Le candidat d'En Marche ! au second tour de la présidentielle a en réaction décidé de se rendre lui aussi sur le site, où il a reçu un accueil compliqué contrastant avec celui réservé à la dirigeante du Front national, qui a promis qu'avec elle l'usine ne fermerait pas.

Emmanuel Macron, qui avait auparavant qualifié "d'utilisation politique" la venue de Marine Le Pen, a affronté longuement les sifflets et les cris "Marine présidente" avant de parvenir à engager le dialogue pendant une heure et demie avec des salariés lui reprochant de ne pas être venu plus tôt.

"Je ne suis pas en train de vous dire que je suis en train de sauver vos emplois. Parce que personne ne peut le faire dignement", a-t-il dit au milieu d'un groupe de salariés.

"On doit se battre pour qu'il y ait un repreneur", a-t-il ajouté en refusant la fermeture des frontières prônée par Marine Le Pen et qui, selon lui, précipiterait la faillite de nombreuses autres entreprises de la région.

"Il n'y aura pas d'homologation du plan social s'il n'est pas la hauteur", a-t-il toutefois dit en expliquant qu'il y aurait des "conséquences" pour Whirlpool.

Le favori des sondages est reparti en serrant des mains après avoir promis de revenir à Whirlpool pour "rendre compte".

Face aux critiques sur son manque d'implication dans le dossier, l'ancien ministre de l'Economie avait expliqué le 6 avril sur France 2 qu'il ne "monterait pas sur un camion et dire avec moi ça ne fermera pas" en critiquant l'attitude de François Hollande annonçant en 2012 que Florange ne fermerait pas.

"JE SUIS A MA PLACE", DIT LE PEN

Alors que le candidat d'En marche ! a tardé à lancer sa campagne d'entre-deux tours et s'est vu reprocher son attitude triomphaliste dimanche soir à l'issue de sa qualification pour le second tour, pour lequel il part favori, Marine Le Pen a décidé d'occuper le terrain pour tenter de refaire son retard.

La dirigeante du FN a été accueillie sur le parking de l'usine Whirlpool par des applaudissements et aux cris de "Marine ! Marine !" et a pris un bain de foule avec des salariés mêlés à des militants du parti d'extrême droite

"Je suis à ma place, exactement là où je dois être, au milieu des salariés de Whirlpool, au milieu de ces salariés qui résistent à cette mondialisation sauvage", a-t-elle déclaré.

Visant Emmanuel Macron, réuni avec l'intersyndicale dans les locaux de la Chambre de commerce et d'industrie, elle a ajouté: "Je suis pas en train de manger des petits fours avec quelques représentants qui ne représentent qu'eux-mêmes".

"Quand j'ai appris qu'Emmanuel Macron n'entendait pas rencontrer les salariés, qu'il n'entendait pas venir sur ce piquet de grève, mais qu'il allait à l'abri dans je ne sais quelle salle de la chambre commerce pour rencontrer deux ou trois personnes triées sur le volet, eh bien ! j'ai trouvé que c'était une preuve de mépris à l'égard de ce que vivent les salariés de Whirlpool", a-t-elle expliqué.

UTILISATION POLITIQUE

Enchaînant les selfies et les poignées de main avec les salariés présents, Marine Le Pen est repartie au bout d'une vingtaine de minutes après avoir imposé son tempo.

"Madame Le Pen est donc venue à Amiens parce que j'y venais. Bienvenue à elle", avait dit Emmanuel Macron à la presse à l'issue de sa rencontre avec l'intersyndicale.

"Mme Le Pen n'a pas compris comment fonctionnait le pays, nous n'avons pas les mêmes ambitions ni les mêmes projets", a-t-il ajouté. "Mme Le Pen fait de l'utilisation politique."

Depuis lundi, une partie des salariés de Whirlpool font grève et bloquent l'entrée poids lourds du site en réclamant à la direction un "dialogue constructif".

Le groupe américain Whirlpool, numéro un mondial de l'électroménager, leur a annoncé en janvier qu'il fermerait en juin 2018 cette unité de production, la dernière usine du groupe en France, pour la délocaliser à Lodz, en Pologne.

Les salariés appellent à l'aide les politiques depuis trois mois et Emmanuel Macron, originaire d'Amiens, avait promis qu'il leur rendrait visite "entre les deux tours".

"Je ne me résous pas à l’idée que l’on délocalise ce site, donc on doit trouver un repreneur", a-t-il affirmé. "Si Whirlpool ne se comporte pas bien dans le traitement de ce dossier, il y aura des conséquences".

Les syndicats jugent que les négociations entamée sur le plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) n'ont pas permis d'avancer. Quinze repreneurs potentiels se sont manifestés.

(Simon Carraud et Gérard Bon, avec Pascal Rossignol à Amiens, édité par Yves Clarisse)