"Le 20 mars dernier des représentants du Parlement européen et des Etats membres de la zone euro sont parvenus à un accord concernant le volet résolution de l’union bancaire. Quel regard portez-vous sur cet accord ?
Par cet accord, des réponses ont été apportées sur ce qu’il y a lieu de faire si une banque rencontre des difficultés importantes qui menacent sa survie sans devoir nécessairement passer par l’Etat membre concerné pour procéder à une opération de renflouement. C'est ce changement de logique qui est important. L'accord permet de le mettre en place.


Les éléments constitutifs d’une union bancaire sont à présent réunis pour atténuer la dépendance forte entre les banques et les Etats.
Cette union bancaire fait partie des dispositifs successifs mis en place par les responsables de la zone euro- avec le Mécanisme européen de stabilité, le Traité de gouvernance, l’OMT (Outright Monetary Transactions) - en vue d’améliorer l’autonomie de fonctionnement de l’union monétaire, la gestion des situations délicates en son sein, et de restaurer la confiance à son égard.

Certains ont critiqué le fait que le processus de décision était trop compliqué et trop lent ?

Dans le cas où les montants sont inférieurs à 5 milliards d’euros, le processus peut être assez rapide dans la mesure où il n’y a pas besoin de convoquer une commission plénière.
Il n’est pas illogique que des banques de plus grande envergure, de nature systémique, nécessitent un processus plus complexe et plus long.

Il est également critiqué la faiblesse de la dotation du fonds de résolution, censé être créé dans un délai de 8 ans par le biais de dotations des banques de la zone euro ?

Le fonds devrait être doté de 55 milliards d’euros. Ce n’est évidemment pas suffisant.
Ceci étant, l’idée est d’éviter au maximum que ce fonds de résolution ne soit pas utilisé en dernier recours.
De nombreux remparts ont été construits ces dernières années sur le plan prudentiel pour que le risque de voir les grandes institutions dans un état fortement fragilisé soit limité.

Indépendamment de tous les pare-feux que l’on a mis en place, une autre manière de relativiser la petite taille de ce fonds réside dans l’implication des créanciers dans les pertes subies par les banques.
L’endossement des créanciers d’une partie des dégâts engendrés par la mise à mal de la banque réduira d’autant plus les coûts d’un éventuel défaut pour les contribuables.

Quelle vision avez-vous sur la mutualisation des encours de ce fonds ?

40% des encours du fonds seront mutualisés au cours de la première année et 60% à l’issue des deux années suivantes. Ainsi une bonne partie du fonds sera un pot commun. In fine les encours du fonds seront totalement mutualisés. L'objectif de mutualisation progressive est essentiel car derrière la mise en place de l'union bancaire c'est le marché bancaire unique qui se met en place et cela ne peut fonctionner qu'avec une garantie qui s'applique à toutes les banques sans distinction.

Le fonds ne pourra cependant pas s’appuyer sur garantie commune des Etats membres ou sur le Mécanisme européen de stabilité pour pouvoir emprunter sur le marché ?
C’est une anomalie qui peut être source d’ennuis. Mais c'est aussi un moyen de responsabiliser l'ensemble du système bancaire pour faire face à ses éventuelles déséquilibres.

L’accord doit à présent être validé par un vote du Parlement et une ratification des Etats membres. Alimentez-vous une quelconque appréhension à ce sujet ?
Les négociations ont été suffisamment fortes et tendues pour que le texte soit validé par les députés au Parlement.
On ne peut pas exclure une levée de bouclier de la part de certaines autorités allemandes, à l’instar de ce qui s’est déroulé pour le MES ou l’OMT.

Est-ce que l’ensemble de ces lacunes ne mettent pas en doute la solidité de l’union bancaire ?

Il est illusoire de penser que l’on aurait eu de suite un calibrage parfait de cette union bancaire. On peut espérer que les lacunes et les points d’interrogation vont être réglés et éclaircis avec le temps grâce à une certaine dynamique. Comme dans toute construction juridique, il y aura de la jurisprudence. Les lignes de contours vont être précisées en fonction des contraintes auxquelles cette union bancaire devra faire face.

Partir du principe que tant que cela n’est pas parfait, alors on ne met pas en place, est la meilleure manière de ne rien faire. Lorsque l’on regarde ce qu’est la BCE aujourd’hui par rapport à ce qu’elle était il y a dix ans, une nette évolution peut être relevée. Le mode de réflexion et les interventions ne sont pas identiques.
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