* L'opposition en tête dans les sondages d'opinion

* Le candidat du pouvoir en 3e position-sondages

* Certaines machines à voter étaient en panne

* Les inondations ont empêché certains électeurs de voter (Actualisé avec précisions, réactions)

par Giulia Paravicini et Fiston Mahamba

KINSHASA, 31 décembre (Reuters) - Files d'attente interminables, machines à voter en panne et pluies torrentielles dans la capitale Kinshasa ont perturbé l'élection présidentielle dimanche en République démocratique du Congo tandis que l'opposition dénonçait des irrégularités.

Les bureaux de vote sont restés ouverts après l'heure de fermeture, prévue à 17h00 GMT, pour permettre aux électeurs qui patientaient en longues files de pouvoir voter. De nombreux bureaux ont ouvert avec un retard de plusieurs heures.

Les opérations de vote se sont déroulées en général dans le calme mais quelques faits de violences ont été signalés.

Un jeune homme a été tué par balles par un policier après un différend électoral devant un bureau de vote à Walungu dans la province du Sud-Kivu. La foule a ensuite battu à mort le policier, selon un témoin et un politique de la région.

Les élections sont rares en RDC, pays qui a connu coups d'Etat, guerres civiles et autres assassinats depuis son indépendance de la Belgique en 1960.

Quarante millions d'électeurs étaient appelés à désigner le successeur de Joseph Kabila, au pouvoir depuis l'assassinat de son père, en 2001, et auquel la Constitution interdit de briguer un troisième mandat consécutif. Le scrutin pourrait donner lieu à la première alternance démocratique de l'histoire de la RDC.

Les Congolais votaient aussi pour les législatives et les régionales.

Le chef de l'Etat sortant soutient la candidature d'Emmanuel Ramazani Shadary, un ancien ministre de l'Intérieur. Les sondages d'opinion le donnent en troisième position derrière deux candidats de l'opposition.

"Il est certain que les élections sont libres et équitables", a déclaré Joseph Kabila, venu voter dans une école de la capitale, qui a ajouté que sa seule préoccupation concernait les fortes pluies qui pourraient affecter la participation.

"IMPACT NÉGATIF"

De nombreux Congolais n'ont cependant pas pu voter. Dans trois fiefs de l'opposition, dans l'est et l'ouest du pays, aucun vote n'a eu lieu après l'annulation du scrutin par les autorités, qui ont invoqué des risques liés à l'épidémie de fièvre Ebola et à des troubles ethniques.

Selon la conférence épiscopale (Cenco), qui s'efforce de jouer un rôle d'intermédiaire dans ce pays morcelé, les machines pour le vote électronique ont mal fonctionné dans au moins 544 des 12.300 bureaux de vote qu'elle a surveillés.

Certains électeurs se sont plaints de ne pouvoir trouver leur nom sur les listes électorales. D'autres n'ont pu accéder aux bureaux de vote, plusieurs rues de Kinshasa étant inondées.

Vital Kamerhe, directeur de campagne de l'opposant Félix Tshisekedi, affirme avoir reçu plusieurs signalement de fraudes commises en faveur du candidat du pouvoir.

Il évoque notamment des incidents à Inongo, dans l'ouest, où le président du bureau de vote a voté à plusieurs reprises pour Emmanuel Ramazani Shadary et où trois machines transformaient les votes favorables à Tshisekedi en votes en faveur de Shadary.

Martin Fayulu, candidat de l'opposition qui était donné en tête des intentions de vote à deux jours du scrutin, s'est plaint des dysfonctionnements du matériel électoral et de noms mal orthographiés sur les bulletins de vote.

"Toutes ces irrégularités auront certainement un impact négatif sur le processus mené aujourd'hui par la commission électorale", a déclaré lors d'une conférence de presse l'homme d'affaires et ancien dirigeant d'Exxon Mobil.

Reuters n'a pu vérifier ces informations. Le président de la commission électorale (Ceni) a déclaré à la télévision publique que les opérations de vote s'étaient déroulées sans souci, hormis de rares difficultés mineures.

Un peu plus tôt, la Ceni avait déclaré sur Twitter qu'à Inongo et dans plusieurs autres villes, les opérations de vote étaient en cours et que tout allait bien.

"JE SERAI PRÉSIDENT", DIT SHADARY

Le dépouillement a commencé dans la soirée dans certaines régions du pays, avec des lampes torches comme seul éclairage dans les bureaux de vote. Les premiers résultats partiels sont attendus sous deux jours.

En dépit des reports répétés du scrutin - il devait à l'origine avoir lieu en 2016 - les autorités étaient mal préparées, ont indiqué des diplomates et des observateurs du sondage, faisant craindre une répétition des violences qui ont suivi les élections en 2006 et 2011.

De violentes manifestations ont éclaté cette semaine après l'annulation du scrutin à Beni et Butembo, en raison de l'épidémie de fièvre Ebola dans l'est du pays et à Yumbi, dans l'ouest, en raison de violences ethniques.

Selon le dernier sondage publié vendredi par l'unité de recherches sur la RDC de l'Université de New York, Martin Fayulu est en tête des intentions de vote avec 47%. Il devance Felix Tshisekedi, crédité de 24%. Emmanuel Ramazani Shadary arrive troisième avec 19%.

Martin Fayulu et Felix Tshisekedi se sont tous deux dits convaincus de leur victoire, mais le candidat du pouvoir a bénéficié de multiples avantages, dont une couverture médiatique plus importante.

"Je pense que la victoire est de mon côté et que ce soir je serai président", a assuré Shadary après avoir effectué son vote. (avec Stanis Bujakera, Baz Ratner, Sabiti Djaffar, Juliette Jabkhiro et Gavin Jones; Jean-Philippe Lefief, Danielle Rouquié et Jean Terzian pour le service français)