STRASBOURG, 16 janvier (Reuters) - L'élection mardi d'un nouveau président du Parlement européen sera le premier scrutin depuis trente-trois ans dont le sort n'aura pas été réglé d'avance par un accord entre deux groupes politiques.

Aucune ne disposant de la majorité absolue, les principales formations à Strasbourg, le plus souvent le Parti populaire européen (centre-droit) et le groupe socialiste, convenaient jusqu'à présent, en début de législature, de se relayer au perchoir à mi-mandat.

La pratique, qui répondait également à la nécessité de trouver ensuite des majorités de coalition pour faire passer nombre de textes législatifs, durait depuis la seconde élection du Parlement européen au suffrage universel, en 1984.

C'est cette pratique que le groupe socialiste a fait voler en éclats en refusant de s'effacer devant le PPE, auquel le poste était promis, et en présentant son président, l'Italien Gianni Pitella, pour succéder à Martin Schulz, social-démocrate allemand qui détient le record de longévité après cinq ans passés à la tête de l'institution.

Gianni Pitella a justifié ce choix par une volonté de réactiver le clivage droite-gauche face à la progression des mouvements populistes et eurosceptiques et pour éviter que les trois centres de pouvoir politique dans l'UE - Parlement, Commission, Conseil - soient dans les mains des conservateurs.

Le candidat du PPE, son compatriote Antonio Tajani, ancien commissaire européen et proche de Silvio Berlusconi dont il fut porte-parole, dispose d'un avantage mathématique, son groupe de 217 députés étant le plus important dans l'hémicycle.

Ses positions conservatrices sur certains sujets de société pourraient cependant l'empêcher d'élargir son électorat au centre pour obtenir une majorité absolue que ni la droite ni la gauche ne détient.

Sept des huit groupes politiques représentés à Strasbourg ont présenté un candidat. La majorité absolue est requise lors des trois premiers tours de scrutin. Une majorité simple suffit au quatrième auquel seuls les deux candidats arrivés en tête précédemment sont invités à concourir.

Forte de ses 68 parlementaires, l'Alliance des libéraux et des démocrates, au centre de l'hémicycle, a les moyens de faire pencher la balance.

Son candidat, l'ancien Premier ministre belge Guy Verhofstadt, un fédéraliste convaincu, chargé de suivre les négociations du Brexit pour le Parlement, est sorti affaibli de sa tentative avortée d'alliance, la semaine dernière, avec les Italiens "anti-système" et eurosceptiques du Mouvement 5 Etoiles.

Le groupe Europe de la liberté et de la démocratie directe, au sein duquel celui-ci cohabite avec le Parti pour l'indépendance du Royaume-Uni (Ukip), lui-même en pleine crise existentielle après cet épisode, est le seul à ne pas présenter de candidat. (Gilbert Reilhac, édité par Gérard Bon)