PARIS, 12 juin (Reuters) - La garde à vue de trois nouveaux suspects d'abus de faiblesse sur l'héritière de L'Oréal Liliane Bettencourt a été prolongée mardi à la brigade financière de Paris en vue d'une possible présentation à des juges de Bordeaux, a-t-on appris de source policière.

L'ancien mandataire et avocat de Liliane Bettencourt Pascal Wilhelm, son ancien infirmier Alain Thurin et le dirigeant d'une entreprise de jeux en ligne, Stéphane Courbit, sont interrogés sur un investissement de 143 millions d'euros consenti en 2011 par la milliardaire et qui pourrait constituer un abus.

La police enquête également sur plusieurs millions d'euros qui auraient été donnés à l'infirmier et sur la modification du testament de la milliardaire qui confiait la gestion de centaines de millions d'euros en assurances-vie à Me Wilhelm jusqu'à ce que ses petits-fils atteignent la quarantaine.

La garde a vue peut légalement durer jusqu'à mercredi matin, après quoi les suspects seront soit libérés sans aucune charge, soit présentés aux trois juges d'instruction de Bordeaux chargés de l'affaire en vue d'une mise en examen.

Me Pascal Wilhelm a brièvement géré en 2011 les intérêts de Liliane Bettencourt, au bénéfice d'un mandat de protection révoqué en octobre par la justice. Elle a ordonné le placement sous tutelle de la milliardaire, qui souffre de démence depuis 2006 au moins, selon une expertise. (voir )

Selon une déposition devant le juge des tutelles de juillet 2011 publiée par Le Monde, Liliane Bettencourt a dit ne pas se souvenir de cet investissement, ne pas savoir ce qu'étaient les jeux en ligne et ne pas connaître Stéphane Courbit, qui est un proche de Me Wilhelm.

La titulaire de la 15e fortune mondiale, selon le classement de Forbes, précise : "Je n'ai pas de grosse somme d'argent à investir". Elle dit à propos de Me Wilhelm et des 143 millions : "Si c'est Pascal qui l'a fait, c'est sérieux et je n'ai aucune inquiétude".

Lors d'une autre déposition de février 2012 sur le testament modifié, Liliane Bettencourt ne se souvient plus qui est Me Wilhelm et dit n'avoir rien demandé : "C'est qui Wilhelm ? Mais qu'est-ce qui lui a pris ?".

Après la découverte de cet épisode, un remboursement des 143 millions d'euros avait été annoncé mais il n'est pas effectif à ce jour, a admis Stéphane Courbit dans un entretien aux Echos en avril où il précisait que "120 millions (avaient) d'ores et déjà été utilisés". Son groupe, en grande difficulté, semble avoir été renfloué par cette opération.

Les magistrats conduisent depuis fin 2010 cette enquête qui a débouché sur des poursuites contre des membres de l'entourage de la milliardaire de 89 ans et sur une autre piste politique susceptible de conduire à Nicolas Sarkozy. (Thierry Lévêque, édité par Patrick Vignal)