(Actualisé avec nouveau bilan §1-2)

par Richard Valdmanis et Julie Gordon

LAC-MEGANTIC, Québec, 11 juillet (Reuters) - La police canadienne a entamé son enquête après l'explosion d'un train transportant du pétrole brut qui pourrait avoir fait une cinquantaine de morts samedi à Lac-Mégantic, où 200 enquêteurs ont été déployés.

Les secours ont retrouvé 20 corps, mais 30 personnes sont encore portées disparues et il n'y a aucun espoir de les retrouver vivantes.

Le président de la compagnie Montreal, Maine & Atlantic (MMA), à qui appartient le train à l'origine de la catastrophe, a déclaré mercredi que l'accident pourrait être dû à une erreur de manipulation des freins de la part du chef de train.

"On peut sérieusement mettre en doute le fait que les freins à main aient été enclenchés correctement sur ce train. D'ailleurs, je dirais qu'ils ne l'ont pas été, ou nous n'aurions pas eu cet accident", a déclaré Edward Burkhardt lors d'une conférence de presse dans la petite ville, souvent interrompue par des habitants en colère.

"Il semble que les freins à main adéquats n'aient pas été enclenchés sur ce train, ce qui était de la responsabilité du chef de train", a-t-il ajouté, précisant que ce dernier avait été suspendu sans rémunération.

Les freins à main permettent de maintenir un train à l'arrêt en cas de défaillance des freins pneumatiques.

L'hypothèse d'une erreur de manipulation des freins du train a été avancée, mais les enquêteurs n'ont pas pu vérifier pour le moment si suffisamment de freins avaient été enclenchés, faute d'avoir eu accès à la zone la plus sinistrée.

L'agence de régulation des transports canadiens a souligné de son côté qu'il était inhabituel qu'un convoi soit abandonné par son conducteur sur une voie principale, ajoutant qu'elle voulait savoir si les procédures de sécurité avaient bien été respectées.

FUITE DE PRESSION

Les responsables de la compagnie MMA avaient indiqué auparavant que les freins pneumatiques n'avaient pas fonctionné après l'intervention des pompiers, appelés le soir même pour éteindre un feu qui s'était déclaré sur le moteur de l'une des cinq locomotives du convoi.

Les pompiers avaient coupé ce moteur qui alimentait en électricité les freins pneumatiques du train, et la pression avait ensuite commencé peu à peu "à fuir" rendant les freins inopérants et entraînant la mise en mouvement du convoi de 72 wagons dans la pente.

Selon l'inspecteur Michel Forget, les forces de l'ordre excluent d'ores et déjà qu'un acte terroriste soit à l'origine du déraillement du train.

"Je ne ferai pas de commentaire sur les indices que nous avons trouvés parque c'est confidentiel", a-t-il déclaré à la presse, tout en indiquant que certains d'entre eux pouvaient laisser penser à des "actes criminels".

"La négligence est une des pistes que nous allons étudier", a-t-il ajouté. "Nous ne pensons pas que le terrorisme ait quelque chose à voir avec cela."

Les enquêteurs vont également se pencher sur la solidité des wagons-citernes qui ont explosé après le déraillement du train, et vérifier si les procédures de sécurité avaient bien été appliquées lorsque le convoi a été mis à l'arrêt à Nantes, à 12 km de Lac-Mégantic, d'où il a entamé sa course folle.

Plus de 2.000 habitants de Lac-Mégantic ont été évacués après la catastrophe. Seule environ la moitié d'entre eux ont été autorisés à rentrer chez eux, une partie du périmètre de sécurité étant encore jugé trop dangereux. (Capucine Fachot, Pierre Sérisier, Hélène Duvigneau et Tangi Salaün pour le service français)