par Marton Dunai

BUDAPEST, 10 avril (Reuters) - Les Hongrois se sont rassemblés dimanche pour soutenir une des premières universités internationales du pays, menacée par un projet de loi du gouvernement, dans des manifestations d'une ampleur rare depuis l'investiture de Viktor Orban il y a sept ans.

L'Université d'Europe centrale (CEU), fondée en 1991 par le financier américain d'origine hongroise George Soros, pourrait se voir forcée de quitter la Hongrie après l'adoption au Parlement d'un projet de loi qui impose des restrictions aux établissements d'enseignement internationaux.

Selon des observateurs, la mesure promue par le parti Fidesz du Premier ministre vise en particulier l'université anglophone, créée notamment pour étudier la transition démocratique et libérale des pays de l'ex-bloc de l'Est.

Le Premier ministre hongrois Viktor Orban a accusé vendredi l'université de Budapest d'avoir "triché" dans l'attribution de ses diplômes et enfreint la loi hongroise.

Viktor Orban a ajouté que l'avenir de l'Université d'Europe centrale était désormais lié à des discussions entre son gouvernement et les Etats-Unis.

Le Premier ministre conservateur, connu pour ses position anti-immigration et sa défense d'un État "illibéral", s'est montré très critique de Georges Soros dans le passé.

Des centaines d'universitaires internationaux, ainsi que les Etats-Unis et l'Union européenne, se sont élevés contre le projet de loi.

DÉCISION DU PRÉSIDENT LUNDI

Dimanche, les organisateurs du rassemblement ont comptabilisé une foule de 70.000 personnes à Budapest. Les manifestants ont passé un pont au dessus du Danube avant de remplir la place devant le Parlement, où une forte présence policière avait été dépêchée.

Des milliers de personnes, pour la plupart des étudiants, sont restées après la fin du rassemblement, avant de se diriger vers le secrétariat de l'Education, puis vers le siège du parti Fidesz, où ils ont chanté des slogans contre le parti. En rangs plus réduits, ils ont bloqué dans la soirée la place Oktogon, grande intersection du centre de Budapest.

La manifestation a été largement pacifique.

Le projet de loi sera soumis lundi au président hongrois, Janos Ader, qui pourra choisir de le signer, de le renvoyer au Parlement ou le soumettre à la Cour constitutionnelle.

Les manifestants disaient vouloir convaincre Ader de rejeter le texte, et de le soumettre à l'examen de la Cour.

"Que voulons-nous qu'Ader fasse ? VETO", chantaient-ils. "Université libre, pays libre!"

"Le gouvernement veut réduire au silence tous ceux qui ne pensent pas comme eux, qui pensent librement, qui peuvent être libéraux ou de gauche", a dit à Reuters un des organisateurs de la manifestation, Kornel Klopfstein, doctorant à l'université allemande de Bielefeld.

Selon le recteur de la CEU, Michael Ignatieff, qui s'est rendu à Washington pour alerter sur sa possible fermeture, le département d'Etat américain va envoyer une délégation à Budapest la semaine prochaine pour discuter de la crise.

(Julie Carriat pour le service français)