NEW YORK (awp/afp) - Même si l'élection présidentielle française de dimanche est largement commentée à Wall Street face à l'apparente dynamique des candidats eurosceptiques, les investisseurs ne semblent guère s'en affoler, d'autant que la Bourse américaine bénéficie de bons résultats d'entreprises.

Lors des cinq dernières séances, l'indice vedette Dow jones Industrial Average a pris 0,46% à 20.547,76 points et le Nasdaq, à dominante technologique, 1,82% à 5.910,52 points. L'indice élargi S&P 500 a gagné 0,85% à 2.348,69 points.

"Tout le monde va faire extrêmement attention au premier tour de l'élection présidentielle en France", a reconnu Tom Cahill, de Ventura Wealth Management.

A lire les analystes américains, qui font par ailleurs face à la difficulté spécifique d'appréhender un système à deux tours peu répandu dans le monde anglo-saxon, le sentiment est le même que chez les commentateurs politiques français: la course s'achève de façon indécise entre quatre grands candidats avant le scrutin de dimanche.

Sur les marchés, ces potentiels finalistes sont perçus en fonction de leur rapport à l'Union européenne (UE): le centriste Emmanuel Macron, qui veut renforcer la construction européenne, est largement présenté comme le vainqueur le plus souhaitable, suivi de près par le conservateur François Fillon.

Les experts ne font guère de nuances dans leur défiance envers la candidate nationaliste Marine Le Pen, qui souhaite une sortie de l'euro, et le représentant de la gauche radicale, Jean-Luc Mélenchon, partisan de négociations musclées avec les partenaires européens de la France.

Mais dans les faits, "on n'a pas des marchés qui anticipent des problèmes lundi matin", a minimisé Gregori Volokhine, de Meeschaert Financial Services.

"Les marchés financiers ont fait le pari que ce ne sera pas un événement", a-t-il précisé. "C'est à dire que ce sera un parti traditionnel qui l'emportera... Macron étant aussi traditionnel qu'on peut l'imaginer !"

Tout en remarquant cette placidité apparente des marchés, M. Volokhine s'étonnait personnellement de leur "optimisme béat" et les jugeait exposés au risque de mauvaise surprise en France comme aux Etats-Unis, au moment où le gouvernement de Donald Trump tente de convaincre sa majorité républicaine au Congrès d'éviter un "shutdown" budgétaire du gouvernement.

- Mnuchin à la rescousse -

De façon générale, la prudence des analystes contraste avec la bonne tenue de Wall Street, qui reste proche des records battus dans la foulée de l'élection et des débuts présidentiels de M. Trump.

"Ce qui était marquant cette semaine, c'est que l'on avait l'impression que la Bourse chutait... Alors que ce n'était pas le cas !", a rapporté Karl Haeling, de LBBW.

Comme explication à cette impression générale, il citait les résultats trimestriels décevants de grands noms de la cote, comme le groupe informatique IBM, alors même que les chiffres des entreprises américaines se révèlent largement positifs.

"Cette semaine, la Bourse a largement été soutenue par le fait que les entreprises ont dans l'ensemble fait part d'une hausse de leurs bénéfices", a souligné M. Cahill.

Il remarquait en particulier les résultats meilleurs que prévu des grandes banques, à l'exception de Goldman Sachs, un secteur très surveillé puisqu'il avait particulièrement flambé après l'élection de M. Trump.

"D'habitude, les investisseurs ne sont pas autant concentrés sur le secteur financier, mais là, il sert de jauge à l'ensemble de la Bourse", a insisté M. Cahill.

La semaine prochaine sera encore chargée avec quelque 200 résultats du S&P 500 et, notamment, de grandes figures de l'industrie comme Caterpillar (mardi),de la technologie comme Alphabet (Google, jeudi) ou de la consommation comme Coca-Cola (mardi).

Reconnaissant des résultats "excellents", M. Volokhine jugeait que c'était avant tout l'espoir de réformes fiscales et budgétaires ambitieuses de M. Trump qui dominait les considérations après des propos jugés encourageants de Steven Mnuchin, secrétaire au Trésor.

En fin de compte, "le comportement général de la Bourse semble bien meilleur que les commentaires qui en sont faits", s'est étonné M. Haeling citant un sondage mensuel de la banque Merril Lynch chez les investisseurs.

"Parmi les gérants de fonds, 83% jugent que la Bourse est surévaluée: ce chiffre n'a jamais été aussi haut depuis les débuts de ce sondage en 1999", a-t-il souligné.

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