(Actualisé avec la réponse du gouvernement §4-5)

par Aaron Ross

KINSHASA, 21 octobre (Reuters) - Les services de sécurité de la République démocratique du Congo (RDC) ont abattu, brûlé, battu et lynché au moins 48 civils le mois dernier et ont recruté des voyous pour réprimer les manifestations antigouvernementales, indique vendredi un rapport de l'Onu.

Le bilan de ces deux jours de violence à Kinshasa, qui ont également fait quatre morts dans les rangs de la police, est plus élevé que celui qui avait été enregistré en 2011 durant l'ensemble du processus électoral, souligne ce rapport du Bureau conjoint des Nations unies aux droits de l'homme en RDC (BCNUDH).

L'organisme a comptabilisé au moins 422 victimes de violations des droits de l'homme entre le 19 et le 21 septembre.

Le conseiller diplomatique en chef de Joseph Kabila, Barnabé Kikaya Bin Karubi, a reconnu des "erreurs" de la part de la police et des forces armées tout en faisant valoir que celles-ci se sont retrouvées aux prises avec des "voleurs et des violeurs".

Il a estimé que la réaction des forces de l'ordre avait été disproportionnée par rapport à ce qui peut être considéré en général comme acceptable mais que policiers et militaires s'étaient retrouvés en position de légitime défense.

Parmi les civils tués, 38 ont été abattus par la police, des militaires ou des gardes présidentiels et sept ont été brûlés vifs, notamment lors d'une attaque menée contre le siège d'un des principaux partis d'opposition.

Le bilan pourrait toutefois être en réalité beaucoup plus lourd, dit l'Onu qui explique que les autorités entravent les accès aux morgues.

Le rapport indique également que des informations concordantes font état de la distribution de machettes et d'argent à une centaine de jeunes gens afin qu'ils perturbent la manifestation.

Ni le porte-parole du gouvernement de la RDC ni le ministère de la Justice n'étaient immédiatement joignables pour commenter ce texte. Un représentant de la police a de son côté dit ne pas avoir pu le consulter.

Le gouvernement a démenti la semaine dernière que les forces de sécurité aient ouvert le feu sur les manifestants présentés par les autorités comme des hommes menant une insurrection armée. Dans son propre rapport, il déplore la mort de 32 personnes, dont trois policiers, tués par des manifestants, ou des vigiles privés, ou dans des accidents.

La coalition au pouvoir en République démocratique du Congo (RDC) et une partie de l'opposition se sont accordées pour repousser à avril 2018 l'élection présidentielle théoriquement prévue le mois prochain.

Mais la plupart des formations de l'opposition boycottent ces discussions, qu'elles présentent comme un prétexte visant à maintenir le président Joseph Kabila en fonction après l'expiration de son mandat, le 19 décembre.

Soupçonnant le chef de l'Etat, au pouvoir depuis 2001, de se préparer à solliciter un troisième mandat au mépris de la Constitution, elles ont observé une grève nationale mercredi dernier.

La procureure de la Cour pénale internationale a dépêché cette semaine une délégation en RDC pour appeler toutes les parties à la retenue et a prévenu que les violations des droits de l'homme pourraient faire l'objet de poursuites. (Aaron Ross, Nicolas Delame et Danielle Rouquié pour le service français, édité par Jean-Stéphane Brosse)