STRASBOURG, 16 avril (Reuters) - Le Conseil de l'Europe s'alarme d'une crise "sans précédent" des droits de l'Homme et de la démocratie sur le continent, en dépit des engagements souscrits par ses 47 Etats membres lors de leur adhésion.

C'est la première fois que l'organisation paneuropéenne publie une évaluation du respect de ses normes sur la base des rapports produits par ses multiples instances de suivi ("monitoring") et par son bras judiciaire, la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH).

Parmi les problèmes les plus graves relevés, les discriminations envers les minorités ethniques concernent 39 Etats, les mauvaises conditions de détention, 30, la corruption 26, l'exclusion sociale dont sont victimes les Roms, 23.

"Les droits de l'Homme, la démocratie et l'état de droit en Europe sont aujourd'hui confrontés à une crise sans précédent depuis la fin de la Guerre froide", affirme le secrétaire général du Conseil de l'Europe, Thorbjørn Jagland, dans une adresse au comité des ministres de l'organisation.

"La crise en Ukraine illustre on ne peut plus clairement les dangers qui nous menacent », ajoute-t-il.

La situation de quasi-guerre civile et de conflit avec la Russie est selon lui la résultante de « fléaux endémiques » que sont la corruption et les abus de pouvoirs nés de l'absence d'un pouvoir judiciaire indépendant, d'un parlement « qui fonctionne bien » et de médias libres.

Les autres pays concernés par les manquements aux règles d'un Etat de droit ne sont pas nommés mais apparaissent clairement dans les rapports des différents organes de suivi.

Le bilan dresse en creux un constat d'échec du Conseil de l'Europe, créé en 1949 pour défendre les valeurs démocratiques de l'Europe libérale face aux pays du bloc communiste, lesquels l'ont rejoint en un peu moins de quinze ans après la chute du "Rideau de fer".

Face à des violations flagrantes de ses valeurs dont les guerres menées par la Russie en Tchétchénie ou avec la Géorgie, la détention d'opposants politiques en Azerbaïdjan ou la répression contre les Kurdes en Turquie, le Conseil de l'Europe a toujours privilégié la voie du dialogue.

Le Conseil de l'Europe a prévu d'engager un « dialogue confidentiel » avec chacun des 47 Etats membres. Le secrétaire général juge nécessaire un « saut qualitatif dans l'engagement politique des Etats membres au plus haut niveau » et demande la tenue d'un sommet des chefs d'Etat et de gouvernement. (Gilbert Reilhac, édité par Sophie Louet)