Buenos Aires (awp/afp) - Le remboursement intégral par l'Argentine des "fonds vautours" vendredi, conformément à l'accord conclu fin février avec ses créanciers, tourne la page d'un conflit vieux de 15 ans et lève les obstacles au retour plein et entier du pays sur les marchés financiers.

"La République [argentine] a payé en intégralité", a affirmé L'avocat de l'Etat argentin Michael Paskin dans un courrier citant les autorités argentines et envoyé au juge Thomas Griesa chargé de ce contentieux, né du défaut du pays en 2001.

Après des années de blocage, l'Argentine était parvenue le 29 février à un accord avec ses principaux créanciers qui refusaient toute décote sur leurs titres de dette, achetés à prix cassés après 2001. Le pays s'était alors engagé à leur rembourser la somme totale de 6,5 milliards de dollars à une vingtaine de plaignants. Il versera également 3,1 milliards à d'autres groupes de créanciers.

Les fonds dits "vautours" NML Capital et Aurelius Management, qui menaient la bataille contre Buenos Aires, et les autres créanciers associés à l'accord, ont été remboursés grâce à une émission obligataire de 16,5 milliards de dollars réalisée par l'Argentine cette semaine, avec l'accord de la justice américaine.

S'appuyant sur ce remboursement, l'avocat demandait au magistrat new-yorkais de lever "toutes les injonctions" qui empêchaient le retour plein et entier du pays sur les marchés financiers.

Le juge Griesa a accédé vendredi à sa requête. "Après avoir analysé avec soin les demandes de la République (argentine), le tribunal estime que les conditions ont été remplies. En conséquence, l'ensemble des injonctions sont levées", a affirmé le juge dans une déclaration écrite.

La justice américaine avait posé deux conditions à la normalisation économique de l'Argentine, qui ont été remplies par le gouvernement de centre-droit du président Mauricio Macri: l'abrogation d'une loi empêchant le paiement des fonds "vautours" et leur remboursement effectif.

- La page du défaut 'définitivement' tournée -

En attendant que ces deux conditions soient réunies, la justice américaine bloquait le remboursement par l'Argentine des créanciers ayant accepté une restructuration de leur dette en 2005 et 2010, plaçant mécaniquement le pays en situation de défaut de paiement partiel.

"L'Argentine réintègre la communauté financière internationale en fermant ce chapitre difficile et coûteux pour le pays", a déclaré à l'AFP Mariano Sanchez, du cabinet KPMG.

"Une nouvelle étape commence. Les Argentins sont prêts à entreprendre et à croître", a écrit sur Twitter le ministre argentin du Budget Alfonso Prat-Gay.

"C'est la fin d'un très long chemin qui n'aurait jamais dû exister", a-t-il déclaré sur la radio Mitre.

En début de semaine, la demande d'emprunt argentin - 68 milliards USD - a largement dépassé l'offre. Buenos Aires a porté son émission obligataire au-delà de son objectif initial de 12 à 15 milliards de dollars, contre 16,5 milliards finalement, en profitant au passage pour se refinancer.

Le secrétaire américain au Trésor Jack Lew a salué cette "étape importante, non seulement pour l'Argentine, mais pour l'ensemble du système financier mondial".

Cette levée de fonds met un terme à des années de contentieux juridique avec les fonds spéculatifs qui ont toujours refusé d'accepter, comme l'on fait 93% des créanciers du pays, une décote sur les titres qu'ils détiennent.

Voyant se dessiner lundi le succès de l'opération, le président Mauricio Macri avait estimé que l'Argentine était "sortie d'années de conflit financier avec le monde".

Au lendemain de la crise économique de 2001-2002, l'Argentine avait rompu avec les institutions internationales (FMI, Banque mondiale), que les ex-présidents de gauche Nestor Kirchner (2003-2007) puis de son épouse Cristina (2007-2015) tenaient pour coresponsables du défaut de paiement de 2001.

Profitant du boom des matières premières dans les années 2000, Buenos Aires s'était désendetté grâce au produit des exportations agricoles, pilier de l'économie argentine.

La baisse des cours a conduit l'Argentine à revoir sa stratégie pour lui permettre un retour sur les marchés internationaux de capitaux.

afp/rp