Francfort (awp/afp) - La BCE a décidé jeudi de prolonger son programme de rachats de dettes pour soutenir l'économie européenne jusqu'à fin 2017, mais dans des volumes plus modestes, une décision inattendue qui pourrait constituer l'amorce d'une politique monétaire plus restrictive en zone euro.

Le conseil des gouverneurs de l'institution de Francfort a décidé de poursuivre ses vastes rachats de dettes publiques et privées, actuellement fixés à 80 milliards d'euros par mois, comme prévu jusque fin en mars 2017, puis de les prolonger à un rythme de 60 milliards d'euros par mois jusque fin décembre 2017.

Les rachats pourront être étendus au-delà de cette date, "si nécessaire", a indiqué la Banque centrale.

Ces injections massives d'argent dans l'économie, mesures exceptionnelles mises en place par la BCE, visent à stimuler la croissance.

"La BCE vient de surprendre en annonçant qu'elle allait étendre son programme de QE d'au moins neuf mois, mais à un rythme plus lent", a réagi Carsten Brzeski, économiste chez ING Diba.

"Même sans l'appeler +tapering+, la BCE vient tout juste d'annoncer un tapering", a-t-il jugé. Ce terme désigne une réduction des rachats de dettes et marque plus globalement de début d'une politique monétaire plus restrictive.

Les économistes attendent maintenant les explications du patron de la BCE Mario Draghi qui doit s'exprimer lors d'une conférence de presse.

La politique de la BCE reste toutefois ultra-accommodante et va le rester encore dans les mois à venir, même si le volume des rachats de titres est plus limité qu'auparavant.

Elle a d'ailleurs conservé, et comme escompté, son principal taux directeur à 0%, son plus bas niveau historique. Elle a aussi laissé en l'état le taux de prêt marginal, abaissé à 0,25% en mars, et le taux de dépôt, porté en territoire négatif pour la première fois en juin 2014 et qui stationne désormais à -0,40%.

La BCE s'inquiète toujours d'une inflations trop basse en zone euro. Avec 0,6% sur un an en novembre, elle éloignée de son objectif d'un taux légèrement inférieur à 2%.

TRUMP, BREXIT, ITALIE ETC...

La BCE a aussi en tête les risques géopolitiques, qui pourraient mettre des bâtons dans les roues à une croissance européenne en voie de reprise.

Les événements récents montrent qu'ils sont devenus "la source d'incertitudes majeure pour les mois à venir", avait déclaré Mario Draghi lors d'une audition fin novembre devant le Parlement européen à Bruxelles, en référence aux Brexit et à l'élection de Donald Trump, apôtre du protectionnisme.

Les impacts économiques de la décision du Royaume-Uni de quitter l'Union européenne et de l'arrivée de Trump à la Maison blanche restent encore incertains.

Les remous politiques en Italie, où le Premier ministre Matteo Renzi a dû démissionner après l'échec de son référendum constitutionnel dimanche, ne sont pas non plus pour rassurer, alors que le pays est confronté à une grave crise bancaire.

Et plus globalement la progression du populisme en Europe inquiète avant une série de scrutins majeurs l'an prochain, aux Pays-Bas, en France ou en Allemagne.

afp/jh