PARIS (Agefi-Dow Jones)--Le spécialiste des services d'assistance numérique Solutions 30 a indiqué dimanche les raisons pour lesquelles son réviseur d'entreprise, le cabinet d'audit EY Luxembourg, chargé de contrôler et de commenter la comptabilité du groupe, n'avait pas été en mesure de rendre d'opinion sur ses comptes consolidés de l'exercice 2020.

"Nous n'avons pas pu recueillir des éléments probants suffisants et appropriés justifiant la nature, la substance, la valeur et la conformité avec les lois et règlements de certaines transactions réalisées par le groupe et déterminer si ces transactions ont été conclues avec des parties liées y compris les membres de la direction", a expliqué EY Luxembourg dans un rapport que Solutions 30 a dit avoir reçu au cours du week-end et a mis en ligne dimanche.

Le cabinet d'audit précise que "le groupe n'a pas donné suite à [ses] demandes de diligences complémentaires en lien avec les travaux d'investigation diligentés par le conseil de surveillance".

Selon EY Luxembourg, "les incidences éventuelles sur les états financiers consolidés d'anomalies non détectées pourraient être à la fois significatives et avoir un caractère diffus. Par conséquent, nous n'avons pas été en mesure de déterminer si des ajustements significatifs auraient pu, le cas échéant, s'avérer nécessaires sur les états financiers consolidés du groupe au 31 décembre 2020".

Vendredi, les dirigeants de Solutions 30 avaient déclaré ne pas connaître les raisons de la décision d'EY Luxembourg, qui leur avait été signifiée la veille. EY Luxembourg avait répondu quelques heures plus tard "que les déclarations contenues dans le communiqué de Solutions 30" reflétaient "les affirmations de la société, et non celles d'EY".

Muddy Waters se range du côté d'EY

Dans le communiqué envoyé dimanche, Solutions 30 s'est dit "en profond désaccord avec les fondements exprimés par EY", assurant que "ses équipes ont répondu avec diligence aux demandes de documents et d'information du réviseur d'entreprises et ont communiqué l'intégralité des éléments dont dispose le groupe". L'ex PC30 a rappelé que les honoraires du réviseur d'entreprises, d'un montant de 2,4 millions d'euros, avaient augmenté de plus de 30% par rapport à 2019, année de transition aux normes IFRS qui avait nécessité un audit d'EY Luxembourg.

Solutions 30 a ajouté que la note 17 des comptes consolidés 2020 faisait l'inventaire de toutes les transactions liées et que "celles-ci ont toutes été réalisées à des conditions normales de marché". Ces transactions liées, réalisées avec des dirigeants ou membres du conseil de surveillance du groupe, faisaient partie des critiques émises par Muddy Waters, le fonds activiste américain, qui a initié une position de vente à découvert sur Solutions 30 en mai 2019.

Selon le site internet shortsell.nl, 5,23% du capital de Solutions 30 sont actuellement vendus à découvert et Muddy Waters détient une position courte nette vendeuse représentant 0,21% des actions.

Lundi, Muddy Waters a publié une étude pour réitérer la plupart de ses griefs à l'encontre du groupe Solutions 30, qualifié de "ruches d'irrégularités". Le fonds, qui continue d'accuser Solutions 30 de diverses fraudes dont du blanchiment d'argent, se range du côté d'EY Luxembourg : "Il est évident que ce qui se cache derrière les portes que EY n'a pas pu ouvrir est hautement problématique pour l'entreprise".

Contactée lundi par l'agence Agefi-Dow Jones, une porte-parole de Solutions 30 n'était pas immédiatement en mesure de commenter ces nouvelles déclarations de Muddy Waters.

Procédure de conciliation

Solutions 30 a toutefois reconnu que les discussions avec EY Luxembourg "sur les déclarations écrites rédigées et demandées par EY, se sont traduites par un désaccord".

"Cette position d'EY est inhabituelle", a rappelé le groupe, selon lequel "elle ne constitue ni une certification, ni une certification avec réserve, ni une opinion défavorable". "Si EY avait trouvé des choses, il aurait dû le dire", a indiqué une source proche de Solutions 30 à l'agence Agefi-Dow Jones. Selon cette dernière, "la priorité du groupe est de faire certifier ses comptes". Vu le divorce avec EY Luxembourg, Solutions 30 devra probablement désigner un nouveau commissaire aux comptes. En revanche, compte tenu du délai, il est peu probable que le groupe puisse présenter des comptes audités lors de son assemblée générale, dont la date a été fixé au 30 juin.

Malgré ce contexte inédit, et en l'absence d'opinion de ses commissaires aux comptes, Solutions 30 a réaffirmé dimanche les états financiers 2020 tels qu'approuvés par son conseil de surveillance et publiés fin avril. Le groupe a ajouté que sa "position de trésorerie a été constatée en totalité au crédit des comptes bancaires pour un montant de 159 millions d'euros figurant à l'actif du bilan au 31 décembre 2020".

Compte tenu des conséquences que cette absence d'opinion pourrait avoir sur ses relations avec ses partenaires, clients ou banques, Solutions 30 avait annoncé vendredi avoir demandé au tribunal de commerce de Bobigny d'engager une procédure de conciliation.

"Dans ce contexte exceptionnel", Oddo BHF a décidé de suspendre son objectif de cours "car il nous est difficile de nous appuyer sur un modèle de valorisation", indique le courtier dans une note envoyée lundi à ses clients. L'intermédiaire financier a abaissé sa recommandation de "neutre" à "sous-performance" sur l'action Solutions 30, dont la cotation, suspendue depuis le 10 mai, doit reprendre lundi.

-Olivier Pinaud, L'Agefi, et Dimitri Delmond, Agefi-Dow Jones; +33 (0)1 41 27 47 31; ddelmond@agefi.fr ed: VLV

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May 24, 2021 02:13 ET (06:13 GMT)