par Katanga Johnson et Zachary Fagenson

MIAMI, Floride, 18 février (Reuters) - Les survivants de la fusillade qui a fait 17 morts dans un lycée de Parkland, en Floride, ont participé samedi à un rassemblement marqué par la tristesse et surtout la colère pendant qu'à une soixante de kilomètres de là se déroulait comme si de rien n'était une foire aux armes géante.

Le massacre de Parkland a relancé le débat sur les ventes d'armes aux Etats-Unis, protégées par le second amendement de la Constitution, sans toutefois faire bouger les lignes entre partisans et adversaires d'un contrôle renforcé.

De nombreuses personnes qui participaient au rassemblement à la mémoire des victimes samedi à Fort Lauderdale ont appelé à l'adoption d'une nouvelle loi sur les armes et critiqué le président Donald Trump, qui a mis en cause le déséquilibre psychologique du tireur, Nikolas Cruz, 19 ans.

"On ne peut pas réduire ça à un problème mental", a déclaré Emma Gonzalez, une lycéenne de 18 ans, aux centaines de personnes réunies devant un bâtiment fédéral.

Nikolas Cruz "n'aurait pas tué autant de lycéens avec un couteau", a-t-elle ajouté en essuyant des larmes, sous les applaudissements de la foule.

Les lycéens ont exprimé leur colère face à la décision prise il y a un an par Donald Trump de revenir sur une mesure de son prédécesseur, Barack Obama, qui avait imposé des vérifications supplémentaires aux acheteurs d'armes ayant des antécédents psychiatriques.

Emma Gonzalez a aussi dénoncé le rôle du lobby des armes, la National Rifle Association (NRA), opposée à tout durcissement de la législation.

"Les politiciens élus (au Congrès) grâce aux financements de la NRA nous disent que rien ne pouvait être fait pour empêcher cela, honte à vous!'", a-t-elle dit.

Malgré son exclusion du lycée pour troubles psychologiques, Nikolas Cruz a pu acheter légalement le fusil d'assaut de type AR-15 qui a servi au massacre.

FUSILS D'ASSAUT EN VENTE LIBRE

Les autorités américaines ont aussi reconnu qu'il était surveillé par la police depuis 2016 en raison notamment de propos menaçants sur les réseaux sociaux.

"Le moins que les parlementaires puissent faire, c'est adopter une nouvelle loi", a déclaré Ryan Deitsch, 18 ans, qui a survécu à la fusillade en se cachant dans un placard. "Qu'est-ce qui pourrait se produire de plus grave?"

Mais tout le monde aux Etats-Unis ne partage pas cet avis et pour s'en rendre compte, il suffisait de se rendre samedi à 60 km de Fort Lauderdale, au centre d'exposition du comté de Dade où se déroulait une grande foire aux armes à feu.

Malgré les appels à l'annulation de l'évènement, la foire a été maintenue et tous les types d'armes, dont des dizaines de fusils d'assaut, étaient proposés aux acheteurs potentiels.

Parmi eux, Joe Arrington, un ancien policier de 29 ans déambulant entre les stands avec sa fillette dans les bras et un fusil en bandoulière.

Lui ne se dit pas opposé à ce que des mesures de contrôle supplémentaires soient imposés aux acheteurs, mais il estime que cela n'empêchera pas des massacres comme celui de Parkland.

"Je ne crois pas qu'une quelconque loi aurait empêché ce qui est arrivé", a-t-il dit. "Je crois que beaucoup de services de sécurité n'ont pas fait le boulot qu'on attend d'elles."

Certains partisans du port d'armes sont encore plus radicaux, comme Adolfo David Ginarte, manager dans un hôtel, qui qualifie d'"anti-américains" les appels à l'annulation de la foire aux armes.

"Les évènements ne tiennent pas compte des sentiments", argumente-t-il. "Ce qui doit arriver arrive. Et la vie continue. Qu'est-ce qui va se passer si je n'aime pas un film? On va déprogrammer le film? Ce n'est pas la première fois (que se produit un tel massacre), et ce n'est pas la dernière."

(Tangi Salaün pour le service français)