Ankara (awp/afp) - La livre turque a brutalement chuté jeudi après que la Banque centrale a décidé d'une hausse moins importante qu'escompté par les marchés de l'un de ses taux d'intérêt.

La livre turque, qui a perdu plus de 30% de sa valeur contre le dollar au cours des deux dernières années, a perdu 1,79% jeudi, s'échangeant à 3,88 livres pour un dollar en fin d'après-midi.

Les marchés tablaient sur une augmentation de 100 points de base des taux d'intérêt de la Banque centrale afin de combattre une inflation qui a atteint près de 13% en novembre, son taux le plus élevé depuis 2003.

Mais le comité de politique monétaire de la Banque centrale a laissé inchangé son taux de refinancement à une semaine à 8%, ne relevant que son taux de prêt des liquidités tardives de 12,25% à 12,75%.

Dans son communiqué publié après la réunion de jeudi, la Banque centrale a laissé entendre qu'une hausse des taux d'intérêt serait envisageable à l'avenir, affirmant que sa "politique monétaire restrictive" serait maintenue jusqu'à ce que les perspectives d'inflation montrent une amélioration "significative".

"Les prévisions pour l'inflation (...) seront suivies de près et de nouvelles mesures de resserrement monétaires seront prises, si nécessaire", a ajouté la Banque centrale.

La marge de manoeuvre de la Banque centrale semble limitée, alors que le président turc Recep Tayyip Erdogan peste régulièrement contre la logique selon laquelle il faudrait augmenter les taux d'intérêt pour contrer l'inflation.

M. Erdogan presse la Banque centrale de baisser ses taux afin d'encourager les emprunts dans l'espoir de soutenir la croissance par la consommation et les investissements, alors que le pays est déjà plongé dans une atmosphère électorale à deux ans d'élections importantes.

"Etant donnée la force de l'inflation et les attentes du marché, il est difficile d'expliquer (cette décision) autrement que par les commentaires récents du président Erdogan", estime William Jackson, de Capital Economics, dans une note envoyée à ses clients.

Les économistes pensaient pourtant que la croissance de 11% au troisième trimestre, annoncée lundi, laisserait une plus grande marge de manoeuvre à la Banque centrale.

"La décision plutôt timide de la Banque centrale laisse la devise exposée à des pressions de dépréciation supplémentaires", analyse Gökçe Celik, de QNB Finansbank, dans une note.

Mettant en garde contre une dépréciation accrue de la livre qui alimenterait davantage l'inflation et conduirait la Banque centrale à prendre une mesure bien plus sévère l'année prochaine, M. Celik estime que la décision de jeudi pourrait s'avérer être "un pari coûteux".

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