par Harry Suhartono et Gus Trompiz

Olam a confirmé vendredi qu'il négociait avec Louis Dreyfus en vue d'une possible coopération, ajoutant qu'une fusion était une des options. La nouvelle a fait grimper l'action Olam de 9,2% à un pic de trois ans.

Louis Dreyfus, dont la branche matières premières dégage un chiffre d'affaires de quelque 35 milliards de dollars, est l'un des leaders mondiaux du négoce international de matières premières avec Archer Daniels Midland, Bunge et Cargill.

"S'il y a une fusion, ils pourraient tirer parti d'économies d'échelle et d'implantations géographiques. Olam est fort en Afrique et Dreyfus est fort aux Etats-Unis", explique Ben Santoso, analyste de DBS Vickers.

"Si ces deux fusionnaient, ils pourraient tenir la dragée haute aux concurrents plus gros tels que Cargill, Bunge ou Archer Daniels Midland".

Ces discussions entre les deux maisons de négoce témoignent d'une consolidation du secteur dont les acteurs veulent tirer parti d'une demande en pleine expansion du fait de la démographie mondiale et d'économies émergentes en forte croissance.

Elles sont peut-être aussi symptomatiques d'une tendance pour les sociétés de négoce à développer un modèle industriel qui embrasse l'achat, le conditionnement et la distribution, dit l'analyste James Dunsterville.

"Bon nombre des négociations de matières premières historiques ne sont plus techniquement des négociants mais des industriels", explique-t-il. "Je pense que Louis Dreyfus est en partie industriel et veut peut-être le devenir plus encore."

UNE IPO ÉVOQUÉE

Louis Dreyfus est le premier négociant mondial de riz et de coton et figure parmi les trois premiers mondiaux pour le jus d'orange, le blé, le maïs et le sucre.

Jeudi, le quotidien Les Echos écrivait qu'une fusion avec Olam était considérée par Louis Dreyfus comme une voie de croissance.

Tout comme Le Figaro la veille, Les Echos écrivaient que Louis Dreyfus envisageait une introduction en Bourse de certaines de ses activités, ce qui trancherait avec la tradition de discrétion de cette entreprise familiale.

"S'ils faisaient une IPO, ça susciterait un intérêt énorme", a estimé Pierre Tegner, analyste spécialisé chez Oddo Securities, en commentant l'idée d'une telle introduction en Bourse. "Les gens n'auraient pas de mal à faire le placement."

Pour l'ensemble des investisseurs agroalimentaires, une IPO serait "quelque chose de très intéressant", a-t-il ajouté, expliquant que cela pourrait permettre de faire un arbitrage entre une société centrée sur les matières premières d'une part, et d'autre part les sociétés de produits de grande consommation.

Les articles de la presse française faisaient référence à des problèmes de succession pour expliquer l'ouverture de l'actionnariat de Louis Dreyfus, un avis que les analystes partagent.

L'ex-directeur général Robert Louis-Dreyfus est décédé en juillet 2009 et sa participation majoritaire dans le groupe a été confiée à un trust, le solde du capital étant détenu par d'autres membres de la famille.

Des banquiers familiers des coulisses d'Olam estiment que ce dernier et Louis Dreyfus discuteront sans doute d'une coentreprise dans les segments où ils se chevauchent.

DOUTE SUR UNE FUSION

Andreas Bokkenheuser, analyste d'UBS, est sceptique quant aux avantages d'une fusion pour Olam, dont la holding singapourienne Temasek détient environ 24% du capital.

"Olam a déjà la part de marché la plus grande sur plusieurs de ses gammes de produits et nous nous demandons donc si une fusion se traduirait par un avantage en termes de fixation des prix et de synergies dans la chaîne de distribution", dit-il.

Olam, qui a réalisé un chiffre d'affaires de 10,5 milliards de dollars de Singapour (5,9 milliards d'euros) durant son exercice 2009-2010, a dit que les discussions n'en étaient qu'aux préliminaires.

"Le groupe souhaite informer ses actionnaires qu'il a engagé des discussions confidentielles et préliminaires avec Louis Dreyfus Commodities au sujet d'une possible collaboration qui pourrait prendre la forme d'une fusion, entre autres hypothèses", explique-t-il dans un communiqué diffusé vendredi.

Olam est aussi présent dans le caoutchouc et l'huile de palme et pourrait poursuivre son développement dans le sucre de cannes en Indonésie et accroître encore ses avoirs dans les plantations d'huile de palme en Afrique.

Son président Sunny Verghese, d'origine indienne, a annoncé en 2009 un plan triennal visant à doubler la marge bénéficiaire nette à plus de 4% et à tripler, voire quadrupler la valeur intrinsèque de l'entreprise.

Wilfrid Exbrayat pour le service français, édité par Dominique Rodriguez