* Pour Zarif, on n'a jamais été aussi près d'un accord

* Les négociateurs n'ont pas prévu d'aller au-delà du 7 juillet

* Les positions restent éloignées sur plusieurs points

* Parmi eux, l'accès aux sites et la "possible dimension militaire" passée du programme (Actualisé, Zarif sur YouTube, §§ 1, 4, 5)

par John Irish et Louis Charbonneau

VIENNE, 3 juillet (Reuters) - Après 18 mois de discussions, les pourparlers entre Téhéran et les grandes puissances du P5+1 sur le programme nucléaire de la République islamique sont entrés dans la dernière ligne droite vendredi et le chef de la diplomatie iranienne a estimé qu'un accord n'avait jamais été aussi proche.

Réunis à Vienne, les négociateurs tentent de régler les derniers points épineux pour parvenir à conclure un accord de réduction du programme nucléaire iranien en échange de la levée des sanctions qui étouffent le pays.

La date butoir pour la signature d'un accord définitif, initialement fixée au 30 juin, a été repoussée au 7 juillet.

Dans une déclaration diffusée sur YouTube, le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif déclare que les négociateurs ne sont jamais arrivés aussi près d'un accord, tout en ajoutant que le succès n'est pas garanti.

"J'ai de l'espoir parce que je vois la raison l'emporter sur l'illusion. J'ai le sentiment que mes interlocuteurs reconnaissent que la contrainte et les pressions ne mènent jamais à des solutions durables mais à encore plus de conflit et d'hostilité", dit-il.

"Nous arrivons à la fin", a déclaré pour sa part dans la capitale autrichienne un diplomate occidental qui souligne qu'il n'est pas prévu que les discussions se poursuivent indéfiniment après mardi prochain. "Ou on parvient à un accord, ou on n'y parvient pas", a-t-il dit en soulignant que le processus restait "délicat".

Vendredi soir, Mohammad Javad Zarif et le secrétaire d'Etat américain John Kerry se sont retrouvés pour de nouvelles discussions.

"Nous faisons des progrès", a dit John Kerry avant cette réunion. "Nous avons beaucoup de travail. Il y a des sujets difficiles mais tout le monde fait vraiment des efforts."

ACCÈS AUX SITES

"Je suis d'accord", a déclaré pour sa part le ministre iranien. "Nous nous efforçons tous d'avancer et nous avons réalisé des progrès. Il y a encore des questions délicates à discuter."

Toutes les parties disent qu'un accord est à portée de main. Une séance de négociations de six heures, qui a pris fin vendredi à 03h00 du matin, s'est déroulée entre la sous-secrétaire d'Etat américaine Wendy Sherman et les vice-ministres iraniens des Affaires étrangères Abbas Araqchi et Majid Takhteravanchi, a indiqué un responsable américain.

Selon le négociateur en chef pour la Russie, Sergueï Riabkov, le texte de l'accord est à plus de 90% complet. Le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, s'est dit jeudi persuadé que les parties parviendraient à un accord acceptable par tous.

S'il est conclu, l'accord mettra fin à plus de dix ans de contentieux sur les activités nucléaires de Téhéran, accusé par les Occidentaux de vouloir se doter de l'arme nucléaire, ce que dément la République islamique.

L'accord obligera l'Iran à réduire fortement ses activités d'enrichissement de l'uranium, pendant au moins dix ans, de façon à ce que la communauté internationale soit sûre qu'il lui faudra au moins un an pour produire la quantité d'uranium enrichi nécessaire à la fabrication d'une seule arme. Selon les calculs actuels, la République islamique n'aurait besoin actuellement que de deux à trois mois.

D'après responsables iraniens et occidentaux, un compromis pourrait être en train d'émerger sur un des principaux points de divergence : l'accès aux sites iraniens pour vérifier que l'Iran se conforme bien à ses engagements.

CALENDRIER

Un haut responsable iranien à Vienne a dit jeudi aux journalistes que l'Iran signerait le Protocole additionnel au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP), qui codifie le régime d'inspection de l'AIEA (Agence internationale de l'énergie atomique). Il serait mis en place provisoirement au début d'un accord et, in fine, ratifié par le Parlement iranien.

Le protocole permet aux inspecteurs de l'AIEA un accès accru aux sites qu'ils soupçonnent d'abriter une activité nucléaire suspecte.

La question de la recherche nucléaire effectuée par l'Iran dans le passé (PMD, "possible dimension militaire") est plus difficile.

Le directeur général de l'AIEA, Yukiya Amano, a déclaré vendredi au lendemain d'une visite à Téhéran qu'aucun progrès n'avait été réalisé avec l'Iran et qu'il y avait encore du travail.

Yukiya Amano a été reçu jeudi à Téhéran par le président iranien, Hassan Rohani, et par le secrétaire du Conseil de sécurité nationale suprême de l'Iran, Ali Shamkhani.

Les Occidentaux n'exigent pas des aveux publics de l'Iran par lesquels le pays reconnaîtrait avoir mené des recherches pour la construction d'une ogive nucléaire, expliquent des diplomates. L'AIEA se satisferait de connaître le niveau passé de l'activité de façon à pouvoir établir une base crédible pour ses inspections futures.

Il reste aussi à résoudre le calendrier de levée des sanctions mises en place par les Nations unies, l'Union européenne et les Etats-Unis. L'Iran voudrait la fin des sanctions. Or, les Etats-Unis et l'Union européenne ont plutôt parlé de suspension, de façon à ce qu'elles puissent être réinstaurées en cas de non respect par l'Iran de l'accord.

Le P5+1 comprend les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'Onu (Etats-Unis, France, Chine, Russie et Royaume-Uni) plus l'Allemagne. (Avec Pariza Hafezi, Arshad Mohammed, Shadia Nasralla et William Mclean; Danielle Rouquié et Guy Kerivel pour le service français)