* Jusqu'à quatre ans pour augmenter le matelas de fonds propres

* Un montant minimal de dette facilement dépréciable

* Le Brexit pourrait contraindre les banques à émettre de nouveaux titres

par Francesco Guarascio

22 novembre (Reuters) - Les régulateurs européens ont déclaré mercredi donner jusqu'à quatre ans aux grandes banques de la zone euro pour augmenter une nouvelle fois leur matelas de fonds propres, une décision susceptible d'alourdir leurs coûts de financement.

Pour se conformer aux objectifs fixés, les banques devront également émettre un montant minimal de dette facilement dépréciable. Parallèlement, les obligations régies par le droit britannique pourraient devoir être remplacées par de nouveaux titres, une fois la sortie de la Grande-Bretagne de l'UE effective. Ces deux conditions devraient peser sur les coûts de financement des banques.

Le Conseil de résolution unique (CRU), l'organisme de l'Union européenne (UE) chargé de procéder à la liquidation ordonnée des établissements faillis et de fixer les seuils de capital, a déclaré qu'il fixerait pour la première fois "des objectifs contraignants pour la plupart des grandes banques" de la zone euro. Ces objectifs devront être atteints dans quatre ans au plus, a-t-il ajouté confirmant une information rapportée mardi par Reuters.

Dans le cadre des nouvelles règles destinées à limiter la facture éventuelle pour les contribuables en cas de crise bancaire, il a été recommandé l'année dernière aux banques de la zone euro d'émettre suffisamment de dette qui serait dépréciée pour absorber les pertes en cas de dépôt de bilan. Ces recommandations vont désormais devenir obligatoires pour certaines d'entre elles.

Le CRU n'a pas révélé les noms et le nombre des établissements qui seront soumis à ces objectifs contraignants, mais une source proche de l'organisme a dit à Reuters que 35 à 40 banques étaient concernées.

Le montant de fonds propres supplémentaires qui devra être mis de côté sera décidé pour chaque banque dans les semaines ou les mois à venir, ont dit des responsables.

Le CRU estime à 117 milliards d'euros les fonds manquants sur un ensemble de 76 banques. L'année dernière, il avait établi ce manque à 112 milliards d'euros, mais l'échantillon d'établissements pris en compte était différent.

L'Autorité bancaire européenne (ABE) a évoqué un montant compris entre 186 et 276 milliards d'euros pour 133 banques et s'est inquiétée de la capacité du marché à absorber un tel montant de dettes.

Cette vague de nouvelles émissions va probablement contraindre les banques à verser des intérêts plus élevés sur leur dette. Trouver des créanciers peut également s'avérer difficile, les petits investisseurs ayant vu leur épargne fondre lors des sauvetages de certaines banques en Italie ou au Portugal.

Un responsable bancaire a estimé qu'il faudrait plus de quatre ans à certaines banques pour parvenir aux niveaux de fonds requis. Un autre a toutefois fait remarquer que cette mesure était largement attendue.

LE CASSE-TÊTE BRITANNIQUE

Le CRU, qui assure la supervision de 142 banques, a précisé que les établissements plus petits seraient pour l'instant dispensés d'objectifs contraignants.

Les grandes banques de la zone euro, considérées comme étant d'importance systémique, doivent déjà atteindre les objectifs de fonds propres d'ici 2019, conformément aux règles internationales.

Certaines banques ont déjà atteint leurs objectifs, a dit une source proche du CRU à Reuters. D'autres auront besoin de moins de quatre ans et seules celles dont les manques de fonds sont les plus importants auront besoin de quatre années pleines.

Les coûts de financement devraient augmenter pour ces banques en raison également du type de dette qu'elles doivent émettre. Le régulateur a décidé qu'elles devront ainsi détenir au moins 12% de "dette subordonnée", plus aisément dépréciable que de la dette prioritaire. La dette subordonnée revient plus chère aux banques car le souscripteur court un plus grand risque.

La décision du Royaume-Uni de quitter l'Union européenne pourrait également s'avérer problématique de ce point de vue.

En l'absence d'un accord sur le Brexit, les banques de la zone euro pourraient être confrontées au fait que les obligations régies par le droit britannique pourraient ne plus être prises en compte, ce qui les forcerait à emprunter davantage pour répondre aux objectifs de la CRU. (Catherine Mallebay-Vacqueur pour le service français, édité par Marc Joanny)