PARIS (Agefi-Dow Jones)--La mauvaise humeur est fréquente entre chefs d'Etat qui ne s'apprécient pas. Mais entre la chancelière allemande et le président américain, il s'agit d'autre chose : d'une rupture, tout simplement.

"Le temps où on pouvait toujours compter sur ses amis est terminé. Nous autres Européens devons prendre notre destin en mains". C'est par ces propos très gaulliens que l'expérimentée chancelière a tiré sans délai les leçons des sommets récents de l'Otan et du G7.

Qu'importe que son amertume manifeste ne cadre pas avec les propos conciliants du président Macron. Les conséquences sont déjà tirées.

Primo l'Allemagne s'attend à ce que Trump enterre l'accord de Paris sur le climat, ou au mieux s'abstienne de toute application concrète. Secundo, un contentieux commercial majeur se profile sur l'automobile, dossier sur lequel Trump a attaqué la chancelière avec une agressivité consommée.

Un échec du sommet du G20 que Mme Merkel présidera à Hambourg en juillet menace déjà.

Tertio, l'Allemagne a constaté avec colère que M. Trump a refusé d'évoquer l'article 5 du traité de l'Otan qui garantit qu'une atteinte à la sécurité d'un membre est une atteinte à la sécurité de tous. Au moment où Poutine obsède littéralement l'Europe, c'est un casus belli.

La réponse, la voici: l'Allemagne est déterminée à relancer coûte que coûte l'Europe institutionnelle; et résolue comme jamais à ouvrir dans le militaire un nouveau champ de coopération continentale naguère tabou.

C'est d'Emmanuel Macron, qui sondait de son côté les intentions russes, que Berlin attend que son mot d'ordre de "compter sur ses propres forces" soit autre chose qu'un slogan creux. Il est prévenu: la chancelière exigera beaucoup et tout de suite.

-Philippe Mudry, Directeur des rédactions de L'Agefi ed: LBO

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