* Au Chili, le pape verra des victimes de la dictature Pinochet

* Des églises ont été attaquées à Santiago, la capitale chilienne

* Au Pérou, le pape pourrait condamner la violence et la corruption de la présidence Fujimori

* Il se rendra également dans la forêt amazonienne péruvienne

* Il survolera l'Argentine, son pays natal

par Philip Pullella

CITE DU VATICAN, 14 janvier (Reuters) - Le pape entame lundi une tournée d'une semaine au Chili et au Pérou dans un contexte tendu après une série d'attaques contre des églises catholiques dans la capitale chilienne et des soupçons de violences sexuelles au sein de l'église péruvienne.

Deux églises ont été attaquées vendredi matin à Santiago par des inconnus qui y ont mis le feu et laissé des tracts comportant des messages menaçant le chef de l'église catholique. Une bombe artisanale a été lancée dans l'une des deux.

Ces attaques, qui n'ont pas fait de blessés, n'ont pas été revendiquées.

Le pape doit dire une messe mardi dans un parc de Santiago. Plus de 500.000 personnes sont attendues.

Le ministre chilien de l'Intérieur Mario Fernandez a minimisé ces attaques samedi, en indiquant qu'elles étaient le fait de petits groupes ayant des capacités limitées.

A Lima, la capitale péruvienne, le feu s'est déclaré dans la nuit de vendredi à samedi au pied d'une statue de 35 mètres de haut représentant le Christ. La police a évoqué une panne électrique.

Au dernier jour de sa visite au Chili, jeudi, le pape rencontrera deux victimes de la dictature qu'a connu le Chili à l'époque d'Augusto Pinochet (1973-1990), avant de s'envoler pour le Pérou, a annoncé jeudi dernier son porte-parole, Greg Burke. La visite ne figurait pas au programme original du voyage.

Le pape rencontrera ces deux personnes après une messe à Iquique dans le nord du Chili. Quelque 3.000 personnes sont mortes ou ont disparu sous la dictature de Pinochet, et des milliers d'autres, dont la présidente sortante Michelle Bachelet ont été torturées ou dû fuir en exil. Pinochet est mort en 2006.

Le Pape s'envolera ensuite pour le Pérou, pays divisé sur le sort de l'ancien homme fort du pays, Alberto Fujimori, qui vient d'être gracié par l'actuel président, Pedro Pablo Kuczynski.

Cet ancien banquier de Wall Street a échappé de peu le mois dernier à une tentative de destitution à propos d'une affaire de corruption grâce à l'appui des partisans de Fujimori au Congrès. Il a gracié Fujimori trois jours plus tard.

L'ancien président, qui est âgé de 79 ans, a purgé moins de la moitié de la peine de 25 ans de prison à laquelle il a été condamné pour corruption et crimes contre l'humanité. Fujimori a organisé les escadrons de la mort qui ont combattu l'insurrection maoïste du Sentier lumineux sous sa présidence populiste entre 1990 et 2000.

EXPLOITATION SAUVAGE

Les opposants et de Fujimori et de Kuczynski espèrent entendre une condamnation des violations de droits de l'homme et de la corruption de la part du pape, même en termes généraux.

"Espérons que le pape fera montre de solidarité avec les victimes", a déclaré Gisela Ortiz, militante des droits de l'homme dont le frère était l'un des neuf étudiants tués dans un massacre de civils que Fujimori a été reconnu coupable d'avoir ordonné.

Rosa Rojas, qui a perdu son mari et son fils de huit ans, tués dans le cadre des combats de Fujimori contre le Sentier lumineux, souhaite elle aussi rencontrer Jorge Mario Bergoglio.

La question des droits de l'homme devrait également être évoquée lors de la visite de François à Puerto Maldonado, dans la forêt amazonienne. Le souverain pontife devrait évoquer les risques encourus par les populations locales : exploitation sauvage des mines d'or, exploitation forestière illégale et trafic de drogue.

Avant sa visite au Pérou, François a ordonné la semaine dernière la prise de contrôle d'une société catholique péruvienne, Sodalitium Christianae Vitae (SCV), fondée en 1971 pour s'opposer à la "théologie de la libération" qui met les pauvres au premier plan et dont le fondateur, Luis Figari, un laïque, doit être jugé cette année pour violences sexuelles sur mineurs.

Selon un rapport interne à SCV établi l'an dernier, Luis Figari et trois autres dirigeants ont agressé sexuellement 19 mineurs ainsi que dix adultes. La plupart des faits dont ils sont soupçonnés ont été commis entre les années 70 et 2000.

Ce voyage en Amérique du Sud sera le 22e déplacement à l'étranger de François qui a été élu pape en mars 2013 et le sixième sur le continent qui l'a vu naître.

Le pape ne s'est jamais encore rendu dans son pays natal, l'Argentine. De ce fait, les autorités chiliennes s'attendent à voir arriver plusieurs dizaines de milliers d'Argentins la semaine prochaine dans l'une des trois villes que visitera le pape : Santiago, Temuco et Iquique.

Quand le pape survolera l'Argentine en direction du Chili, il enverra un message de son avion au chef de l'Etat, a indiqué son porte-parole.

"Ce devrait être un télégramme intéressant", a indiqué Greg Burke. (Avec Antonio de la Jara à Santiago, Mitra Taj à Lima, Carline Stauffer à Buenos Aires; Danielle Rouquié pour le service français)