(Répétition sans changement d'une dépêche diffusée vendredi)

* La BCE garderait un ton accommodant lors de sa réunion jeudi

* Elle pourrait dire un mot de la vigueur de l'euro

* La BoJ également à l'agenda

* Le marché obligataire sous tension

* Les chiffres du PIB au Royaume-Uni et aux USA à surveiller

par Patrick Vignal

PARIS, 22 janvier (Reuters) - Les investisseurs attendent avec une certaine inquiétude la première réunion monétaire de l'année de la Banque centrale européenne (BCE), qui devrait pourtant annoncer jeudi qu'elle continue à faire bénéficier les marchés de la zone euro de ses largesses.

La publication, le 11 janvier, du compte-rendu de la réunion de décembre a nourri la nervosité croissante des marchés. On y lisait que l'institution de Francfort pourrait faire évoluer sa communication en ce début d'année et ajuster progressivement son discours pour refléter une amélioration des perspectives économiques.

Ces "minutes", interprétées par certains comme la menace d'un resserrement plus rapide que prévu, ont fait grimper les rendements des emprunts d'Etat de la zone euro et conduit certains investisseurs à anticiper un relèvement des taux d'ici à la fin de l'année.

La séquence de normalisation de politique monétaire envisagée jusqu'à présent par la banque centrale est qu'elle poursuivra ses rachats d'actifs au moins jusqu'en septembre et qu'elle procèdera seulement bien après à une hausse des taux d'intérêt.

Si ce scénario pourrait être légèrement infléchi, il ne devrait pas, à en croire l'influent président de la Bundesbank, Jens Weidmann, être profondément modifié.

La prévision des analystes, qui tablent sur une hausse des taux d'intérêt mi-2019, est "en gros conforme" aux anticipations de l'institut d'émission, a-t-il dit dans un entretien accordé à la Frankfurter Allgemeine Zeitung.

"Il n'y aura pas, pour nous, de hausse de taux en 2018 de la part de la BCE", déclare pour sa part Nicolas Forest, directeur de la gestion obligataire de Candriam. "Ils ne peuvent pas à la fois préparer la fin de la politique de rachats d'actifs et procéder à une hausse de taux. Ce serait mettre la charrue avant les boeufs."

La communication des banques centrales est l'un des éléments à surveiller en priorité sur les marchés dans un contexte de croissance soutenue justifiant une normalisation monétaire.

Pour les stratèges de Bank of America-Merrill Lynch, la conférence de presse, jeudi, du président de la BCE Mario Draghi s'annonce "épineuse".

"Pour contenir les mouvements de marchés, nous nous attendons à ce qu'il mette l'accent sur deux messages : premièrement, la séquence est un élément clé du pilotage des anticipations ('forward guidance') et est intangible. Deuxièmement, tout changement de communication sera graduel".

L'EURO SOUS SURVEILLANCE

L'une des raisons incitant la BCE à la prudence est l'inflation dans la zone euro qui tarde à se réveiller. Elle vient ainsi d'être confirmée à 1,4% sur un an en décembre, contre 1,5% le mois précédent, soit bien loin de l'objectif de la BCE d'une inflation très légèrement inférieure à 2%.

Autre frein à l'appétit de resserrement de la BCE, la vigueur de l'euro, qui a pris 14% face au dollar l'an dernier et encore plus 2% depuis le début de l'année, franchissant brièvement mercredi la barre de 1,23 dollar.

De nombreux intervenants de marché estiment la juste valeur de l'euro autour 1,25 dollar, ce qui lui laisse une marge de progression limitée.

Si la BCE ne se fixe pas d'objectifs en termes de taux de change, elle suit attentivement leur évolution et la récente appréciation de l'euro face au dollar "n'aide pas", a reconnu Ewald Nowotny, membre du conseil des gouverneurs de l'institution, laissant entendre que ce facteur devrait être évoqué lors de la réunion de jeudi.

Autre événement de la semaine sur le front des banques centrales, la réunion monétaire de la Banque du Japon, qui s'achèvera mardi et ne devrait pas déboucher sur des annonces spectaculaires, même si la BoJ vient d'alimenter les rumeurs sur une possible diminution de son soutien monétaire en annonçant une réduction du montant de ses rachats d'obligations d'Etat japonaises de longue échéance.

Si la BCE ne devrait pas publier jeudi de prévisions économiques, le Fonds monétaire international (FMI) livrera les siennes lundi à Davos, où s'ouvrira le lendemain le Forum économique mondial, rendez-vous annuel très suivi par les marchés.

Le thème de l'édition de cette année à Davos concerne les fractures politiques, économiques et sociales, auxquelles les participants seront invités à proposer des remèdes.

Le FMI devrait souligner dans la station suisse la vigueur de la croissance de l'économie mondiale, synchronisée comme jamais, tout en pointant les nuages qui pourraient bientôt assombrir l'horizon.

TENSIONS SUR L'OBLIGATAIRE

En attendant, les marchés actions continuent de prospérer malgré des valorisations tendues et la saison de résultats trimestriels qui bat son plein montre que les bénéfices des entreprises gonflent encore.

Les Bourses en Europe ont bien un peu reculé ces derniers jours sur des prises de bénéfices mais elles restent largement dans le vert depuis le début de l'année.

A Wall Street, le Dow Jones a passé le seuil des 26.000 points pour la première fois avant de marquer lui aussi une pause, en raison notamment des incertitudes sur le financement du gouvernement fédéral des Etats-Unis.

Les résultats d'entreprises vont pleuvoir dans les prochains jours avec notamment une grosse journée mercredi à Wall Street avec les publications de General Electric, United Technologies, Ford et Whirlpool.

Le climat est moins euphorique sur le marché obligataire, qui s'apprête à quitter un environnement de taux bas et de politique accommodante de la part des grandes banques centrales. La plupart des observateur prédisent une correction cette année sur cette classe d'actifs mais pas d'effondrement.

Principal risque pour ce marché, une reprise brutale de l'inflation, qui pourrait finir par décoller, notamment aux Etats-Unis avec une situation proche du plein emploi et les effets des mesures de stimulation fiscale.

Tout signe d'accélération de la croissance économique, susceptible de favoriser la hausse des prix est surveillé. L'annonce jeudi d'une croissance plus soutenue qu'attendu de l'économie chinoise au quatrième trimestre 2017 a ainsi provoqué une nette remontée des rendements obligataires.

Le rendement des Treasuries à 10 ans a dépassé 2,64% pour toucher un plus haut depuis septembre 2014, le Bund allemand de même échéance atteignant pour sa part brièvement 0,595%, son plus haut niveau depuis juillet.

Les taux à 10 ans en 2018 (Treasuries en orange, Bund en vert, OAT en violet)

Dans ce contexte, les investisseurs seront attentifs aux premières estimations de la croissance du produit intérieur brut (PIB) du Royaume-Uni et des Etats-Unis au quatrième trimestre 2017, attendues toutes deux pour vendredi.

(édité par Blandine Hénault)