Les marchés actions ont souffert hier, alors que le compte à rebours final est enclenché avant la décision de la Fed sur ses taux ce soir à 20h00. Il est quasiment certain que la banque centrale va procéder à un resserrement de principe de 25 points de base pour porter le niveau des Fed Funds dans la fourchette 5 à 5,25%. L'inflation est encore trop menaçante pour relâcher la pression, selon l'institution. Mais l'enjeu n'est pas vraiment là. Les investisseurs sont prêts à payer pour connaître la stratégie que la Fed va déployer pour les mois à venir. Plus spécifiquement, ils veulent connaître la réponse monétaire à la question complexe : quelle est la meilleure voie à suivre pour limiter les dégâts quand les clefs d'entrée sont inflation + ralentissement économique + taux élevés + crise bancaire larvée ? La balle sera dans le camp du patron de la banque centrale, Jerome Powell, à partir de 20h30 pour tenter de rassurer – une fois de plus – les marchés.

Hier, la tension est montée d'un cran en bourse. La plupart des indices européens a perdu plus de 1%. J'illustre les parcours avec deux places emblématiques. Zurich a limité ses pertes à 0,12%, meilleure performance européenne, même si 14 de ses 20 composants ont piqué du nez. Les poids lourds défensifs (Novartis en tête) ont largement contribué à cette bonne tenue. A l'inverse, l'AEX à Amsterdam a plongé de 1,9%. Il a été plombé par la chute du pétrole (Shell) et surtout par ses deux éditeurs vedettes, Wolters Kluwer et Relx, qui ont chacun perdu environ 5%. J'en parlais hier, le spécialiste du soutien scolaire américain Chegg a tiré la sonnette d'alarme sur l'impact des nouveaux robots conversationnels à base d'intelligence artificielle. Le titre s'est effondré de 48% en séance ! Il a emporté avec lui tous les acteurs du secteur et par ricochets les éditeurs, dont les deux néerlandais ou l'anglais Pearson (-15%). L'ETF centré sur l'éduction Global X Education a chuté de 6,6% hier : c'est un bon marqueur du moral du secteur.

Wall Street garde un œil attentif sur les bouleversements entraînés par l'IA, mais les préoccupations de la veille étaient ailleurs. Le décrochage du pétrole a naturellement grevé le compartiment, avec des gadins spectaculaires chez les Chevron (-4,3%) et compagnie. L'or noir a connu sa plus forte baisse quotidienne depuis le début du mois de janvier. Paroles d'un spécialiste du secteur : "il n'y a guère de nouveaux éléments fondamentaux pour justifier cette vente, bien que les investisseurs semblent de plus en plus inquiets des perspectives macroéconomiques et de leurs implications pour la demande de pétrole". OK, il en sait rien, quoi. L'autre angle de faiblesse, et pas des moindres, est à chercher du côté des banques régionales après la chute de First Republic. Le marché est à la recherche de la prochaine victime expiatoire dans le secteur. Comerica, Zions et Keycorp ont encore perdu plus de 9% hier. Pacwest près de 30% et Western Alliance 15%. Le bain de sang bancaire touche aussi des acteurs plus gros. Truist Financial (42 Mds$ de capitalisation) a chuté de 8%. US Bancorp (50 Mds$ de capitalisation) a fait -7%. Honnêtement, il est difficile de voir comment ce "bank run" peut s'arrêter sans une action vigoureuse des autorités américaines. La baisse des actions en bourse n'est pas une fatalité, mais des baisses continues et de cette ampleur poussent les épargnants à se tourner vers des institutions plus grosses, accentuant encore les déséquilibres. Et si la panique rattrape des acteurs intermédiaires et non plus du menu fretin, l'onde de choc sera considérable. La Fed le sait. Reste à voir sa réaction. En attendant, les trois indices majeurs américains ont cédé plus de 1% hier.

Les données macroéconomiques attendues aux Etats-Unis avant la décision de la Fed ne devraient pas changer la donne. La séance reste animée par les publications de résultats. BNP Paribas, Airbus, Lufthansa ou Unicredit en Europe ce matin. Puis Costco, Qualcomm ou CVS Health plus tard aux Etats-Unis. La nuit dernière, Advanced Micro Devices a déçu avec des perspectives jugées faiblardes par le marché. Hier, le microcosme financier américain a été agité par le raid lancé par le vendeur à découvert Hindenburg sur le vieux pirate des marchés Carl Icahn et son holding Icahn Enterprises. Le fonds spéculatif a argumenté sur la surévaluation des actifs d'Icahn et sur la politique très généreuse de versement de dividendes, en estimant que l'argent frais des nouveaux investisseurs ne sert qu'à rémunérer les anciens. Le holding a coulé de 20%. On ne peut pas parler d'arroseur arrosé, puisqu'Icahn avait plutôt l'habitude d'entrer à la hussarde dans des entreprises pour bouleverser leur fonctionnement, mais on peut dire que la peur a momentanément changé de camp. Toutefois, le milliardaire de 87 ans a répliqué avec flegme en renvoyant aux précédentes déclarations publiques sur la solidité de son modèle et en estimant qu'Hindenburg avait surtout pour objectif de générer des profits sur sa propre position à découvert.

En Asie Pacifique, le Japon est fermé pour le reste de la semaine pour la traditionnelle "Golden Week". Shanghai fait aussi relâche aujourd'hui. A Hong Kong, les actions consolident lourdement de 1,7% à l'heure où j'écris. La Corée du Sud n'est pas bien plus fringante (-0,8%). L'Australie perd 1% pour la seconde séance consécutive. Les indicateurs avancés européens ont l'air de vouloir rester dans le vert, mais la nervosité étant montée d'un cran, il faut se méfier des tendances. De toute façon, c'est bien la Fed qui donnera le ton, après la clôture des places du vieux continent. Le CAC40 gagne 0,5% à 7417 points à l'ouverture.

Les temps forts économiques du jour

Aux Etats-Unis, l'enquête ADP sur l'emploi (14h15) et les indices PMI (15h45) et ISM (16h00) des services permettront de patienter jusqu'à la décision de politique monétaire de la Fed à 20h00, suivie de la conférence de présentation de la décision à 20h30. Tout l'agenda ici.

L'euro remonte à 1,1026 USD. L'once d'or rebondit à 2017 USD. Le pétrole connaît un nouveau trou d'air, avec un Brent de Mer du Nord à 75,33 USD le baril et un brut léger américain WTI à 71,58 USD. Le rendement de la dette américaine sur 10 ans chute de 14 points à 3,41%. Le bitcoin s'échange autour de 28 500 USD.

Les principaux changements de recommandations

  • AB Volvo : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 205 à 215 SEK.
  • Ageas : ING passe de conserver à acheter en visant 50 EUR.
  • Alfen : KBC démarre le suivi à accumuler en visant 83 EUR.
  • AMS-Osram : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 6,80 à 6,10 CHF.
  • Atlas Copco : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 140 à 165 SEK.
  • Basilea : Baader Helvea démarre le suivi à l'achat en visant 57,70 EUR.
  • bioMérieux : HSBC passe d'alléger à conserver en visant 90 EUR.
  • Daimler Truck : Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 38 à 40 EUR.
  • Davide Campari : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 11 à 12 EUR.
  • Dormakaba : Credit Suisse passe de surperformance à neutre en visant 447 CHF.
  • Logitech : UBS passe de neutre à vendre en visant 43 CHF.
  • Nemetschek : Baader Helvea passe d'accumuler à alléger en visant 73 EUR.
  • Salmar : Berenberg reste à la vente avec un objectif de cours relevé de 370 à 420 NOK.
  • SIG Group : Jefferies reste à l'achat avec un objectif de cours relevé de 26 à 28 CHF.
  • Sinch : Morgan Stanley passe de souspondérer à pondération en ligne en visant 27 SEK.
  • Skan : Credit Suisse reste à surperformance avec un objectif de cours relevé de 82 à 95 CHF.
  • Thulé : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 225 à 270 SEK.
  • TotalEnergies : Berenberg reste à l'achat avec un objectif de cours réduit de 69 à 67 EUR.
  • Traton : Jefferies reste à conserver avec un objectif de cours relevé de 16 à 20 EUR.
  • TUI : HSBC passe de conserver à acheter en visant 9,10 EUR.
  • Wacker Chemie : Berenberg reste à conserver avec un objectif de cours réduit de 140 à 130 EUR.

En France

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Airbus : à suivre
  • Aperam : vise une hausse de son Ebitda au T2 après un début d'année difficile.
  • BNP Paribas : double ses bénéfices au premier trimestre grâce à la vente de Bank of the West.
  • Imerys : les revenus du T1 sont stables, pour une marge d'Ebitda de 15,1%.
  • Neoen : confirme ses objectifs 2023 et de moyen terme après un chiffre d'affaires en hausse de 42% au T1.
  • Stellantis : confirme ses objectifs pour 2023 après un début d'année dynamique.

Annonces importantes (et moins importantes)

  • TotalEnergies et Sinopec seraient en pourparlers avec Saudi Aramco au sujet du projet de développement gazier de Jafurah en Arabie saoudite, d'une valeur de 10 Mds$, selon Bloomberg. Par ailleurs, le groupe français signe un protocole d'accord en vue du développement de deux blocs en Angola.
  • Sanofi et Eli Lilly plafonnent les prix de l'insuline pour les personnes non assurées à New York.
  • La cour d'appel de Paris a rejeté le recours formé contre la décision de conformité de l'AMF sur l'OPA visant Electricité de France. L'offre sera rouverte pour 10 jours de bourse entre le 4 et le 17 mai inclus.
  • Guillaume Debrosse quitte son poste de directeur général de Bonduelle, pour lequel il sera remplacé par un dirigeant à trouver doté d'une solide expérience de l'Amérique du Nord et de la grande consommation.
  • ID Logistics reprend les opérations du centre de distribution d'Auchan de Lędziny, en Pologne.
  • PCAS négocie la vente de sa filiale au Canada à DIC sur la base d'une valeur d'entreprise de 88,2 M€.
  • Safe signe des accords de distribution aux Etats-Unis.
  • Elles ont publié / Elles doivent publier : Jacques Bogart, Ramsay Générale de Santé, …

Dans le monde

Résultats des entreprises (les commentaires sont donnés à chaud et ne préjugent pas de l'évolution des titres)

  • Advanced Micro Devices : le titre perd 6,5% hors séance après la publication de perspectives jugées décevantes par le marché.
  • Ford : les résultats du T1 sont solides grâces à des prix élevés, ce qui n'empêche pas le titre de perdre un peu de terrain après la clôture.
  • Lloyds Banking Group : dépasse les prévisions de bénéfices pour le premier trimestre.
  • Lufthansa : enregistre une hausse de 40 % de son chiffre d'affaires au premier trimestre.
  • Signify : les résultats sont inférieurs aux prévisions en raison d'une baisse de la demande.
  • Starbucks : le titre perd 5,5% hors séance après la publication de résultats trimestriels jugés décevants.
  • Unicredit : le bénéfice net du T1 dépasse 2 Mds€ et les prévisions du marché. Les objectifs sont relevés.

Annonces importantes (et moins importantes)

  • Les actions du groupe Icahn chutent de 20% après l'attaque du vendeur à découvert Hindenburg.
  • Après le fiasco Kanye West, Adidas attaqué en justice par des actionnaires.
  • Morgan Stanley serait en train de discuter d'un accord transactionnel avec les autorités américaines dans l'enquête sur les "block trade".
  • Albemarle va dépenser 1 Md$ pour doubler la production d'hydroxyde de lithium en Australie.
  • Les PDG de Google et de Microsoft OpenAI participeront à une réunion sur l'IA à la Maison Blanche.
  • Sika finalise l'acquisition de la société allemande MBCC.
  • Ford rouvre les commandes pour les modèles Mustang Mach-E et baisse les prix.
  • Lannett se place sous la protection de la loi sur les faillites aux États-Unis.
  • Superdry en "discussions positives" sur une éventuelle levée de fonds.
  • Holcim se renforce en Amérique Latine.
  • Nikola et Voltera construiront 50 stations de ravitaillement en hydrogène en Amérique du Nord.
  • Montana Aerospace engage des banques pour l'IPO de sa division énergie.
  • Les principales publications du jour : Costco, Qualcomm, Porsche, Airbus, CVS Health, BNP Paribas, Equinix, Enel, Stellantis, Deutsche Post, Kraft Heinz, Haleon, OrstedTout l'agenda ici.

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