* Le président assure les maires de son "profond respect"

* Vaste réforme de la fiscalité locale en 2020

* LR déplore les "belles paroles" du chef de l'Etat (Actualisé avec communiqué des Républicains)

PARIS, 23 novembre (Reuters) - Emmanuel Macron a scellé jeudi le sort de la taxe d'habitation en annonçant l'entrée en vigueur d'une vaste réforme de la fiscalité locale en 2020 et s'est engagé devant les maires de France à donner plus d'autonomie aux territoires.

Reçu dans un climat tendu par ses exigences de maîtrise des dépenses des collectivités, le chef de l'Etat a reconnu un manque de dialogue lors des coupes budgétaires de l'été et l'imperfection des projets gouvernementaux sur le logement.

Il a fait l'éloge des maires, disant son "profond respect" pour ces "engagés". "Nous avons le devoir de réussir ensemble pour la France", a-t-il dit, lançant : "j’ai besoin de vous !"

Sifflé lorsqu'il a confirmé l'exonération en trois ans de la taxe d'habitation pour 80% des ménages, Emmanuel Macron a dit qu'elle ne devait être qu'un avant-goût de sa suppression et d'une refonte de la fiscalité locale à l'horizon 2020.

"Si cet impôt est mauvais pour 80% des Français, il y a peu de chance qu’il soit bon pour les 20% restant", a-t-il dit.

"Je veux une réforme ambitieuse, cohérente, dont la taxe d’habitation n'est que le premier acte", pour créer une fiscalité locale reflétant les missions exercées par chacune des collectivités - régions, départements, communes.

Il a cité à cet égard le point de TVA désormais affecté aux régions, qui ont le développement économique pour compétence, en souhaitant qu'on aille "plus loin".

DÉSENDETTEMENT

Des solutions comme le fléchage d'une partie de la CSG ou de la CRDS vers les départements et d'une partie de l'impôt sur le revenu vers les communes sont par exemple examinées.

Comme le Premier ministre mardi, il a souligné que l'immense majorité des communes ne serait pas concernée par les contrats de performance financière que l'Etat veut passer avec les plus grandes collectivités - régions, départements, communauté d'agglomération et communes.

Edouard Philippe avait expliqué que seules 319 à 600 collectivités seraient soumises à ce système, tout en prévenant que si l'objectif global de maîtrise des dépenses locales était dépassé le gouvernement pourrait réduire les dotations en 2020 comme l'avaient fait ses prédécesseurs.

L'exécutif veut limiter le rythme de progression annuel des dépenses à 1,2%, ce qui correspond selon lui à une économie de 13 milliards d'euros sur le quinquennat par rapport à la progression tendancielle des dépenses de fonctionnement locales.

Emmanuel Macron a souligné que la seconde contrainte financière envisagée, celle d'un objectif de désendettement pour les collectivités, serait adaptée aux spécificités de chacune d'entre elles et qu'elle serait discutée lors de la prochaine rencontre de la "conférence des territoires" en décembre.

"Est-ce que nous sommes pleinement satisfaits ? Non", a résumé sur Public Sénat le président de l'Association des maires de France, François Baroin, après le discours du président.

"RENDEZ-VOUS MANQUÉ"

Le dirigeant Les Républicains a cependant salué "le sens du dialogue sur la base de deux chantiers très importants : l'un sur la fiscalité locale, l'autre sur la révision constitutionnelle".

Emmanuel Macron a en effet promis aux collectivités une plus grande autonomie.

La réforme constitutionnelle qu'il appelle de ses voeux réécrira l'article 72 pour permettre aux collectivités de pérenniser des expérimentations sans qu'elles soient nécessairement généralisées à l'ensemble de la France.

Des compétences pourront être transférées entre échelons territoriaux, a-t-il dit, en citant les transports, voire de l'Etat aux collectivités.

"C’est la reconnaissance institutionnelle attendue depuis longtemps, nécessaire, validée par l’expérience, que la vérité se trouve plus près du terrain et non dans les rouages des administrations centrales, quels que soient leurs talents."

Il a promis de mener une réforme complexe pour donner plus d'autonomie de gestion, posant la question de la dissociation des évolutions du point d'indice servant de base à la rémunération des fonctionnaires entre les trois fonctions publiques ou celle de l'élargissement des possibilités de recrutement hors statut.

Mais pour les Républicains (LR), "les belles paroles" du président "n'effacent pas les actes de son gouvernement et la colère légitime des élus locaux qui subissent, sans concertation, des mesures injustes qui les privent de leur autonomie fiscale et de leur liberté d'administration".

Dans un communiqué, les députés LR Guillaume Peltier et Damien Abad, disent avoir déposé une proposition de loi visant à instaurer un véritable "dialogue territorial", au même titre qu'il existe un "dialogue social".

Le maire socialiste de Dijon, François Rebsamen, a déploré pour sa part dans un communiqué "un rendez-vous manqué pour apaiser les inquiétudes des maires sur l’asphyxie financière des communes (...), un rendez-vous manqué pour renoncer aux mesures qui menacent l’avenir du logement social." (Jean-Baptiste Vey, avec Elizabeth Pineau, édité par Yves Clarisse)