Depuis l'arrivée de Shinzo Abe au pouvoir au Japon, Kepler Cheuvreux - Investment Solutions affiche sa réserve concernant les effets bénéfiques attendus de la seule politique monétaire de la Banque Centrale du Japon et les chiffres du PIB pour le quatrième trimestre publiés récemment très au-dessous des attentes le confortent dans sa position. Bien sûr, l'exemple vertueux des Etats-Unis permet à la Banque Centrale du Japon de justifier la mise en place d'un Quantitative Easing.

Mais d'une part, il est difficile d'isoler les effets de la politique monétaire dans le redémarrage américain, et d'autre part, la transmission de la politique monétaire dans la plupart des pays, Japon en tête, est bien moins efficace qu'aux Etats-Unis où la part de la consommation dans le PIB est très élevée, et où « l'effet richesse » (propension des ménages à consommer au regard du niveau de leur patrimoine) fonctionne bien et qui bénéficient du fait que le prix de matières premières soit libellé en dollars, explique Jean-Gabriel Attali, stratégiste Cross Asset.

Pour ce dernier, si la Banque Centrale Européenne met aujourd'hui en place un Quantitative Easing, ce n'est pas réellement par conviction mais après avoir subi la pression des investisseurs. Il suffit d'ailleurs de se reporter aux déclarations de Mario Draghi à l'automne pour mesurer à quel point il croit peu aux effets de cette action sur l'économie européenne qui ne remplace en rien l'action des gouvernements. Mais en Europe, la Banque Centrale peut au moins permettre aux pays de gagner du temps en espérant que le redémarrage vienne d'ailleurs, et des Etats-Unis en particulier.

En revanche poursuit Kepler Cheuvreux - Investment Solution, le très faible taux d'ouverture de l'économie japonaise rend peu probable une relance venue de l'extérieur, sinon pourquoi le pays serait-il en déflation depuis 20 ans ? Pourtant le Japon continue d'accentuer son Quantitative Easing tout en différant certaines réformes structurelles (la fameuse troisième flèche des Abenomics). Or, non seulement les actions monétaires n'ont que très peu d'effets sur la consommation japonaise qui reste atone, mais la dépréciation du yen bénéficie finalement assez peu à l'économie tout en dégradant fortement la balance commerciale.

Les réformes sont évidemment nécessaires dans de nombreux pays, mais au Japon, cette question est désormais vitale. En revanche, il ne faudra pas compter sur Haruhiko Kuroda, entièrement dévoué à Shinzo Abe, pour porter ce message, conclut Jean-Gabriel Attali.