(Actualisé avec premières frappes britanniques, Onu et contexte § 3-9-10-22-23)

par Isabel Coles et Jonny Hogg

ERBIL, Irak/MURSITPINAR, Turquie, 30 septembre (Reuters) - L es forces kurdes, avec l'aide de miliciens sunnites, ont marqué des points mardi face aux djihadistes dans le nord de l'Irak et pris le contrôle d'un point de passage stratégique avec la Syrie, alors que la coalition conduite par les Etats-Unis poursuivait ses frappes aériennes contre l'Etat islamique (EI).

Les peshmergas, appuyés par des combattants sunnites de la puissante tribu Chammar et par des Kurdes syriens, ont occupé la ville frontalière de Rabia à l'issue d'un assaut lancé avant l'aube.

La participation de combattants de la tribu Chammar pourrait se révéler aussi importante en soi que l'avancée observée sur le terrain. En 2007-2008, le ralliement de tribus sunnites avait été un tournant dans la lutte contre Al Qaïda en Irak.

"Stratégiquement, c'est le point de passage le plus important à la frontière entre l'Irak et la Syrie. Nous pouvons couper l'approvisionnement des djihadistes et atteindre plus facilement les monts Sinjar", a déclaré un responsable politique kurde, faisant référence à la région plus au sud où des membres de la minorité yazidie sont encerclés par l'EI.

Au moins douze djihadistes ont été tués dans les combats pour Rabia, a rapporté sur Twitter Hemin Hawrami, responsable des relations extérieures du Parti démocratique du Kurdistan.

Rabia est sur la route entre la Syrie et Mossoul, la grande ville du nord de l'Irak occupée depuis juin par les islamistes.

"La ville est totalement libérée, tous les hommes de la tribu Chammar sont avec les peshmergas, la coopération est totale", a déclaré à Reuters Abdallah Yawar, l'un des chefs des Chammar.

Des Kurdes de Syrie ont également annoncé participer aux combats. "Nous défendons Rabia en coordination avec les peshmergas, face à l'Etat islamique", a reconnu Saleh Muslim, dirigeant du Parti de l'Union démocratique (PYD), principal mouvement kurde de Syrie.

Des avions de chasse de la Royal Air Force sont par ailleurs entrées en action pour la première fois depuis que le Parlement britannique a approuvé, vendredi dernier, la participation de l'armée britannique à la coalition.

Le ministre de la Défense, Michael Fallon, a précisé que deux chasseurs Tornado avaient attaqué un poste d'armements lourds de l'EI qui menaçait les forces kurdes. (voir )

VILLE KURDE TOUJOURS ASSIÉGÉE EN SYRIE

Appuyés par des raids de la coalition et de l'armée de l'air irakienne, durant la nuit et à l'aube, les peshmergas ont également repris aux djihadistes deux villages près de Dakouk, à 40 km au sud de Kirkouk, ont annoncé les autorités irakiennes.

A partir de ces villages, vidés de leurs habitants, les hommes de l'EI tiraient au mortier sur Dakouk, une ville peuplée en majorité de Turkmènes.

Les forces kurdes ont aussi progressé vers le Nord à partir de Touz Khourmatou, afin de chasser les islamistes des environs de Kirkouk, où les explosions des frappes aériennes pouvaient être clairement entendues.

Selon le secrétaire général des peshmergas, Jabbar Yawar, les forces kurdes ont maintenant repris environ la moitié du territoire qui avait dû être abandonné aux djihadistes début août.

"Nous avons réussi à encaisser le choc et maintenant nous sommes en train de les repousser", a-t-il dit.

Des attaques aériennes ont aussi visé des positions islamistes à l'ouest de Bagdad et dans les faubourgs sud de la capitale irakienne.

Les raids ont fait des dizaines de morts parmi les djihadistes lundi au sud de Bagdad, selon des responsables irakiens. "Il semble que 67 militants de l'EI aient été tués à Fadiliya", ont-ils précisé.

En Syrie, l'EI fait toujours le siège de la ville kurde de Kobani (Aïn al Arab), sur la frontière turque, autour de laquelle fusillades et tirs d'artillerie se poursuivaient mardi.

Des combattants kurdes venus de Turquie continuent de repasser la frontière pour aller prêter main forte aux défenseurs de Kobani.

Öcalan Iso, numéro deux des forces kurdes à Kobani, a déclaré que ses hommes avaient affronté durant la nuit et mardi matin les djihadistes qui étaient appuyés par des chars de combat.

Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), des frappes aériennes ont visé des positions de l'EI à l'ouest de Kobani.

Plus de 160.000 personnes ont fui le secteur depuis une dizaine de jours pour se réfugier en Turquie. Des dizaines de milliers d'autres pourraient les imiter, a prévenu Valerie Amos, secrétaire générale adjoint de l'Onu chargée des Affaires humanitaires, qui s'exprimait mardi devant le Conseil de sécurité.

"Leur peur était si forte que nombre d'entre eux ont traversé des champs de mines pour trouver un refuge. Il est possible que des dizaines de milliers de personnes supplémentaires soient contraintes de quitter la Syrie si les forces de l'EI continuent de gagner du terrain", a-t-elle dit. (avec Yara Bayoumy, Raheem Salman et Ned Parker à Bagdad, Oliver Holmes à Beyrouth et Michelle Nichols à New York; Guy Kerivel pour le service français)