Une enquête diligentée par l'organisme en charge de la Bourse européenne des échanges de droits d'émission a montré que Lakshmi Mittal allait probablement pouvoir gagner la somme faramineuse d'un milliard de livres sterlings avec les droits d'émission détenus par ArcelorMittal.

Pour ses usines sidérurgiques européennes, le milliardaire indien a obtenu un droit d'émission total de 90 millions de tonnes de CO2 par an sur la période 2008-2012. Or, grâce à la crise économique qui a réduit sa production - et peut-être aussi grâce à une estimation très approximative de ses besoins par les autorités européennes - le groupe n'a émis en 2008 que 68 millions de tonnes. Et cette année, les effluves indésirables d'ArcelorMittal devraient se limiter à 43 millions de tonnes.

Jackpot !
Vous l'avez compris, l'ami Lakshmi peut vendre sur le marché son excès de droits d'émission. Last but not least, souhaitant durcir la législation environnementale, la Commission de Bruxelles se prépare à faire passer le prix des droits d'émission de 12,70 à 30 livres sterlings l'unité...

Mais l'enquête est encore riche de révélations assez savoureuses. Lakshmi Mittal, épaulé par le syndicat professionnel des industries sidérurgiques européennes, Eurofer, a exercé un intense travail de lobbying auprès des fonctionnaires bruxellois. L'enquête présente deux lettres de Lakshmi Mittal, datées de 2006 et 2007, où il demande à rencontrer instamment le commissaire à l'Industrie, Günter Verheugen.

Anna Pearson, qui a réalisé cette enquête, est obligée d'admettre, sur le site du Business Times (07/12), que la Bourse des droits d'émission à failli : les niveaux d'émissions accordés aux entreprises ont été surévalués et trop de permis ont été distribués.

En définitive, déplore-t-elle, ArcelorMittal « a transformé le système des droits d'émission en une technique pour obtenir des subventions gratuites ». De quoi donner de l'eau au moulin de ceux qui estiment que la Bourse du CO2 a surtout été un joli cadeau aux entreprises...

Revendus pour un milliard, achetés pour rien !
Mittal assure de son côté qu'il n'y avait aucun plan. Le ralentissement économique explique la baisse de production et le surplus de droit d'émission. D'ailleurs, le groupe affirme que les droits surnuméraires ne seront pas vendus sur le marché mais conservés et utilisés ultérieurement, quand les marchés sidérurgiques auront retrouvé de la vigueur.

Un dernier fait donne peut-être encore un peu plus de sel à l'affaire. Certains des droits détenus par Mittal ont été obtenus. En février 2008, ArcelorMittal obtenait du gouvernement belge qu'il lui paie ses droits d'émission pour l'usine que le groupe allait implanter près de Liège. (Cf. le journal belge Le Soir février 2008).

Que dit l'Europe ? Anna Pearson invite Lakshmi Mittal à réaliser un acte « exemplaire » et « philanthropique » en détruisant ses droits d'émission en surplus. La planète s'épargnera quelques millions de tonnes de fumées noires et personne n'aura dévoyé le système.

L'Europe peut bien émettre quelques vœux pieux...