(Actualisé avec Hezbollah § 5-6)

par Laila Bassam

ALEP, Syrie, 9 décembre (Reuters) - L'armée syrienne a maintenu vendredi son offensive dans Alep-Est, avec troupes au sol appuyées par l'aviation, afin d'en chasser les rebelles qui occupent cette partie de la grande ville du nord de la Syrie depuis 2012.

Les forces loyalistes ont enregistré des succès foudroyants ces derniers jours et ont repris la vieille ville. A tel point que la reconquête d'Alep paraît désormais être une question de jours, ce qui pourrait modifier le cours de la guerre civile qui ravage le pays depuis bientôt six ans.

"Jusqu'à présent, 32 des 40 quartiers d'Alep-Est ont été repris", dit-on de source militaire, soit environ 80%. "L'avance des troupes est conforme à ce qui était prévu, et parfois même plus rapide", ajoute-t-on. Le ministère russe de la Défense a estimé, lui, que 93% des quartiers d'Alep-Est avaient été repris.

L'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), qui rend compte du conflit grâce à un réseau d'informateurs sur le terrain, rapporte que des combats ont fait rage toute la nuit et se poursuivaient vendredi sur les lignes de front. Notamment dans le quartier de Cheikh Saïd, dans le sud d'Alep-Est.

A Beyrouth, le Hezbollah libanais, mouvement chiite armé qui combat avec les forces gouvernementales syriennes, a déclaré dans la soirée que la victoire "promise" à Alep était imminente.

"De grands événements se déroulent à présent dans notre région (...), (ainsi) ce qui se déroule à Alep, et les ramifications de la victoire promise et à venir dans la bataille dans toute la Syrie et la région", a affirmé le chef du mouvement, Hassan Nasrallah, dans un discours retransmis en direct par la télévision du Hezbollah, Al Manar.

Aucune percée significative des forces loyalistes n'était toutefois enregistrée, aux dires de diverses sources contactées.

Des journalistes de Reuters dans la vieille ville ont entendu pas moins de neuf raids aériens en une demi-heure.

Un responsable du groupe rebelle Djabha Chamiya basé en Turquie a confirmé que, comme les jours précédents, des bombardements frappaient la ville. "Hélicoptères, avions, obus, comme tous les jours, ça ne change pas", a-t-il dit.

D'après un combattant du groupe Nour al Din al Zinki, "bombes incendiaires, barils d'explosifs et obus d'artillerie" pleuvent sur Alep-Est. "Grâce à Dieu, les rebelles repoussent (les attaques), mais la situation n'est pas évidente."

CIVILS DISPARUS

Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a démenti vendredi avoir dit la veille que l'armée syrienne avait suspendu ses "opérations militaires actives" dans l'est d'Alep, afin de permettre l'évacuation de civils.

Le chef de la diplomatie russe, qui s'exprimait à Hambourg en marge d'une réunion de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), a redit que les combats continueraient tant que les rebelles refuseront de quitter Alep-Est.

Il a au passage reproché aux Etats-Unis de ne pas tout faire pour faciliter l'évacuation des civils.

A Moscou, un responsable du ministère de la Défense a dit que plus de 10.500 Syriens avaient pu quitter ces dernières 24 heures les quartiers d'Alep-Est sous contrôle des rebelles. Ce chiffre n'a pas pu être vérifié auprès d'autres sources.

Des dizaines de milliers d'habitants, 100.000 selon les Nations unies, sont encore dans Alep-Est et leur sort inquiète au plus haut point les organisations d'aide humanitaire.

Le Comité international de la Croix-Rouge, qui réclame un cessez-le-feu pour permettre une intervention humanitaire, dit que la situation est "catastrophique".

Eau, nourriture, carburant et médicaments sont rares. Tous les hôpitaux du secteur ont été bombardés. "Il n'y a plus aucun hôpital en service (...) qu'est-ce que vous voulez que je vous dise ?", a confié une infirmière à Reuters.

En outre, d'après le Haut Commissariat des droits de l'homme de l'Onu, plusieurs centaines d'hommes sont portés disparus après avoir fui les quartiers orientaux d'Alep.

"Nous avons reçu des allégations très inquiétantes selon lesquelles des centaines d'hommes ont disparu après être passés dans des zones sous contrôle du gouvernement", a déclaré à Genève le porte-parole de l'agence onusienne, Rupert Colville.

Les proches des disparus, qui sont pour la plupart âgés de 30 à 50 ans, sont sans nouvelles d'eux depuis sept à dix jours. (avec Lisa Barrington et Tom Perry à Beyrouth, Andrew Osborn à Moscou et Stéphanie Nebehay à Genève; Gilles Trequesser et Henri-Pierre André pour le service français)