellement de ne pas présenter de propositions qui débloqueraient l'impasse.

Les pourparlers bloquent ces derniers jours sur plusieurs points: la possibilité pour l'Iran d'enrichir librement de l'uranium pour la recherche scientifique, et le rythme de levée des sanctions ainsi que la question de leur rétablissement en cas de non-respect par Téhéran de ses engagements.

A la reprise des négociations, mercredi matin, plusieurs participants - Russie, Chine, Iran - faisaient preuve d'un certain optimisme. Dans la soirée, les déclarations incitaient nettement à la prudence.

Le ministre iranien des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, a déclaré à la presse que c'était aux grandes puissances, et non à l'Iran, de bouger. "Le progrès et le succès des discussions dépendent de la volonté politique de l'autre partie (...) et c'est un point sur lequel ils ont toujours eu un problème", a-t-il dit aux journalistes.

Dans le même temps, ou presque, la Maison blanche appelait Téhéran à agir. "Le moment est venu pour l'Iran de prendre des décisions", a déclaré le porte-parole de la présidence, Josh Earnest, réaffirmant que Washington était prêt à prendre ses responsabilités et à se retirer si nécessaire des négociations avant le 30 juin. (Henri-Pierre André et Jean-Stéphane Brosse pour le service français)