(Actualisé avec précisions, contexte)

KANO, Nigeria, 28 novembre (Reuters) - Au moins 81 personnes ont trouvé la mort vendredi dans l'attaque de la mosquée centrale de Kano, la plus grande ville du nord du Nigeria.

L'attentat n'a pas été revendiqué mais porte la marque de Boko Haram.

Trois bombes ont explosé devant l'édifice, alors que la foule se rassemblait dans la cour du bâtiment pour les prières de l'après-midi. Des hommes armés ont ensuite ouvert le feu sur les fidèles, selon des témoins.

La mosquée jouxte le palais de l'émir de Kano, Lamido Sanusi, ancien gouverneur de la Banque centrale et deuxième plus haute autorité islamique du pays, qui ne s'y trouvait pas au moment des faits.

"Après de multiples explosions, ils ont aussi ouvert le feu. Je ne peux pas dire combien il y a de victimes parce que nous nous sommes tous enfuis", a déclaré un membre de ses services.

L'attentat n'a pas été revendiqué, mais tout porte à croire qu'il a été commis par les islamistes de Boko Haram. Le mouvement, responsable de plusieurs milliers de morts, s'en prend d'ordinaire aux églises, aux écoles ou aux commissariats, mais aussi aux mosquées qui ne partagent pas sa lecture rigoriste de l'islam.

Après l'attaque, des jeunes en colère ont bloqué les portes de la mosquée. La police a dû se frayer un chemin en utilisant des gaz lacrymogènes.

Reuters s'est rendu dans deux morgues, l'une ayant reçu 20 corps et l'autre 61, selon un responsable médical, Muhammad Ali. Les cadavres portaient des blessures liées à des balles et à des explosifs, a indiqué ce responsable.

Le président nigérian Goodluck Jonathan a publié un communiqué, promettant de faire juger les coupables.

La vieille mosquée et le palais remontent aux siècles où Kano était l'un des empires islamiques prospérant du commerce de l'or, de l'ivoire et des épices sur la route des caravanes reliant l'intérieur de l'Afrique à la côte méditerranéenne.

Boko Haram a dit vouloir recréer ces jours de gloire de l'islam saharien.

Au Nigeria, les dirigeants musulmans n'osent parfois pas critiquer ouvertement Boko Haram de peur des représailles, à la différence de l'émir de Kano, qui a fait part de sa colère après l'enlèvement de 200 lycéennes dans le village de Chibok en avril dernier.

Selon la presse locale, il a appelé les Nigérians ce mois-ci à se défendre contre Boko Haram.

"Ces gens, quand ils attaquent des villes, ils tuent les garçons et réduisent les filles en esclavage. Les gens doivent se montrer résolus (...). Il faut qu'ils achètent ce qu'ils peuvent pour se défendre. Les gens ne doivent pas attendre que les militaires les protégent", a déclaré Lamido Sanusi lors d'une récitation du Coran, selon la presse.

L'insurrection menée par Boko Haram a contraint plus d'un million de personnes à fuir, a annoncé la Croix-Rouge vendredi. En septembre, l'estimation était de 700.000.

Le président Goodluck Jonathan a demandé au parlement de voter une prolongation de l'état d'urgence dans le nord-est du pays. (Nnekule Ikemfuna, Jean-Philippe Lefief et Danielle Rouquié pour le service français)