Ces derniers, constate ce rapport, ont fortement accru leurs marges sur un certain nombre de produits de grande consommation, comme le beurre, l'emmental ou la viande de porc par exemple.

Ce document de 240 pages remis lundi au ministre de l'Agriculture et de la Pêche, Bruno Le Maire, synthétise les travaux de l'Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires, créé à l'automne dernier dans le but d'assurer un "juste équilibre" dans la répartition de la valeur ajoutée des filières concernées, au profit des producteurs.

Et les données compilées dans le rapport permettent de mesurer l'ampleur du chantier. Elles montrent entre autres une tendance régulière à la hausse des marges brutes des grands industriels des produits laitiers d'une part, de celles des distributeurs d'autre part sur les dix dernières années.

Ainsi, entre 2001 et 2011, la marge brute de la distribution en grands magasins spécialisés a augmenté de près d'un tiers pour l'emmental, d'environ 50% pour la côte de porc et de quasiment 100% pour le beurre en plaquette.

Ainsi, écrit le président de l'Observatoire, Philippe Chalmin, universitaire spécialiste des marchés agricoles, "force est de constater les tensions s'exerçant dans les relations entre production, industrie et distribution".

"RÉVOLUTION CULTURELLE"

Une situation qu'il qualifie d'"originalité française" et qui, à ses yeux, renforce "les oligopoles bilatéraux naturels (un petit nombre de distributeurs et quelques grands industriels) aux dépens d'un monde agricole atomisé et de tout un tissu de PME régionales".

Philippe Chalmin met aussi en avant les difficultés liées à l'instabilité des prix agricoles, qu'il qualifie de "révolution culturelle" car, explique-t-il, "la notion de 'prix rémunérateur' aura de moins en moins de sens à l'avenir".

Parmi les premières réactions à la publication du rapport, les chambres d'agriculture de France estiment que l'Observatoire "démontre que souvent les producteurs ne peuvent tout simplement pas vivre de leur travail".

Elles regrettent par ailleurs le manque de transparence de la grande distribution qui, selon elles, "n'a pas joué le jeu de la réciprocité et de la loyauté".

Pour sa part, l'association de défense des consommateurs UFC-Que Choisir a demandé aux parlementaires "d'encadrer par la loi" les marges du secteur.

"Si les professionnels ont systématiquement répercuté les hausses de prix agricoles en 2007, ils se sont bien gardé de faire de même pour les baisses observées dès le deuxième semestre 2008", constate l'UFC-Que Choisir dans un communiqué.

Marc Angrand, édité par Yves Clarisse