Sous la pression du secteur de l'énergie, mis à mal par la chute des cours du pétrole, les analystes n'ont cessé de revoir à la baisse leurs anticipations ces dernières semaines. La dernière estimation donne une baisse moyenne de 2,8% des résultats de sociétés sur les trois premiers mois de l'année.

Dans le compartiment de l'énergie, les résultats sont attendus en baisse de près de 64% par rapport au premier trimestre 2014. Reflétant ces anticipations, l'indice S&P du secteur a baissé de 3,6% en janvier-mars, portant son recul à 22% sur les neuf mois écoulés.

Cette dégringolade a contribué aux performances moyennes de Wall Street depuis le début de l'année, tout comme les indicateurs mitigés qui se sont succédé ces dernières semaines.

La mauvaise série de statistiques macro-économiques a culminé vendredi avec l'annonce de créations d'emplois nettement inférieures aux attentes en mars, au nombre de 126.000 contre 264.000 (révisé) en février. Ce chiffre, le plus faible depuis 2013, met fin à 12 mois consécutifs de créations d'emplois supérieures à 200.000 et renforce l'impression de fragilité de la reprise économique américaine sur fond de hausse de dollar.

Dans ce contexte, la Réserve fédérale pourrait ne pas précipiter une hausse des taux d'intérêt, ce qui en soi est positif pour la Bourse. Mais Daniel Morris, stratège chez TIAA-CREF à New York, juge plus inquiétant le ralentissement de la croissance, également perceptible avec les enquêtes sur l'activité manufacturière ou les chiffres de la consommation.

"Pour nous, le mauvais chiffre des créations d'emplois est plus préoccupant qu'autre chose pour le marché actions", dit-il.

Wall Street, fermée pour cause de Vendredi Saint, devra attendre lundi pour réagir à la statistique mais les futures sur indices ont perdu 1% pendant leur séance écourtée de vendredi.

Pour autant, certains professionnels jugent que les craintes sur les résultats des entreprises ont été exagérées.

Art Hogan, stratège chez Wunderlich Securities à New York, n'exclut pas de bonnes surprises dans le secteur de l'énergie et même du côté des grandes multinationales pénalisées par le dollar fort.

"Le marché a toujours tendance à d'abord intégrer dans les cours les mauvaises nouvelles", rappelle-t-il. "Du coup, les surprises pourraient venir de là où les estimations de résultats ont été les plus revues à la baisse."

RÉSILIENCE

Malgré les inquiétudes sur la saison des résultats et les indicateurs en demi-teinte, Wall Street a fait preuve de résilience depuis le début de l'année. Le S&P-500 a ainsi bouclé jeudi une neuvième semaine consécutive de gains, même si sa hausse n'a été que de 0,4%.

"Les estimations sont en baisse mais c'est déjà dans les cours", confirme Quincy Krosby, chez Prudential Financial à Newark (New Jersey). "Il suffira d'une seule bonne surprise pour qu'on ait des rachats de découvert".

Comme à chaque trimestre, la communication des entreprises sur leurs perspectives - le "guidance" en jargon financier - sera particulièrement suivie. Le fabricant de puces Micron a ainsi déçu mercredi en prédisant un tassement de son chiffre d'affaires sur le trimestre en cours, du fait d'une demande en berne pour ses produits.

Pour les résultats du premier trimestre, plus de 80% des pré-annonces ont été négatives, une proportion bien supérieure à la moyenne, selon les données de Thomson Reuters.

Lors des trimestres précédents, environ 63% des entreprises ont affiché des résultats supérieurs aux estimations et 20% ont fait moins bien qu'attendu.

Mais la barre placée bien bas cette fois-ci laisse de la marge pour un rebond, veut croire Art Hogan. "Le marché s'est efforcé d'intégrer toutes les mauvaises nouvelles macro-économiques et les déceptions attendues sur les résultats", dit-il. "Peut-être bien qu'on a sous-estimé les éléments positifs."

Comme à chaque trimestre, c'est le producteur d'aluminium Alcoa qui ouvrira le bal des publications, mercredi.

(Véronique Tison pour le service français)

par Rodrigo Campos

Valeurs citées dans l'article : Alcoa Inc, Micron Technology, Inc.