(Actualisé avec communiqué de la famille de Rémi Fraisse))

TOULOUSE, 9 janvier (Reuters) - Des juges d'instruction de Toulouse ont rendu un non-lieu dans l'enquête sur la mort de Rémi Fraisse, jeune militant écologiste tué le 26 octobre 2014 sur le site du barrage de Sivens (Tarn), dont la famille a décidé de faire appel.

L’instruction, concernant la mort de ce jeune homme de 21 ans des suites de l’explosion d’une grenade tirée par un gendarme mobile lors d'affrontements sur ce chantier controversé, s’est achevée en janvier 2017.

Les juges ont suivi les réquisitions du procureur de Toulouse qui avait demandé en juin 2017 un non-lieu.

"C'est une déception mais l'on s'y attendait. Les juges ont refusé de faire les actes nécessaires à la manifestation de la vérité et notamment la moindre reconstitution, comme c'est l'usage quand il y a mort d'homme", a déclaré à Reuters Arié Alimi, l'un des avocats de la famille de Rémi Fraisse.

"Nous allons enfin pouvoir plaider devant la chambre de l'instruction" de la cour d'appel, a ajouté l'avocat, selon qui, dans cette affaire, "l'institution judiciaire se protège".

Un peu plus tard, la famille du jeune homme a déploré dans un communiqué que soit ainsi donné un "permis de tuer".

"Comment le 'maintien de l'ordre' peut-il tuer quelqu'un sans qu'aucune faute n'ait été commise ?" demande-t-elle.

"Donner l'ordre de jeter des grenades sur des manifestants ne peut pas être considéré comme légal et la mort d'un jeune pacifiste (...) comme un accident. Cela revient à donner un permis de tuer aux forces de l'ordre", ajoute-t-elle.

La famille de Rémi Fraisse dit ne pas vouloir "poursuivre à tout prix un gendarme plutôt qu'un autre" mais mettre en lumière "les dysfonctionnements d'un système". Elle se dit prête à aller jusque devant la Cour européenne des droits de l'Homme et à demander que la responsabilité de l'Etat soit engagée.

De son côté, l'avocat du gendarme auteur du tir a estimé que le non-lieu était "la suite logique d'une instruction colossale par son sérieux et sa précision, avec plus d'une centaine de personnes entendues parmi les gendarmes et les zadistes".

"La conclusion est celle d'un épouvantable accident et non un acte volontaire d'agression ou une faute de la part des gendarmes", a ajouté Me Jean Tamalet.

La mort de Rémi Fraisse avait provoqué un vif émoi et la suspension du chantier de retenue d'eau, puis son abandon le 6 mars 2015 par le conseil départemental du Tarn. Le même jour, le site de Sivens, occupé depuis plus d’un an par de nombreux zadistes opposés à la construction du barrage, avait été évacué.

Un nouveau projet portant sur une retenue réduite de moitié est envisagé par les pouvoirs publics et demandé par des agriculteurs pour pallier le manque de ressources en eau. (Johanna Decorse, avec Emmanuel Jarry, édité par Sophie Louet)