Le Parlement européen,

- vu ses résolutions antérieures sur le Viêt Nam,

- vu le 7edialogue entre l'Union européenne et le Viêt Nam sur les droits de l'homme, qui a eu lieu le 1erdécembre 2017,

- vu l'accord de partenariat et de coopération UE-Viêt Nam signé le 27 juin 2012,

- vu les lignes directrices de l'Union européenne sur les défenseurs des droits de l'homme de 2008,

- vu la déclaration universelle des droits de l'homme de 1948,

- vu le Pacte international relatif aux droits civils et politiques, auquel le Viêt Nam a adhéré en 1982,

- vu la décision du Médiateur européen du 26 février 2016 dans l'affaire 1409/2014/MHZ sur le défaut d'exécution, par la Commission européenne, d'une évaluation des incidences sur les droits de l'homme avant la conclusion de l'accord de libre-échange UE-Viêt Nam,

- vu l'article 135, paragraphe 5, et l'article 123, paragraphe 4, de son règlement intérieur,

A. considérant que l'Union européenne perçoit le Viêt Nam comme un partenaire important en Asie; que l'année 2015 a marqué le 25eanniversaire des relations entre l'Union et le Viêt Nam; que ces relations, limitées au départ au commerce et à l'aide, ont rapidement englobé d'autres domaines;

B. considérant que la famille de Nguyen Van Hoa, vidéaste et blogueur de 22 ans, a signalé sa disparition le 11 janvier 2017, et qu'il s'est avéré par la suite que celui-ci avait été placé en détention par la police sans mandat d'arrêt officiel;

C. considérant que Nguyen Van Hoa a initialement été arrêté en vertu de l'article 258 du code pénal vietnamien et accusé d'avoir «abusé des libertés démocratiques pour porter atteinte aux intérêts de l'État»; qu'en avril 2017, ces accusations ont été revues à la hausse, et qu'il a donc été accusé de violation de l'article 88; que l'article 88 du code pénal a été largement utilisé contre des défenseurs des droits de l'homme qui ont mis en lumière des abus commis au Viêt Nam;

D. considérant que le 27 novembre 2017, Nguyen Van Hoa a été condamné à sept ans de prison pour avoir diffusé des informations en ligne, y compris des vidéos, sur la catastrophe écologique qui a eu lieu dans la province de Ha Tinh en avril 2016, lorsque Formosa Ha Thinh, entreprise sidérurgique taïwanaise, a rejeté illégalement des déchets industriels toxiques dans l'océan, ce qui a eu des effets catastrophiques sur l'environnement sur 200 km de rivages, détruisant la vie marine et rendant les populations malades;

E. considérant que cette catastrophe a causé une grande indignation parmi la population vietnamienne, une vaste mobilisation des réseaux sociaux et des manifestations pacifiques massives dans toutes les grandes villes du Viêt Nam; que l'arrestation de Nguyen Van Hoa a fait partie d'une série d'arrestations ordonnées par les autorités vietnamiennes quelques jours avant la fête du Têt;

F. considérant que le tribunal populaire de la province de Ha Tinh a jugé Nguyen Van Hoa coupable de propagande contre l'État en vertu de l'article 88 du code pénal, à l'issue d'un procès de deux heures et demie; que Nguyen Van Hoa n'a pas été autorisé à avoir accès à un avocat pour le représenter au cours de l'audience;

G. considérant que, le 30 novembre 2017, un tribunal vietnamien a confirmé la condamnation à 10 ans de prison d'une blogueuse, Nguyen Ngoc Nhu Quynh, pour propagande contre l'État après qu'elle eut écrit des articles critiquant la dégradation de l'environnement, les politiques et les décès survenus pendant des gardes à vue;

H. considérant que le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme et ses procédures et mécanismes spéciaux ont à de nombreuses reprises dénoncé l'article 88 du code pénal, ainsi que plusieurs autres des dispositions de ce code, comme contraires au droit international en matière de droits de l'homme;

I. considérant que la plupart des organismes de médias sont détenus et contrôlés par l'État; que la liberté de la presse est gravement restreinte; que le Viêt Nam se place au 175erang sur 180 dans l'indice annuel 2017 de la liberté de la presse de Reporters sans frontières; qu'en réponse à la vaste indignation qui a soulevé la population vietnamienne après la catastrophe de la province de Ha Tinh, les autorités ont momentanément bloqué l'accès aux réseaux sociaux, violemment réprimé les manifestations et arrêté les protestataires;

J. considérant qu'en avril 2016, le Viêt Nam a adopté une loi sur l'accès à l'information ainsi qu'une version modifiée de la loi sur la presse, qui restreint la liberté d'expression et renforce la censure, ainsi que des règlements interdisant les manifestations devant les tribunaux lors des procès;

K. considérant que la liberté de religion ou de conviction est réprimée au Viêt Nam et que l'Église catholique et les religions non reconnues, telles que l'Église bouddhiste unifiée du Viêt Nam, plusieurs Églises protestantes et autres, y compris la minorité ethno-religieuse des Montagnards, continuent de subir une grave persécution religieuse;

L. considérant qu'au cours du 7edialogue UE-Viêt Nam sur les droits de l'homme, la liberté d'expression, d'association, de réunion, de religion et de conviction ainsi que l'accès à l'information ont été abordés; que l'Union européenne a mis l'accent sur la détérioration des droits civils et politiques au Viêt Nam; qu'elle a encouragé le Viêt Nam à adresser des invitations permanentes aux procédures spéciales des Nations unies;

1. condamne la condamnation de Nguyen Van Hoa à sept ans de prison; souligne que Nguyen Van Hoa a exercé son droit à la liberté d'expression; demande instamment aux autorités vietnamiennes de libérer immédiatement et sans condition Nguyen Van Hoa;

2. exprime son inquiétude face à l'augmentation de nombre de détentions, d'arrestations et de condamnations de citoyens vietnamiens liées à l'expression de leurs opinions;

3. s'inquiète de l'approche de plus en plus restrictive des autorités par rapport à la liberté d'expression et d'autres libertés; condamne à cet égard le recours, par les autorités, au harcèlement physique et psychologique, aux assignations à résidence extrajudiciaires, aux pressions exercées sur les avocats, les employeurs, les logeurs et les membres de la famille des militants, et à la surveillance intrusive; s'inquiète en outre des restrictions à la liberté de mouvement pour empêcher les blogueurs et les militants de participer à des événements publics tels que des débats sur les droits de l'homme et d'assister aux procès d'autres militants;

4. demande aux autorités vietnamiennes de libérer tous les citoyens détenus pour avoir exercé pacifiquement leur droit à la liberté d'expression;

5. invite les autorités vietnamiennes à lever toutes les restrictions et à faire cesser tout harcèlement à l'encontre de défenseurs des droits de l'homme et à garantir en toutes circonstances que ceux-ci puissent poursuivre leurs activités légitimes en faveur des droits de l'homme sans craindre de représailles et sans restrictions, et notamment sans harcèlement judiciaire;

6. s'inquiète vivement de la vaste application des dispositions du code pénal vietnamien relatives à la sécurité nationale;

7. dénonce le recours par le Viêt Nam à la peine capitale pour certains crimes en matière de sécurité nationale, comme le prévoit son code pénal modifié, et le fait que des condamnations à la peine de mort continuent à être prononcées dans le pays; rappelle la ferme opposition de l'UE à la peine de mort, dans tous les cas et sans exception; invite une nouvelle fois les autorités vietnamiennes à ouvrir un moratoire sur la peine de mort comme première étape vers son abolition pour tous les crimes;

8. demande instamment au gouvernement vietnamien de modifier certains articles de son code pénal, y compris l'article 88 sur la propagande et l'article 79 sur les activités visant à renverser le gouvernement, qui ont été dénoncés par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme comme contraires au droit international en matière de droits de l'homme, et de veiller à ce que les préoccupations de sécurité nationale ne soient pas utilisées comme prétexte pour supprimer les droits de l'homme, y compris la liberté d'expression et la liberté de religion et de conviction; s'inquiète de la nouvelle loi sur les associations et de la loi sur la croyance et la religion, qui sont incompatibles avec les normes internationales;

9. invite instamment le Viêt Nam à adresser une invitation permanente aux procédures spéciales des Nations unies, en particulier au rapporteur spécial sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion et d'expression et au rapporteur spécial sur la situation des défenseurs des droits de l'homme, et à leur donner un accès libre et sans restriction à toutes les parties qu'ils souhaitent consulter;

10. salue la ratification, par le Viêt Nam, de la convention des Nations unies contre la torture et invite instamment le pays à la respecter véritablement, y compris en fournissant des rapports réguliers et détaillés, conformément à ses dispositions; insiste sur le fait qu'aucune déclaration obtenue sous la torture ou autres mauvais traitements ne constitue une preuve pour condamner des personnes accusées de propagande ou d'autres charges à caractère politique;

11. salue le partenariat renforcé et le dialogue entre l'Union et le Viêt Nam dans le domaine des droits de l'homme et rappelle l'importance du dialogue comme outil essentiel qu'il faut manier avec efficacité pour accompagner et encourager le Viêt Nam dans l'application des réformes qui s'imposent;

12. se félicite que l'Union ait soulevé la question de la liberté d'expression et d'association ainsi que du nombre croissant de placements en détention, d'arrestations et de condamnations au cours du 7edialogue UE-Viêt Nam sur les droits de l'homme; encourage vivement la Commission à surveiller les progrès accomplis au titre du dialogue en introduisant des critères de référence et en mettant en place des mécanismes de suivi; invite instamment la Commission et la VP/HR à continuer de soulever la question de la liberté d'expression dans son dialogue régulier avec le Viêt Nam, y compris au cours du prochain sommet du dialogue Europe-Asie (ASEM) qui doit avoir lieu à Bruxelles en 2018;

13. demande aux autorités vietnamiennes de s'employer à résoudre la catastrophe environnementale de la province de Ha Tinh, qui a tué massivement la faune marine dans la région et affecté la vie de milliers de personnes, en mettant en place des mesures législatives pour rétablir et réhabiliter l'économie locale;

14. charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la vice-présidente de la Commission et haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, au secrétaire général de l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ASEAN) ainsi qu'au gouvernement et à l'assemblée nationale du Viêt Nam.

La Sté Parlement Européen a publié ce contenu, le 13 décembre 2017, et est seule responsable des informations qui y sont renfermées.
Les contenus ont été diffusés par Public non remaniés et non révisés, le13 décembre 2017 18:42:06 UTC.

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