Il est intéressant de remonter sur les trois dernières décennies pour voir à quel point la monnaie américaine représente un indicateur précurseur de la tenue des places financières.
La règle générale concernant le dollar réside dans le fait qu’elle constitue une véritable réserve internationale. Ses variations peuvent avoir des retombées majeures sur les flux de capitaux.
Une trajectoire baissière du billet vert crèe un environnent d’instabilité financière alors qu’un comportement haussier encourage l’épargne et l’investissement.




Le comportement du dollar, segmenté par les changements de décennie (Graphique1)


Les années 90

Au cours de cette décennie, notamment après le krach obligataire de 1994, et sous la présidence de Bill Clinton, les Etats Unis ont connu une période d’accalmie au niveau des conflits militaires (certains spécialistes parlent de « dividendes de la paix ») au lendemain de la chute du mur de Berlin. Avec une hausse des impôts, les deux facteurs ont eu des répercussions positives sur le budget américain, ce qui a entrainé une appréciation du dollar.
Cette tendance a, par ailleurs, fait chuter les prix des matières premières. Au cours de cette période, les actions ont largement profité avec une hausse du S&P 500 de 290 % entre 1994 et 2000.

Les années 2000

La décennie suivante s’est déroulée tout autrement avec une guerre sans fin au Moyen-Orient, accompagnée de réductions drastiques des impôts par le nouveau président G.W.Bush. La dégradation de l’équilibre budgétaire a entrainé la baisse du billet vert et par conséquent une remonté durable des matières premières. Cette poussée des « commodities » a donné un réel dynamisme aux pays émergents ; ces derniers ayant connu une nette progression en termes de PIB à l’image des BRICs.
La performance des matières premières a eu comme symbole la prodigieuse poussée haussière de l’or avec plus 600% de gain sur la décennie.





Les matières premières délaissées progressivement par les investisseurs depuis l’entame de la décennie actuelle (Graphique 2)
 

Les années 2010

Avec l’Administration Obama qui affiche ses intentions de désengagement dans les conflits militaires, les Etats-Unis s’acheminent vers une réduction progressive des dépenses dédiées. Cette rétractation va dans le bon sens concernant l’endettement global du pays. La situation actuelle se rapproche des années 1990 où le déficit tend à se résorber grâce aux coupes budgétaires. Avec le retour des « économies de la paix », ce dernier se réduit en passant de 1500 milliards à 1000 milliards de dollars.
Résultante de cette conjoncture, le billet vert redevient attractif pour les investisseurs et les grands épargnants mondiaux ; sa trajectoire haussière est en phase de construction (voir graphique 1), le dollar index progresse depuis mi-2011 de près 10%.
Le pendant de la hausse de la monnaie américaine se concrétise par la dégradation du CRB. L’indice mondial des matières premières (graphique 2) se dégrade depuis 3 ans , baisse accentuée par le dégonflement de la bulle sur l’or .




Comportement du S&P 500 depuis 20 ans, marqué par des phases intensives (Graphique 3)
 

En résumé, le dollar rentre dans un schéma de cycle, au même titre que les bulles qui se sont enchainées (obligataire en 94, internet 2001, immobilier 2006) même si elles ont leurs propres caractéristiques et des conséquences divergentes. Acceptons le fait que l'économie nord américaine puisse se redresser durablement et que la monnaie la plus utilisée dans le monde soit aussi la plus adulée …. Le dollar pourra t-il, à nouveau, remplir à la fois, son rôle historique de monnaie de réserve et retrouver un digne statut de valeur refuge ?