Présentation des vœux 2017 : Discours de Ségolène Royal

Bonsoir à tous et à toutes, bienvenue à ce moment de convivialité, pour ce moment d'échange de vœux.

Je suis très heureuse d'être aujourd'hui parmi vous, toujours dans ce lieu magique du Muséum national d'Histoire Naturelle.

Je remercie Bruno DAVID et toutes ses équipes qui une fois de plus nous accueillent dans ce lieu extraordinaire.

Dans quelques secondes, vous allez être en contact, grâce au CNES et grâce à
Jean-Yves LE GALL, avec Thomas PESQUET qui est dans l'espace et va nous rejoindre par liaison satellite.

Thomas PESQUET qui est parti dans l'espace avec l'Accord de Paris sur le climat et qui de loin observe cette petite planète dont nous avons l'éminente responsabilité, de protection et de réparation.

C'est donc un moment éminemment symbolique puisque l'année 2016, j'aurai l'occasion d'y revenir, a été l'année de l'entrée en vigueur de l'Accord de Paris sur le climat, un magnifique moment historique.

Si nous avons réalisé ce moment historique, c'est parce qu'il y a depuis des années des scientifiques, des chercheurs qui ont observé la planète et qui ont pu démontrer les ravages de certaines activités humaines sur celle-ci.

C'est pourquoi l'Accord de Paris sur le climat, appuyé sur des connaissances scientifiques exceptionnelles et la fierté qui est la nôtre d'avoir notre astronaute français dans l'espace, dans cette communauté internationale, est vraiment une chance extraordinaire et un moment extrêmement fort.

Je voudrais en remercier toutes les équipes scientifiques qui sont au sol, qui ont non seulement permis cette expédition extraordinaire mais aussi la liaison que nous allons avoir dans quelques instants.

[Liaison avec Thomas Pesquet depuis l'espace]

Mesdames et Messieurs, je tiens à vous dire aussi vraiment le plaisir que j'ai à être parmi vous pour ce moment de rencontre, c'est le 3ème depuis que je suis à la tête de ce ministère de l'Environnement, de l'Énergie et de la Mer, en charge des Relations internationales sur le climat.

• Quel plus beau symbole que cet échange à l'instant avec notre extraordinaire Thomas PESQUET depuis l'Espace !
  
• En effet, cette année 2016 qui aura marqué l'Histoire de l'humanité avec l'entrée en vigueur de l'Accord de Paris sur le climat, la COP21, doit beaucoup aux scientifiques, doit beaucoup aux chercheurs du monde entier qui ont prouvé la fragilité de notre planète et les destructions intolérables qu'elle subit.
  
• Mais cette année doit aussi beaucoup à vous tous, et à travers vous, à toutes celles et ceux qui se sont mis en mouvement, citoyens, ONG, entreprises, territoires, élus qui ont fait de cette année 2016 celle d'un aboutissement de plus de 20 ans de négociations climatiques et celle aussi d'un nouveau départ.
  
• Je voudrais remercier tout particulièrement les nombreux ambassadeurs du monde entier présents ce soir. Je les ai beaucoup sollicités au cours de cette année en tant que Présidente de la COP21 pour gagner avec eux une à une les ratifications de l'Accord de Paris.
  Et à l'heure où je vous parle, 125 pays ont déjà ratifié l'Accord de Paris, c'est-à-dire ont décidé dans leur droit interne de se l'appliquer. Qui aurait pu l'imaginer en décembre 2015 au moment même de l'Accord de Paris ?

• Oui cet Accord est désormais irréversible et c'est une grande fierté pour la communauté internationale et bien sûr une grande fierté pour la France qui a accueilli la COP21.
  
• Je voudrais redire ici très clairement que même un pays qui en sortirait ne pourrait pas le remettre en cause car cet Accord désormais ratifié par plus de 125 États est désormais irréversible.
• De ces 2 évènements de ce soir, de ce dialogue avec Thomas PESQUET et le rappel de l'entrée en vigueur de l'Accord de Paris, je retiens plusieurs valeurs que je voudrais partager avec vous

1 - Lorsqu'elle est unie, la famille humaine est capable de grandes choses et même de choses inimaginables : « Seul on peut aller vite mais ensemble on peut aller loin », et même très loin nous disait déjà Nelson Mandela. A ceux qui doutent du projet européen, à ceux qui doutent des instances internationales, cette grande aventure spatiale d'un côté et cet Accord international sur le climat de l'autre n'auraient jamais été possible sans la mise en commun de nos intelligences, de nos moyens humains, scientifiques, culturels et financiers.

2 - Ce sont des mots que j'emprunterai à Hubert Reeves et qui sont les suivants : « L'univers est une machine à faire de la conscience ». Ces mots d'Hubert Reeves nous rappellent que la vie est une exception dans l'univers. Ces mots nous ramènent à la responsabilité qui est la nôtre en tant qu'être humain - doté d'intelligence - de prendre soin les uns des autres, de prendre soin des générations futures, de prendre soin de toutes les créatures vivantes dans la nature.

3 - La responsabilité : regardez autour de vous cette Grande galerie de l'évolution. Ces girafes, ces éléphants qui conduisent devant nous ce cortège somptueux, ce symbole de la beauté majestueuse de la nature. Pourtant juste à côté se trouve une salle ici au Muséum où nous sont présentées les espèces disparues, les espèces exterminées, les espèces vivantes anéanties par quoi :

• anéanties par la cupidité humaine,
• anéanties par la surexploitation humaine,
• anéanties par les pollutions de toutes natures,
• anéanties par les prédateurs sous toutes les latitudes.

Alors, face à ces fléaux s'impose le sens de la responsabilité. Chacun doit faire sa part, comme le colibri, si nous voulons prouver que nous sommes dignes d'être vivants. Oui, si nous sommes dignes d'être vivants.

Et puis, comme le rappelle sans relâche Nicolas Hulot, le changement climatique c'est l'ultime injustice.

• Injustice pour les millions de personnes qui vivent dans les états insulaires, comme les Philippines, l'Indonésie ou Tuvalu frappés par les cyclones et les tempêtes.
• Injustice pour les habitants des pays de delta comme le Vietnam ou le Bangladesh qui voient leurs terres inondées d'eaux salées devenir incultivables.
• Injustice pour tous ces enfants qui naissent dans les pays du Sahel où l'accès à l'eau devient une lutte quotidienne épuisante.
• Injustice pour bien d'autres.

Tous ces pays ont regardé la France avec un immense espoir et tous ces pays qui souffrent continuent à compter sur nous, et c'est pourquoi chaque jour dans ce ministère, nous sommes au combat pour avancer.

Oui, 2016 a été une grande année pour l'environnement, pour le développement durable, pour la planète, pour l'excellence environnementale de la France.

Je l'ai vécue, avec toutes les équipes qui m'entourent, comme l'année des récoltes après les mois de semailles qui l'ont précédée, encore la nature.

Je voudrais ici en remercier les équipes du ministère et tous les organismes qui lui sont rattachés pour l'énorme travail accompli. Je voudrais aussi remercier du fond du cœur tous les parlementaires nombreux ce soir, qui se sont engagés pendant des heures et des heures de débat souvent au-delà des clivages politiques pour mettre en place nos deux grands monuments législatifs de l'année 2016 :

• à la fois la loi de transition énergétique pour la croissance verte,
• et la loi de reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages que nous avons menée à fin avec Barbara Pompili.

Ces lois que personne ne pourra détruire, vous verrez que personne ne pourra les remettre en cause parce qu'elles portent le sens de l'histoire, qui s'est écrit, parce qu'elles portent l'espoir de ce nouveau monde que nous voulons faire éclore, cette économie verte bas carbone, cette économie qui inscrit enfin dans ses comptes les choses suivantes :

• elle inscrit la valeur de la nature,
• elle inscrit la valeur de la santé liée à la protection de la nature,
• elle inscrit la valeur du temps et de la génération qui vient par rapport au court terme.

Alors bien sûr, je pourrais vous livrer un catalogue de tous ces résultats.
Je pourrais vous dire le bonheur que l'on ressent en réussissant à protéger plus de 20 % de nos aires marines protégées alors qu'il n'y en avait que 4 % protégées.
Je pourrais vous raconter la satisfaction de gagner des combats difficiles contre les pesticides, les néonicotinoïdes, les perturbateurs endocriniens et autres substances dangereuses pour la santé, dissimulés jusqu'alors par la loi du silence et qui polluaient sans vergogne, l'air, l'eau, le sol et de faire de la France une terre de pollinisation.

Je pourrais vous dire aussi combien c'est réconfortant d'arracher à l'Europe l'arrêt du massacre des fonds sous-marin, en interdisant la pêche en eau profonde, ce qui était considéré comme impossible à obtenir.

Oui, je pourrais vous dire bien des choses encore.

Mais surtout, ce que je voudrais vous dire, c'est que toutes ces batailles gagnées je les dois, et la France les dois aussi, et je voudrais leur rendre ici un hommage appuyé, aux militants de la cause environnementale, aux ONG, aux associations, aux mouvements citoyens, à leurs engagements, à leurs combats, tous ces militants de la cause environnementale qui ont parfois œuvré dans le silence ou dans l'indifférence, tous ces citoyens que j'avais déjà reconnus comme partenaires dans ma région Poitou-Charentes, région du laboratoire de l'excellence environnementale, et qui m'a permis d'agir vite et bien au niveau national.
Oui c'est cette expérience qui m'a permis de faire la même chose à l'échelle nationale, c'est-à-dire de reconnaitre à part entière de cette co-construction tous ces militants de l'environnement et ces ONG, qui ont souffert trop souvent de l'indifférence et parfois du mépris et qui ont aujourd'hui le plein et entier respect qui leur est dû.

Je voudrais pour terminer m'adresser plus personnellement à chacun d'entre vous, puisque ce beau ministère dont j'ai la charge est responsable de notre planète et de la nature.
Je voudrais vous souhaiter en 2017 de trouver des moments pour habiter pleinement le présent, en pleine conscience et de partager ces moments avec vos proches.

Et c'est la nature qui nous le permet le plus.
Face au ciel, face à l'océan, face à la montagne, à la forêt, face aux étoiles chères à Hubert Reeves, face à un simple jardin, à un lever ou un coucher de soleil, oui ces moments indispensables de ressourcement nous permettent de nous reconnecter aux merveilles qui nous entourent et que l'on oublie trop souvent de regarder pour vivre pleinement un instant présent, pour reprendre contact avec nous-même, pour absorber de la nature la sérénité et la capacité d'attention et de méditation sans lesquelles nous sommes ballotés au gré des sollicitations artificielles de toute sorte et notamment celles des écrans omniprésents.

Oui le grand écran de la nature est notre passé mais il est surtout notre avenir parce qu'il est ce lien qui nous relie tous et toutes à la chaîne du vivant dont nous avons l'éminente responsabilité de protection et que nous partageons.

Soyez heureux en 2017. Très belle année à tous, à toutes et à chacun.

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