Washington (awp/afp) - Une baisse des prix de l'énergie aux Etats-Unis a masqué en juillet des tensions inflationnistes sous-jacentes qui devraient conforter la Réserve fédérale (Fed) dans sa volonté affichée de continuer à relever ses taux d'intérêt.

Si sur un an, les prix à la consommation sont restés stables à 2,9%, au plus haut depuis six ans, selon l'indice CPI publié vendredi par le département du Travail, l'inflation de base (sans compter les prix volatiles de l'alimentation et de l'énergie), a atteint, à 2,4% en glissement annuel, un sommet en dix ans.

Sur le mois, les prix ont modestement augmenté de 0,2% comme s'y attendaient les analystes, les prix de l'énergie ayant reculé de 0,5%.

Cette accélération de l'inflation dite sous-jacente est à marquer d'une pierre blanche puisque qu'elle n'a pas atteint ce rythme depuis septembre 2008, lorsque le pays était en pleine récession.

Les économistes ont tendance à donner plus d'importance à l'inflation de base, hors énergie et alimentation, car elle reflète mieux la tendance de fond de l'évolution du coût de la vie.

"Son accélération à 2,4% sera suffisante pour convaincre la Fed de relever ses taux d'intérêt en septembre", a assuré Michael Pearce, économiste en chef pour Capital Economics.

La banque centrale est en effet vigilante sur l'inflation qui, quand elle accélère trop, peut faire dérailler l'économie et faire bondir brusquement les taux d'intérêt. Elle surveille aussi les effets dopants sur la croissance de l'important stimulus fiscal adopté par l'administration Trump qui a poussé l'expansion de la première économie mondiale à 4,1% en rythme annuel au 2e trimestre.

En revanche, pour l'instant l'évolution des salaires est atone, le salaire horaire moyen n'ayant pas bougé en juillet.

Machines à laver importées

La guerre commerciale entamée par l'administration Trump avec de multiples partenaires dont la Chine a aussi le potentiel à la fois d'enflammer le coût des marchandises importées si les taxes sont répercutées sur les consommateurs mais aussi de renforcer le dollar, ce qui peut rendre les achats américains de certains produits étrangers moins onéreux comme l'habillement.

Dans les statistiques du département du Travail vendredi, certains produits montraient une hausse notable, peut-être liée au bras de fer commercial.

Ainsi le coût des gros appareils ménagers comme les machines à laver a bondi de 3,5% en juillet sur un mois.

Au début de l'année, la Maison Blanche a en effet imposé des droits de douane de 20% à 50% sur des grandes machines à laver fabriquées en Chine, en Corée du sud, au Mexique et au Vietnam et les fabricants avaient prévenu que cette hausse des tarifs douaniers serait répercutée sur les prix au détail.

Mais globalement la hausse des prix en juillet a été tirée par celle des prix intérieurs, notamment ceux des logements et des loyers (+3,5%) qui ont compté pour 60% dans la progression de l'indice CPI, a précisé le ministère. Les coûts des transports et des services médicaux ont affiché aussi des hausses notables (+4% et +2,3% respectivement).

La Fed qui a déjà relevé les taux d'intérêt par deux fois d'un quart de point de pourcentage cette année, prévoit d'effectuer deux autres tours de vis de cette ampleur d'ici la fin de l'année et l'évolution de l'inflation devrait la conforter dans cette stratégie. Cela porterait les taux de l'argent au jour le jour que les banques se facturent entre elles à près de 2,5% d'ici la fin de l'année.

Pour évaluer l'inflation, la banque centrale préfère néanmoins s'appuyer sur l'indice des prix basé sur les dépenses de consommation (PCE), généralement plus bas que le CPI et dont la hausse sur un an s'est établie en juin à 2,2% et à 1,9% seulement, hors prix alimentaires et énergétiques.

Mais selon Capital Economics, cette inflation de base mesurée par l'indice PCE devrait s'élever à 2,3% d'ici la fin de l'année, bien au-dessus de la cible de 2% de la Fed.

Cela a fait dire vendredi à un membre de la banque centrale, Charles Evans, de l'antenne régionale de la Fed de Chicago --pourtant réputé être du côté des "colombes", peu pressé de relever les taux--, que la Fed aura peut-être besoin d'une politique monétaire "quelque peu restrictive en 2020".

afp/rp