L'air de rien, Wall Street vient d'enquiller quatre séances dans le rouge. Hier, le S&P500 a reculé de 0,7% pendant que le Nasdaq 100 cédait 0,4%. En Europe, la baisse s'est aussi installée, comme sur le CAC40 français (-0,85%), le DAX allemand (-0,4%) et le FTSE britannique (-1,1%). Les investisseurs ont toujours du mal à jauger la situation actuelle, même après les "éclairages" apportés par la Fed et la BCE, pour autant qu'on puisse qualifier d'éclairage le langage amphigourique utilisé par Jerome Powell et Christine Lagarde pour expliquer leurs politiques monétaires. Bon j'aurais pu dire tarabiscoté ou alambiqué, mais amphigourique c'est quand même rigolo comme terme.

Jusqu'ici, le marché s'accommodait assez bien de la situation complexe mais relativement lisible de la toile de fond économique. Mais il doit composer avec le nouvel éléphant dans la pièce, la crise bancaire. Je ne sais plus trop comment la qualifier après avoir utilisé ces derniers jours les termes "larvée", "combustion lente", "tâche d'huile", ou la sémantique médicale à base de gangrène et de cautérisation. Mais vous avez l'idée. Je vais y ajouter "vicieuse", parce que les autorités américaines sont dans une situation paradoxale. Inverser la politique monétaire en baissant les taux pour renforcer les liquidités dans le système financier montrerait un certain degré de panique face à la situation des banques du pays, ce qui risquerait de fragiliser encore plus les petits acteurs à court terme. Cela irait en outre à l'encontre du message de poursuite de la lutte contre l'inflation. Mais de l'autre côté, les mesures annoncées jusqu'ici n'ont pas permis de rassurer durablement. Western Alliance a encore perdu -40% hier. Pacwest encore -50%. First Horizon a chuté de 33% après que Toronto-Dominion eut renoncé à racheter l'établissement américain. Petite digression : BNP Paribas a eu du flair, et sans doute de la chance, en se séparant de sa filiale américaine BancWest, basée à San Francisco, avec un timing presque idéal puisque la transaction a été bouclée en février (on en parle ici).

La situation inquiète la Maison Blanche et l'administration, qui soupçonnent des manipulations de marché et qui sont en train de surveiller, je cite "les pressions exercées par les ventes à découvert sur les banques en bonne santé". Une partie de moi comprend la démarche, mais une autre, plus cynique, se dit que si Washington essaie de passer ce genre de message, c'est que le degré de confiance n'est pas bien élevé. Généralement, les Etats-Unis n'aiment pas beaucoup les mesures qui entravent la liberté du marché. Toutefois, la SEC a déjà eu recours ponctuellement à l'interdiction de la vente à découvert sur les titres financiers, notamment à l'automne 2008, juste après la faillite de Lehman Brothers.

Les marchés financiers vivent depuis quelques semaines avec cette épée de Damoclès suspendue au-dessus de leur tête. Pour le reste, ils continuent à réceptionner des brassées de résultats d'entreprises qui sont somme toute assez bons. Hier soir, c'est Apple qui a rassuré son monde en publiant des chiffres solides, soutenus par une reprise des ventes d'iPhones. Le groupe souffre toujours dans les ordinateurs, mais les smartphones et les services suffisent à faire son bonheur et ses bénéfices actuellement. Ce matin en Europe, quelques sociétés emblématiques comme Adidas dans les produits de consommation, Thales dans la défense et Intesa dans la banque ont aussi publié leurs performances trimestrielles. Adidas qui n'a pas averti d'une catastrophe financière ou commerciale de plus, ce qui est un petit événement en soi.

Il est important de noter aussi qu'en dépit des craintes sur le secteur bancaire, les informations et les rumeurs sur les opérations financières se multiplient, signe que l'appétit pour le risque perdure. Les fonds se battent pour l'éditeur allemand de logiciels Software AG, la société de test espagnole Applus susciterait l'intérêt d'investisseurs financiers et Blackstone envisagerait une entrée en bourse pour l'exploitant de casinos espagnol Cirsa, qui fait partie de son portefeuille.

La planète finance attend aussi à 14h30 les statistiques sur l'emploi aux Etats-Unis en avril. Je ne dirais pas que la donnée a moins d'importance depuis que la Fed a appuyé sur "pause" dans son cycle de resserrement monétaire, mais disons que l'attente est un peu moins fébrile et que la tension s'est déplacée vers les banques. Cela reste un marqueur important pour la dynamique économique, ou la non-dynamique d'ailleurs.

Je m'aperçois que je n'ai pas placé l'habituelle pitrerie du vendredi alors je vous soumets une devinette qui m'a été soufflée par un collègue en début de semaine : connaissez-vous deux sociétés européennes cotées qui sont l'anagramme l'une de l'autre ? Je ne peux plus promettre d'offrir un reblochon à ceux qui trouvent parce qu'il commence à faire chaud et que le transport de fromage fermier devient déraisonnable, mais je dois avoir quelques goodies Zonebourse pour les lauréats qui passent par les bords du lac d'Annecy.

En l'absence du Japon, qui termine sa "semaine d'or" fériée, la Chine continentale termine la semaine en baisse (-0,3% pour le CSI300), pendant que Hong Kong prend le contrepied, en hausse de 0,6% du côté du Hang Seng. C'est le calme plat en Corée du Sud (-0,02%). En Australie, l'ASX200 boucle la semaine sur une note positive. L'Europe est attendue en légère hausse avec le redressement des indicateurs avancés américains. Le CAC40 reprend 0,6% à 7384 points en ouverture de la séance.

Les temps forts économiques du jour

Pour terminer la semaine, les investisseurs vont s'intéresser aux chiffres mensuels de l'emploi américain d'avril, je crois qu'on l'aura compris. Les commandes d'usines allemandes (8h00) et les ventes de détail de la zone euro (11h00) permettront de patienter. Tout l'agenda ici. Cette nuit, l'indicateur PMI Caixin chinois pour les services est ressorti en zone d'expansion, mais moins dynamique que prévu.

L'euro est ferme à 1,1043 USD. L'once d'or rebondit à 2049 USD. Le pétrole reste sous pression, avec un Brent de Mer du Nord à 73,01 USD le baril et un brut léger américain WTI à 69,05 USD. Le rendement de la dette américaine sur 10 ans atteint 3,38%. Le bitcoin s'échange autour de 29 230 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • Akzo Nobel : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 77 à 83 EUR.
  • Barry Callebaut : Credit Suisse reste à surperformance avec un objectif de cours relevé de 2265 à 2300 CHF.
  • Dufry : Morgan Stanley passe de pondération en ligne à surpondérer en visant 56 CHF.
  • Eurobank : Deutsche Bank passe de neutre à acheter en visant 1,70 EUR.
  • Henkel : Berenberg reste à vendre avec un objectif de cours relevé de 52 à 58 EUR.
  • Geberit : Julius Bär reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 470 à 490 CHF.
  • Grenke : Pareto Securities passe d'acheter à conserver en visant 32 EUR.
  • IMI : Stifel passe de conserver à acheter en visant 1900 GBp.
  • Kahoot : Pareto Securities passe d'acheter à conserver en visant 25 NOK.
  • MorphoSys : JPMorgan reste à souspondérer avec un objectif relevé de 11 à 12 EUR.
  • Piraeus Financial : Deutsche Bank passe de neutre à acheter en visant 2,95 EUR.
  • Proximus : Morgan Stanley passe de souspondérer à pondération en ligne en visant 8,80 EUR.
  • SIG Group : Goldman Sachs reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 28,50 à 29,50 CHF.
  • Swiss Re : Goldman Sachs reste à la vente avec un objectif de cours relevé de 86 à 90 CHF.
  • Zalando : Crédit Suisse reste à surperformance avec un objectif de cours réduit de 46 à 43 EUR.

En France

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Air France-KLM : bat les attentes au T1, porté par les réservations estivales
  • Arkema : les résultats sont en forte baisse au T1. Les objectifs sont confirmés.
  • Bonduelle : la croissance du T3 fiscal est ralentie la faiblesse de la consommation, mais les objectifs de marge sont confirmés.
  • Rubis : les revenus du T1 sont en hausse de 18%. L'objectif de hausse du bénéfice net est confirmé.
  • Thales : affiche un CA en hausse de 9,4% au T1, confirme ses objectifs.

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Air France-KLM est en discussions exclusives avec Apollo Global Management en vue d'un financement en quasi fonds propres de 500 M€ pour la division d'Air France dédiés à son activité d'ingénierie et de maintenance.
  • Nexans signe un contrat de 1,7 milliard d'euros avec TenneT pour des parcs éoliens.
  • Beneteau entre en négociations exclusives avec Trigano pour la cession de son activité Habitat.
  • Mersen a levé 100 M€ à 28 EUR pièce.
  • Seb s'offre Pacojet.
  • Concert'O défend son projet alternatif et demande une assemblée générale à Orpea.
  • Lacroix se renforce dans les réseaux de chaleur.
  • Transgène change de directeur général. Alessandro Riva, actuel président du conseil d’administration, est nommé PDG avec le départ du DG Hedi Ben Brahim.
  • On va connaître la valeur de NBXTR3 : Nanobiotix négocie avec un "leader mondial de l'industrie pharmaceutique" pour le développement et la commercialisation du candidat.
  • Don't Nod sortira Harmony: The Fall of Reverie" le 8 juin.
  • Le petit coin de la dilution : Boostheat lève 0,5 M€ sur son financement en ORA avec Impact Tech Turnaround Opportunities (Alpha Blue Ocean).
  • Elles ont publié / Elles doivent publier : Akwel, Cellectis, DBV Technologies, Metabolic Explorer, LNA Santé

Dans le monde

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Adidas : les prévisions sont confirmées, après un début d'année un peu plus robuste que prévu.
  • Apple : remonte de 2,5% hors séance après des chiffres rassurants, notamment pour l'iPhone.
  • Carvana : le titre bondit de 25% après les résultats.
  • Coinbase : le titre rebondit de 9% hors séance après la publication des résultats trimestriels.
  • International Consolidated Airlines : un solide début d'année, sanctionné par un bénéfice sur un trimestre généralement déficitaire.
  • Lyft : l'action décroche de 15% hors séance après des résultats décevants.
  • Moncler : les ventes du T1 étaient en hausse de 23%.

Annonces importantes (et moins importantes)

Lectures