Total a annoncé mercredi qu'il comptait accélérer sa diversification dans l'électricité et les énergies renouvelables et a revu à la hausse ses ambitions en la matière, le groupe anticipant une baisse de ses ventes de produits pétroliers de près de 30% au cours de la prochaine décennie.

Alors qu'il a l'ambition de faire partie à long terme des cinq plus grands producteurs mondiaux d'énergies renouvelables, Total a précisé à l'occasion d'une présentation de sa stratégie aux investisseurs qu'il visait désormais dans ce secteur 35 gigawatts (GW) de capacités en 2025 (70% déjà en portefeuille), contre 25 GW précédemment, avec l'ambition d'une croissance de 10 GW par an au-delà, comme en 2020.

Les investissements du groupe dans les renouvelables et l'électricité augmenteront ainsi progressivement, passant de 2 à 3 milliards de dollars par an, et devraient représenter plus de 20% de ses investissements nets en 2030.

"Diversifier nos activités (...) améliore la résilience du groupe et compense la volatilité des prix du pétrole", a souligné son PDG, Patrick Pouyanné.

Le patron de Total a ajouté que le groupe visait un retour sur investissement supérieur à 10% dans les renouvelables, à comparer avec un niveau de 6 à 8% pour d'autres acteurs du secteur bien établis, un objectif qu'il pense atteindre en cédant une partie de ses projets à des partenaires.

Au cours de la prochaine décennie, Total prévoit d'augmenter sa production d'énergie d'un tiers, d'environ 3 à 4 millions de barils équivalent pétrole par jour (Mbep/j). Cette croissance proviendra pour moitié du gaz naturel liquéfié (GNL) et pour moitié de l'électricité, principalement à partir de renouvelables.

Alors que la crise du coronavirus a plombé ces derniers mois la demande mondiale de pétrole ainsi que les prix du baril, Total estime que ses ventes en 2030 seront composées à 35% de produits pétroliers et de biocarburants (contre 55% en 2019), à 50% de gaz (40% en 2019) et à 15% d'électricité (5% en 2019), essentiellement renouvelable.

DOUBLEMENT ATTENDU DES VENTES DE GNL ENTRE 2020 ET 2030

Développant un modèle intégré allant de la production d'électricité jusqu'à la vente aux clients résidentiels et commerciaux, en passant par le stockage et le négoce, Total vise une production nette de 50 térawatts-heure (TWh) et des ventes de 80 TWh à 9 millions de clients d'ici 2025, contre environ six millions aujourd'hui en France, Belgique et Espagne.

Ses ventes de GNL sont attendues à 50 millions de tonnes par an d'ici 2025 et doubleront entre 2020 et 2030. Le cash-flow de l'activité intégrée de GNL augmentera dans le même temps de 40%, à plus de 4 milliards de dollars en 2025, dans un environnement à 50 dollars par baril.

Total a en outre annoncé qu'il comptait accélérer ses réductions de coûts et qu'il visait désormais en la matière un niveau de deux milliards d'ici 2023 par rapport à 2019, au lieu d'un milliard en 2020 précédemment.

En matière d'investissements, il table sur un montant compris entre 13 et 16 milliards de dollars par an sur la période 2022-2025 pour un prix du pétrole qui s'établirait entre 50 et 60 dollars par baril.

"Compte tenu de l'incertitude à court terme et du contexte de prix bas", ses investissements nets pour 2021 devraient être inférieurs à 12 milliards de dollars, tout en étant maintenus autour de deux milliards dans "l'électricité bas carbone".

LE DIVIDENDE RESTE "SOUTENABLE" À 40 DOLLARS PAR BARIL

Total veut aussi continuer à se concentrer sur les productions pétrolières à bas coût, en privilégiant la valeur au volume, et développe un portefeuille de projets ayant tous une rentabilité supérieure à 15% à 50 dollars par baril.

Son conseil d'administration a en outre "réaffirmé sa confiance dans les fondamentaux du groupe et confirmé que le dividende est soutenable à 40 dollars par baril", Total ayant choisi de ne pas réduire son dividende malgré l'impact du coronavirus, contrairement à certains de ses rivaux.

"Au-delà des investissements et du service du dividende, priorité sera donnée, en termes d'allocation du cash-flow, à l'abaissement du taux d'endettement sous les 20%."

Total, tout en augmentant sa production pétrolière et gazière d'environ 2% par an entre 2019 et 2025, principalement entre 2022 et 2025, a aussi confirmé viser une croissance de son cash-flow de 5 milliards de dollars d'ici 2025 et une rentabilité de ses capitaux propres supérieure à 10% dans un environnement à 50 dollars par baril.

Le groupe a aussi annoncé qu'il visait une réduction de l'intensité carbone moyenne des produits énergétiques vendus à ses clients au niveau mondial de 15% en 2030, 35% en 2040 et 60% au moins en 2050 par rapport à 2015.

(Benjamin Mallet et Sarah White, avec Shadia Nasralla et Ron Bousso à Londres, édité par Jean-Michel Bélot)