PARIS (Agefi-Dow Jones)--Implicitement, la nouvelle offre de Safran sur Zodiac légitime les exigences de TCI. Consultation des actionnaires, dilution potentielle, gouvernance, fiscalité… La structure dévoilée mercredi par les deux équipementiers aéronautiques répond quasiment point pour point aux critiques formulées par le fonds activiste britannique dès l'annonce du projet de rapprochement en janvier. Dans une lettre adressée jeudi à Ross McInnes, le président du conseil d'administration de Safran, Chris Hohn, le fondateur de TCI, reconnait ainsi les "aspects positifs" de ce nouveau projet.

La "transaction est désormais structurée comme une seule offre", souligne Chris Hohn, ce qui évite les différences de traitement entre les actionnaires. La première mouture prévoyait une OPA de Safran sur Zodiac puis, dans un second temps, une fusion. Dans ce cas, fustigeait TCI, les actionnaires de Safran, qui se voyaient pourtant embarqués dans un projet de plus de 9 milliards d'euros, n'avaient pas leur mot à dire. La nouvelle proposition prévoit une seule offre mixte, mêlant numéraire (à 25 euros par action Zodiac contre 29,5 euros initialement) et titres. Cela nécessitera donc pour Safran de faire voter lors de l'assemblée générale du 15 juin des résolutions permettant la création de ces nouveaux titres. Les actionnaires auront ainsi la possibilité de voter pour ou contre le projet.

Autre geste de Safran: pour supprimer la dilution créée par l'émission des nouvelles actions à destination des actionnaires de Zodiac, le fabricant de moteurs d'avions engagera un programme de rachats d'actions de 2,3 milliards d'euros sur deux ans. L'ancien projet aurait entraîné la création de 68 millions d'actions, rappelle TCI. Avec le nouveau système, la transaction s'apparente à une "offre tout en cash, comme nous le suggérions", apprécie Chris Hohn.

Les bonus de Safran conditionnés à la réussite du projet

Le fonds est d'autant plus rassuré que le ratio d'échange de l'offre en actions a été abaissé de 38%, à 0,3 action Safran par titre Zodiac apporté. Cela valorise implicitement l'action Safran à 84 euros, "ce qui est plus proche de la valeur équitable" du groupe. "Cela aurait été une énorme erreur d'émettre des actions Safran à 62 euros comme proposé initialement", appuie TCI. Résultat, avec cette structure, le coût total de l'opération pour Safran a été réduit de 26%, de 9,5 à 7 milliards d'euros, souffle TCI. Jeudi, le cours de l'action Safran a gagné 3,1% après avoir été suspendue mercredi. Zodiac a pour sa part pris 0,61% à 23,10 euros. Dans les premiers échanges vendredi matin, Safran poursuivait sa progression, s'adjugeant 0,5% alors que le SBF 120 perdait 0,3%.

Pour autant, malgré ces avancées, le fonds prévient qu'il ne votera pas, en l'état, en faveur du projet. Il juge encore trop élevé le prix payé par Safran au regard des difficultés opérationnelles de Zodiac et des objectifs de synergies jugés "extrêmement ambitieux". Le fonds, qui détient un peu plus de 4% du capital de Safran, demande que la rémunération des 10 à 20 dirigeants en charge de l'intégration de Zodiac, dont le directeur général de Safran, soit liée à l'atteinte des synergies: leurs bonus seraient réduits de moitié et remplacés par une enveloppe globale de 50 millions d'euros qui serait distribuée en fonction du résultat opérationnel de Zodiac en 2020.

"Ce schéma serait transparent, quantifiable et public" et "permettrait de montrer aux actionnaires votre confiance et votre engagement à faire de l'acquisition de Zodiac un succès", explique TCI dans sa lettre à Ross McInnes. Le fonds soutiendra ainsi l'offre "seulement" si Safran s'engage clairement avant l'AG à mettre en place un tel plan d'intéressement.

-Olivier Pinaud, L'Agefi. ed: ECH

L'Agefi est propriétaire de l'agence Agefi-Dow Jones