(Actualisé avec réactions de démocrates et de Paul Ryan, et précisions)

par Dustin Volz et Warren Strobel

WASHINGTON, 16 février (Reuters) - Une agence russe de l'internet, deux autres entités russes et 13 ressortissants russes se sont immiscés dans le processus électoral américain de 2014 à 2016, dans le cadre d'une opération multiforme visant à soutenir le candidat républicain Donald Trump et à dénigrer son adversaire démocrate Hillary Clinton, ont déclaré vendredi les services du procureur spécial Robert Mueller, dans l'acte d'inculpation.

A Moscou, le ministère russe des Affaires étrangères a qualifié d'absurdes ces nouvelles accusations d'ingérence.

"Treize personnes ont interféré dans les élections américaines? Treize contre des services de renseignement (américains) dotés de milliards de dollars? Contre les services de renseignement et de contre-espionnage, contre les dernières technologies? Absurde, oui!", a écrit sur Facebook Maria Zakharova, porte-parole du ministère des Affaires étrangères russe.

Pour Paul Ryan, le président républicain de la Chambre des représentants, "Ces Russes se sont livrés à une attaque malveillante et systématique contre notre système politique".

Les responsables démocrates, comme Nancy Pelosi, chef du groupe démocrate à la Chambre, ont appelé Donald Trump et mettre en oeuvre des sanctions contre la Russie.

L'acte d'inculpation visant trois entités et 13 Russes, qui compte 37 pages, décrit une conspiration visant à interférer dans l'élection américaine.

Le document de justice décrit une opération, baptisée "Projet Lakhta", s'étalant sur plusieurs années et dotée de financements importants, qui a débuté en mai 2014.

Le document d'inculpation dévoile un niveau de sophistication et de préparation plus important que ce que l'on savait jusqu'à présent des ingérences russes.

FAUSSES IDENTITÉS

Des Russes ont illicitement volé des numéros de sécurité sociale et des dates de naissance d'Américains afin d'ouvrir des comptes sur la plate-forme de paiement PayPal et pour poster des messages sur les réseaux sociaux sur la base de fausses identités.

Les acteurs de cette conspiration ont créé de fausses identités sur internet pour diffuser des messages clivants. Ils se sont rendus aux Etats-Unis pour recueillir des renseignements et ont même organisé des rassemblements politiques en se faisant passer pour des Américains, lit-on dans le document d'inculpation.

L'Agence de recherche russe de l'internet "s'est assigné comme objectif stratégique de semer la discorde au sein du système politique américain, notamment lors de l'élection présidentielle américaine de 2016", lit-on également.

Certains des accusés, se faisant passer pour des Américains, ont approché des personnes associées à l'équipe de campagne de Donald Trump, alors candidat républicain, sans que ces personnes sachent à qui elles avaient affaire.

Cet acte d'inculpation recoupe pour l'essentiel les conclusions d'une évaluation effectuée en janvier 2017 par la communauté américaine du renseignement, qui avait conclu à une ingérence de Moscou dans l'élection dont l'objectif était de favoriser Donald Trump, le candidat républicain qui a remporté une victoire surprise face à Hillary Clinton.

"Ces inculpations viennent rappeler que les gens ne sont pas toujours ce qu'ils disent être sur le réseau internet", a déclaré vendredi Rod Rosenstein, l'Attorney General adjoint (vice-ministre américain de la justice).

ELECTIONS DE MI-MANDAT EN LIGNE DE MIRE

"Cet acte d'inculpation dit que les conspirateurs russes veulent favoriser la discorde aux Etats-Unis et saper la confiance de l'opinion dans la démocratie. Nous ne devons pas les laisser réussir", a-t-il dit.

Rod Rosenstein a déclaré que les 13 Russes et trois entités inculpés pour ingérence dans les élections américaines s'étaient livrés à une "guerre de l'information".

Il a ajouté que rien ne permettait, au vu des chefs d'inculpation, de dire qu'un Américain s'était en connaissance de cause engagé dans les manoeuvres d'ingérence dans les élections. Ces inculpations, a-t-il poursuivi, montrent que les Russes veulent semer la discorde aux Etats-Unis.

Le président Trump a été tenu informé des inculpations annoncées vendredi, a dit la porte-parole de la Maison blanche, Sarah Sanders. La Russie nie toute ingérence dans la campagne électorale américaine. Donald Trump, quant à lui, dément toute collusion entre Moscou et son équipe de campagne.

Le directeur du National Intelligence Dan Coats a déclaré mardi devant la commission des renseignements du Sénat qu'il avait déjà eu en sa possession des éléments montrant que la Russie visait maintenant les élections de mi-mandat, qui auront lieu en novembre.

"Il est clair que les Etats-Unis subissent une attaque", a dit Dan Coats lors de son audition annuelle sur les menaces dans le monde. (Warren Strobel Eric Faye pour le service français)