Zurich (awp) - Holcim se défend, après un article publié par l'ONG PublicEye mettant en cause le géant des matériaux de construction. Le groupe réfute la pollution de l'air qu'engendrerait sa cimenterie de Beocin, dans le nord de la Serbie.

Cette enquête du journaliste Milorad Ivanovic révèle que la cimenterie serbe, rachetée en 2002 par le groupe français Lafarge avant de rejoindre le réseau d'Holcim, fait fonctionner ses fours avec du coke de pétrole. "Moins cher que le gaz naturel mais bien plus sale, ce déchet de raffinerie produit de grandes quantités de microparticules, de dioxyde de soufre et de suie", selon le document qui a obtenu le Prix d'investigation de PublicEye, qui l'a publié sur son site.

La cimenterie élimine aussi depuis 2011 tous les déchets ménagers de la commune de Beocin et a également reçu l'autorisation d'incinérer des déchets médicaux, des pneus de voiture et des plastiques en 2018, en étant subventionné par l'Etat, d'après l'enquête jugée "trompeuse avec de nombreuses erreurs factuelles", a dénoncé un porte-parole d'Holcim, sollicité par AWP vendredi. Le journaliste fait aussi état d'un nombre possible de cancers en hausse dans la ville, située près du Danube.

En conformité

L'usine fonctionne "dans le respect total des exigences légales et environnementales de la Serbie, qui sont conformes aux normes européennes et suisses". Le communicant ajoute que depuis 2002, 150 millions d'euros (environ 164 millions de francs suisses au cours actuel) ont été investis, notamment dans des filtres à poussière, ainsi que dans des installations de four et de refroidissement. "Nous sommes en train de remplacer un de nos filtres qui arrive en fin de cycle et ce sera effectif fin 2021".

L'article du journaliste serbe fait état d'analyses menées par l'Agence environnementale du pays, portant sur une période du 31 août au 21 novembre 2019. "En septembre, les émissions de chlorure d'hydrogène (HCI) ont dépassé de 200% la limite autorisée à 62 reprises. En octobre, outre le chlorure d'hydrogène, l'usine a émis 847 fois du dioxyde de soufre (SO2), de l'ammoniac (NH3) et de l'oxyde d'azote (NHx) dans des concentrations deux fois plus élevées que les limites autorisées. En novembre, ces valeurs étaient même encore légèrement plus hautes", écrit-il.

En réponse, Holcim explique avoir connu "des dépassements marginaux exceptionnels en matière d'émissions", liés à un problème de continuité d'équipement, résolu en 2019. "Nous fonctionnons en toute conformité depuis lors". Selon des sources citées dans l'enquête, lors des mesures d'émissions, la cimenterie "peut choisir librement le laboratoire qui prélève et analyse les échantillons ainsi que le moment où ces tests sont réalisés".

Holcim rétorque que les inspections des autorités, qui ont lieu chaque année, se déroulent "quand l'usine fonctionne à pleine capacité". La dernière inspection remontant à il y a deux semaines témoigne, selon le porte-parole, de "la totale conformité avec toutes les exigences environnementales".

Le géant mondial du ciment s'est engagé en septembre dernier dans la "Business Ambition 1,5°C", pour limiter les émissions de CO2. Parmi ses objectifs 2030 se trouve celui de passer à 475 kilos de CO2 par tonne de matériau cimentaire ainsi que celui de recycler 100 millions de tonnes de déchets et de sous-produits pour produire de l'énergie et des matières premières.

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