La victoire du "Leave" au référendum britannique amène les dirigeants d'entreprises à évaluer les conséquences de ce scrutin à court et long terme, alors qu'ils assistent vendredi à la chute de la livre et de leurs propres actions en Bourse. Certaines multinationales, comme le groupe européen d'aéronautique et de défense Airbus Group (>> Airbus Group), qui construit ses ailes d'avions en Grande-Bretagne, ont prévenu qu'ils réexamineraient leurs activités outre-Manche.

"C'est un résultat perdant-perdant à la fois pour le Royaume-Uni et l'Europe", a déclaré vendredi le président exécutif d'Airbus Group, Tom Enders. "Bien sûr nous réexaminerons notre stratégie d'investissement au Royaume-Uni, comme tout le monde", a prévenu le responsable. Le titre perdait plus de 7% vendredi à la mi-séance. Tom Enders a également affirmé qu'il espérait "que le divorce se fasse avec une volonté de minimiser les dégâts économiques infligés à tous ceux qui seront touchés par le Brexit".

"Un chamboulement"

Le constructeur automobile allemand BMW (>> Bayerische Motoren Werke AG) a annoncé vendredi qu'il ne procéderait à aucun changement pour l'instant dans ses usines Rolls-Royce et Mini situées au Royaume-Uni, mais il a souligné que les "conditions d'approvisionnement du marché européen devraient être renégociées". L'action BMW dévissait de plus de 9% à la mi-séance à Francfort.

D'autres dirigeants n'ont pas mâché leurs mots. "C'est un chamboulement", a déclaré Chris Hirst, directeur des activités d'Havas (>> Havas) en Europe et au Royaume-Uni, sur une chaîne de télévision à Londres. 'Tout le monde tente de rester professionnel mais c'est un choc, mêlé à de la stupeur et de l'incrédulité", a-t-il souligné. L'action Havas perdait 4,5% vendredi.

La plupart des grandes entreprises, qu'elles soient basées au Royaume-Uni, ailleurs en Europe ou même en Asie ou aux Etats-Unis, avaient prévenu qu'un Brexit engendrerait des incertitudes qui pénaliseraient les bénéfices et mettraient l'emploi en danger: le Royaume-Uni sera peut-être obligé de renégocier des accords commerciaux, avec chaque pays, afin de maintenir les droits actuels sur les exportations et les importations. La libre circulation des personnes travaillant au Royaume-Uni et dans l'Union européenne pourrait être affaiblie. Et si le résultat du référendum provoque des turbulences sur les marchés à long terme, la croissance économique et les résultats des entreprises pourraient en pâtir pendant plusieurs années.

La livre sterling surveillée

A court terme, la volatilité de la livre sterling constitue le principal risque pour bon nombre d'entreprises, petites et grandes. Pierre-Emmanuel Taittinger, président du producteur de champagne rémois, s'est levé aux aurores pour les résultats définitifs. Avec la forte baisse de la livre vendredi, son vin est soudain devenu plus cher pour les acheteurs britanniques - son premier marché. Pierre-Emmanuel Taittinger a affirmé qu'il accorderait des réductions à son distributeur britannique à la fin de l'année à titre de compensation. "Je l'ai déjà appelé, a-t-il déclaré. "Je lui ai dit que rien ne changerait entre nous".

Groupe PSA (PSA.FR) étudie différents scénarios de réajustement des tarifs de vente des modèles de ses marques afin de "réagir vite aux réactions des marchés", a indiqué le constructeur automobile vendredi. PSA a vendu plus de 85.000 véhicules sous l'ensemble de ses marques au Royaume-Uni au cours des cinq premiers mois de 2016, soit environ 13% de ses ventes totales en Europe occidentale à cette période, selon les chiffres fournis par les associations européenne et britannique de constructeurs automobiles. PSA pourrait décider d'augmenter ses prix au Royaume-Uni pour prendre en compte l'affaiblissement de la livre sterling, ou de subir une perte sur la vente de certains véhicules pour protéger ses parts de marché.

PSA a refusé de fournir des indications chiffrées sur le coût potentiel du Brexit pour son activité. "Il est trop tôt pour en mesurer l'impact réel", a observé le constructeur automobile dans un communiqué. Il a ajouté que le groupe avait "démontré son savoir-faire pour gérer avec succès son business dans des contextes de forte volatilité des monnaies, comme en Argentine". Vers 13h20, le titre PSA perdait 15,9% à 12,03 euros.

-Robert Wall et Saabira Chaudhuri, Dow Jones Newswires

(Sam Schechner et William Boston ont contribué à cet article.)

(Version française Aurélie Henri et Céline Fabre) ed : LBO

Valeurs citées dans l'article : Airbus Group, Havas, Bayerische Motoren Werke AG