* Pékin ne tolérera aucun défi à son autorité, dit le président chinois

* Xi appelle Hong Kong à soutenir la souveraineté nationale

* Des dizaines de milliers de manifestants sont attendus dans les rues

par James Pomfret et Clare Jim

HONG KONG, 1er juillet (Reuters) - Le président chinois Xi Jinping a procédé samedi à l'investiture de Carrie Lam, la nouvelle cheffe de l'exécutif de Hong Kong qui célèbre le 20e anniversaire de sa rétrocession à la Chine, et mis en garde contre tout défi contre le pouvoir central de Pékin.

Le dirigeant chinois, qui n'était jamais venu à Hong Kong depuis son accession à la tête de l'administration chinoise en 2012, a déclaré que le territoire n'avait jamais bénéficié "d'autant de liberté et de démocratie" que depuis sa restitution, le 1er juillet 1997.

Il a ajouté que le gouvernement central ne modifierait pas le principe "un pays, deux systèmes" qui a régi la rétrocession de 1997, garantissant à la région administrative spéciale de Hong Kong un "haut degré d'autonomie" et des libertés plus étendues qu'en Chine continentale.

Mais il a également souligné que la Chine ne pouvait tolérer le moindre défi à l'autorité du gouvernement central et que trop de conflit nuirait au développement économique de Hong Kong.

"Toute tentative visant à compromettre la souveraineté et la sécurité de la Chine, à défier le pouvoir du gouvernement central et l'autorité de la Loi fondamentale de la région administrative spéciale de Hong Kong ou à se servir de Hong Kong pour mener des activités d'infiltration et de sabotage contre le continent constitue un acte franchissant la ligne rouge et est absolument inadmissible", a-t-il prévenu.

La venue de Xi Jinping intervient à un moment de tension forte entre le pouvoir central et Hong Kong, où le mouvement démocrate dénonce une ingérence accrue de Pékin dans les affaires intérieures du territoire.

La "révolte des parapluies" de 2014, consécutive au refus de Pékin d'octroyer à Hong Kong le suffrage universel direct, a également radicalisé une partie des manifestants qui ont défié pendant 79 jours, parfois violemment, les autorités, et nourri des appels à l'indépendance, un sujet absolument tabou pour Pékin.

Au cours de son discours d'une demi-heure, au cours duquel il a aussi évoqué "l'humiliation et la tristesse" de la première guerre de l'opium, au début des années 1840, qui a conduit à la cession de Hong Kong au Royaume-Uni, Xi Jinping a employé des termes forts qu'il n'avait jusqu'à présent jamais utilisés.

Pour Lau Siu-kai, ancien conseiller gouvernemental de Hong Kong qui s'exprimait à la télévision, "c'est une manière plus franche et plus tranchante de gérer les problèmes".

"Le pouvoir du gouvernement central n'a pas été suffisamment respecté, cela les préoccupe", a-t-il ajouté.

SOUS HAUTE SÉCURITÉ

Des mesures de sécurité draconiennes avaient été mises en place avant la prestation de serment de Carrie Lam, première femme portée à la tête de la "région administrative spéciale". Elle a été désignée en mars dernier par une "commission électorale" de 1.200 personnes noyautée par les loyalistes pro-Pékin.

La cérémonie s'est déroulée dans le vaste centre de convention installé sur la baie Victoria, là même où, voici vingt ans, l'Union Jack avait été abaissé et le drapeau de la République populaire de Chine hissé et où le dernier gouverneur britannique de Hong Kong, Chris Patten, avait restitué à la Chine l'administration du territoire.

"J'agirai fermement, comme je l'ai toujours fait, en accord avec la loi, contre toutes les initiatives qui mineront la souveraineté, la sécurité et les intérêts de développement du pays", a dit Carrie Lam après avoir prêté serment, s'exprimant en mandarin plutôt qu'en cantonais, la langue en usage à Hong Kong et dans le sud de la Chine.

Xi Jinping a laissé entendre pour sa part que le gouvernement central était favorable à une législation de "sécurité nationale" à Hong Kong, un sujet controversé qui avait mobilisé contre lui près d'un demi-million de personnes dans les rues en 2003 et conduit à la démission de Tung Chee-hwa, le premier chef de l'exécutif post-rétrocession.

"Hong Kong, a dit le président chinois, doit améliorer ses méthodes afin de soutenir la souveraineté, la sécurité et les intérêts de développement nationaux. Elle doit améliorer l'éducation et sensibiliser la population à l'histoire et à la culture de la nation chinoise."

Dans la matinée, quelques échauffourées mineures se sont produites entre des militants démocrates et des partisans pro-Pékin. Plusieurs dizaines de démocrates ont été emmenés par la police sous les quolibets des loyalistes.

Prévu vendredi soir, un rassemblement pour l'indépendance a été annulé in extremis, ses organisateurs faisant état d'une trop forte pression policière.

Ils devraient être en revanche plusieurs dizaines de milliers dans les rues pour une marche organisée dans l'après-midi sous le thème "reprendre Hong Kong pour une démocratie pleine et entière".

La journée du 1er juillet, date anniversaire de la rétrocession de Hong Kong à la Chine après 156 ans de présence britannique, donne traditionnellement lieu à des manifestations. Mais elle prend cette année une valeur symbolique toute particulière du fait notamment de la présence de Xi Jinping.

(Henri-Pierre André pour le service français)