Pharnext ? Non, rien

Je vous laisse juges de la communication financière ultra-agressive de Pharnext ces dernières semaines, caractéristiques des sociétés qui sont davantage motivées par le succès de leurs plans de financements dilutifs que par l'intérêt de leurs actionnaires. Vous savez à quel point j'adore ce genre de dossier et à quel point je me désespère de l'inaction du régulateur. Ce matin, Pharnext a annoncé que les résultats de phase III de l'essai PREMIER de PXT3003 dans la maladie de Charcot-Marie-Tooth de type 1A n'ont pas atteint les attentes. Sans donner de détails sur l'ampleur de l'échec, on comprend à la lecture du communiqué que les patients traités avec le candidat et ceux sous placebo ont présenté les mêmes améliorations. Le critère primaire de l'étude est justement l'évaluation de l'efficacité du traitement par PXT3003 par rapport au placebo. Evidemment, le titre s'effondre.

Voici les sept derniers communiqués publiés par Pharnext hors celui du jour et ceux concernant spécifiquement des levée de fonds dilutives :

  • Pharnext organise une conférence lundi 11 décembre à 14h pour présenter les premiers résultats de l’étude clinique pivot de Phase III (essai PREMIER) de PXT3003 dans la maladie de Charcot-Marie-Tooth de type 1A (8 décembre)
  • Pharnext annonce le gel de la base de données de l’étude clinique pivot de Phase III (essai PREMIER) de PXT3003 dans la maladie de Charcot-Marie-Tooth de type 1A, dernière étape avant la publication des premiers résultats (4 décembre)
  • Pharnext annonce être à J-18 de la publication des premiers résultats de l’étude clinique pivot de Phase III (essai PREMIER) dans la maladie de Charcot-Marie-Tooth de type 1A (23 novembre)
  • Pharnext annonce avoir réussi la fabrication des lots d’enregistrement de PXT3003 aux États-Unis (20 novembre)
  • Pharnext reçoit une nouvelle offre valorisant son candidat médicament dans la maladie de Charcot-Marie-Tooth de type 1A à plus de 500 MEUR et le soutien de ses partenaires financiers (30 octobre)
  • Pharnext annonce avoir reçu deux offres valorisant son candidat médicament dans la maladie de Charcot-Marie-Tooth de type 1A à plus de 250 MEUR et lève 2,5 MEUR (16 octobre)
  • Pharnext : entre dans la dernière ligne droite pour la signature d’un accord de licence de son candidat médicament dans la maladie de Charcot-Marie-Tooth de type 1A permettant de valoriser son actif et de mettre fin au contrat d’OCEANE-BSA (20 septembre)

Moralité ? Les biotechs sont des dossiers délicats, encore plus lorsqu'elles sont pilotées de la sorte. Les processus cliniques sont longs et difficiles et tout le monde aime mieux voir les laboratoires réussir qu'échouer. Mais la communication spectacle a ses limites. Ou pas d'ailleurs, puisque personne ne siffle la fin de la récré.

Peugeot Invest, de Charybde en Signa

La société de portefeuille de la famille Peugeot a connu quelques déboires ces deux dernières années, même si sa diversification a permis de faire passer la pilule et au titre d'afficher un parcours tout à fait honorable en bourse (+13% en 2023, hors dividende). Le family office détenait une part conséquence d'Orpéa lors des révélations du livre "Les Fossoyeurs" début 2022. Avant les opérations de recapitalisation récente, Peugeot Invest pointait encore à 5,04% du capital. Le management explique toutefois que les dividendes encaissés et les ventes partielles de titres effectuées au cours de la vie de l’investissement "ont limité de manière significative les pertes par rapport au capital investi initialement". Après la première augmentation de capital d'Orpea, l'actionnaire s'est laissé diluer à 0,01%.

En 2023, c'est la chute de la maison Signa qui pèse sur les comptes. Peugeot Invest avait lourdement investi dans le groupe immobilier autrichien. En juin 2019, il avait pris 5% de Signa Prime Selection pour 186 M€, avant de réinjecter deux fois des fonds lors des augmentations de capital qui ont suivi : 25 M€ en 2019 et 10 M€ e n 2022. Le groupe avait aussi pris, en juin 2021, 5% de Signa Development Selection pour 75 M€, avant de participer à une levée de fonds à hauteur de sa quote-part en 2022, soit 10 M€.

Peugeot Invest a précisé le 30 novembre dernier que son exposition à Signa représente 183 M€, soit 2,9% de son actif brut de 6,4 Mds€. Il faudra attendre le bilan 2023 pour que le groupe mette à jour la valorisation de ses participations dans Signa.

Solvay, le bon grain de l'ivraie ?

Douze an après avoir géré une fusion-absorption du français Rhodia, Solvay procède à une scission, avec sa séparation en deux entités : Solvay et Syensqo, la dernière citée étant cotant depuis ce matin à la Bourse de Bruxelles (et à Paris) sous le ticker SYENS. La scission et le prix de base annoncé par Euronext donnent un prix de référence de 83,25 EUR pour Syensqo, soit 29,10 EUR pour Solvay sur la base du prix de clôture de 112,35 EUR vendredi soir.

Je chipe la description de Syensqo à KBC Securities, dans sa note du jour rédigée par Wim Hoste : Syensqo dégage 58% de ses revenus des polymères spéciaux et des composites, une activité très rentable (marge d'EBITDA sous-jacente combinée supérieure à 30%) et à fort potentiel de croissance. Le solde des activités (Novecare, Technology Solutions, Aroma Performance et Oil & Gas chemicals) est considéré comme ayant un potentiel de redressement après une passe plus difficile. Syensqo a dégagé 7,9 Mds€ de revenus en 2022. On peut considérer que c'est le périmètre des activités dynamiques de l'ancien Solvay, qui garde le périmètre du grand-père : des produits de base ou mono-technologiques, dont carbonate de soude, qui pèse plus de 40% de l'activité. Cette entité sera gérée "de façon très disciplinée".

De façon triviale, Syensqo va chercher à prouver que c'est un chimiste de spécialités à vocation technologique avec des expositions hyper-sexy (voiture électrique, hydrogène, matériaux de performance…), qui devrait monter en bourse (si tout se passe comme prévu). Solvay va s'employer à verser de gros dividendes aux investisseurs plus pantouflards, en s'assurant que l'évolution déprimante de son cours soit compensée par un rendement de sénateur (si tout se passe comme prévu). Sans grande surprise, la CEO de Solvay, Ilham Kadri, a trouvé plus enthousiasmant d'aller prendre les commandes de Syensqo.