Le contexte : les PME et ETI au 1er plan de la relance ?

Les marchés ont corrigé en septembre sur fond de craintes de nouvelles restrictions sanitaires dans les métropoles alors que les annonces relatives aux plans de soutien s’affaiblissent. De plus, les indicateurs économiques esquissent un ralentissement de la reprise à court terme. L’approche des élections américaines accroit la nervosité du marché.

Pendant ce temps, la deuxième vague de publications de résultats semestriels a contribué positivement aux PME et ETI cotées qui ont continué de surperformer sur le mois (CAC Small -1,2% vs -2.9% pour le CAC 40) comme en Europe (MSCI Europe Micro TR +0.2% vs MSCI EMU -2%).

D’un point de vue sectoriel, des signes d’amélioration sont visibles dans la plupart des secteurs, même dans l’automobile, alors que l’aéronautique et l’hôtellerie/restauration/loisirs/évènementiel continuent de souffrir fortement des mesures coercitives et de cette ambiance pesante, dans l’attente d’un vaccin.

En termes de style de gestion, le contexte durable de faible inflation a fait pression sur les taux, favorisant les valeurs de croissance et les secteurs défensifs (services aux collectivités/santé), au détriment des secteurs sensibles à de nouveaux confinements (tourisme/loisirs) et à l’évolution des taux (financières).

Evolution des indices actions français par taille de capitalisation depuis le 1er janvier 2020

Si, jusqu’à l’été, les indices de petites et grandes capitalisations françaises ont évolué à l’unisson, les petites et moyennes capitalisations se détachent depuis quelques semaines. Mais la discrimination se fait surtout secteur par secteur, selon le profil de croissance et la résilience des revenus face à la crise sanitaire. Les PER s’écartent de plus en plus entre les valeurs aimées et malaimées.

Le graphique suivant montre que sur les 5 dernières années, horizon classique pour juger de la performance des entreprises cotées, la performance est légèrement positive toutes capitalisations confondues, avec une sous performance des petites valeurs sur deux ans.

Evolution des indices actions français par taille de capitalisation depuis 5 ans

Concernant l’évolution des encours des fonds liés à la collecte/décollecte, on notera une embellie ces dernières semaines. Mais le phénomène reste à confirmer car il est concentré sur un gros fonds midcaps, Agenor Midcap Europe, fonds de LFDE, qui a collecté plus de 500 M€ depuis le début de l’année.

Quand on regarde sur plus longue durée (5 ans) les flux nets (hors effet de marché) vers les fonds PEA-PME, on retrouve le désintérêt des investisseurs pour les petites capitalisations depuis 2 ans.

Evolution de la collecte nette des fonds PEA-PME français (en M€, hors effet marché - Sources : Oddo BHF Sec.,Morningstar, Financière Arbevel)

Le phénomène qui, conjugué à des prévisions de rebond très (trop ?) fort des bénéfices de ces petites valeurs en 2021, se traduit par des multiples de valorisation exceptionnellement inférieur sur l’indice CAC Mid&Small (PME et ETI) par rapport à l’indice SBF 120 (grandes entreprises). 

Valorisation des valeurs moyennes (en vert) vs grandes valeurs (noir) - Source : Financière Arbevel

"La prime historique de cette classe d’actifs par rapport aux larges caps est effacée et les perspectives de croissance long terme ne sont pas de nature à remettre en cause l’existence de cette prime" note la Financière Arbevel dans une étude parue cette semaine. Une remarque étayée par la constatation d’une décote des valeurs moyennes cotées par rapport aux transactions observées dans le non coté :

Valorisations en multiples valeur d’entreprise vs. Ebitda (source Argos, Arbevel)

 

Revue des meilleurs fonds Small Caps à la fin du mois dernier   

(Source : Quantalys, reporting mensuel des sociétés de gestion)

Le contexte étant dressé, venons-en aux mouvements de nos fonds vedette à travers notre tableau synthétique.

 De façon générale, nous remarquons :

  • Une nette surperformance de la sélection depuis le début de l’année avec une performance moyenne à +3% avec certains fonds au plus haut historique. Les performances vont de -10% à +13% sur 2020 contre un indice des CAC Small 90 à -13%. Le stock-picking, le biais croissance, l’allocation sectorielle et géographique, ainsi que la capacité la gestion du taux d’investissement expliquent la différence. Par ailleurs, nombreux sont les fonds de la sélection qui étaient positionnés sur les valeurs françaises ayant fait l’objet d’OPA ces dernières semaines, à l’instar de Devoteam, Microwave Vision, Amplitude Surgical, Medicrea, Groupe Open, Easyvista ou encore

  • Les tout meilleurs fonds concentrent 60 à 85% de leur portefeuille sur 3 secteurs : IT, Santé et Industries.

  • Peu de mouvements en ce mois de septembre et des taux d’investissement élevés.

De façon plus particulière, nous notons que :

  • Echiquier Entrepreneur, fonds essentiellement constitué de valeurs de croissance, ce qui lui vaut d’être le plus performant de la sélection, nous partage sa conviction sur Boiron, société en retournement. "Dans un contexte  de  valorisations  élevées  sur  les  valeurs  de  croissance,  nous  cherchons  à  identifier  des opportunités  d’investissement  sur  des  valeurs  en  phase  de  retournement  et  dont  la  valorisation nous  semble attractive. Notre investissement récent en Boiron s’inscrit dans cette démarche. Nous pensons que le profil du leader mondial de l’homéopathie devrait  totalement changer  dans  les  années  à venir  :  les  effets  du déremboursement en France sont peu à peu derrière nous (les derniers impacts sont attendus en 2021) tandis que le groupe a mis en place une transformation profonde. L’ambition est de compenser la baisse d’activité par le lancement de nouveaux produits (probiotiques, compléments alimentaires...), la poursuite de la croissance à l’international et un plan de réorganisation. Ces initiatives, qui pourraient être complétées par des acquisitions, devraient permettre, selon nous, à BOIRON de retrouver un résultat opérationnel proche de 100 millions d’euros d’ici quelques  années.  Avec  une  valeur  d’entreprise  inférieure  à  500  millions  d’euros,  le  potentiel  de revalorisation de BOIRON nous parait donc très significatif".

  • Nova Europe ISR a initié une nouvelle position en septembre sur Novacyt, le spécialiste franco-britannique des diagnostics, qui profite de nombreux accords de distribution pour ses tests COVID et dispose désormais d'une forte position de trésorerie.

  • Raymond James Microcaps a augmenté sa position dans "le spécialiste italien des compléments alimentaires Pharmanutra, qui publie une croissance du chiffre d’affaires de +17% sur le premier semestre, principalement dû au développement des ventes à l’international. La direction du groupe est confiante sur ses objectifs de croissance et notamment sur la croissance forte du chiffre d’affaires sur les 3 prochaines années grâce au développement de la force commerciale et à de nouveaux partenariats. Le groupe va lancer 4 nouveaux produits l’an prochain dont un ayant pour but de renforcer les défenses immunitaires ce qui devrait connaitre un franc succès dans le contexte sanitaire actuel". Le dossier pointe désormais en 2e position du fonds avec une pondération à 5.5%.
  • Chez Amplegest PME, on s’enthousiasme des bons débuts d’année de certaines positions du fonds. Le gérant note que Chargeurs qui "est parvenu, grâce à sa nouvelle division Lainière santé, à générer l’équivalent de douze mois de résultats en seulement un semestre. Plus impressionnant encore, il a produit autant de cash-flow ce semestre que sur l’ensemble des six dernières années" et que "si cette performance n’est pas reproductible, l’encaissement du cash a entrainé une baisse de la valeur d’entreprise de 13%" alors que "depuis, le titre a perdu 10% et le titre est en baisse de 3% cette année…".

Le gérant souligne également que Reworld Media, "Dans un contexte médias épouvantable, a réussi à améliorer sa marge pro-forma et à limiter la décroissance organique grâce à la récurrence d’une partie de ses revenus et à la forte hausse de ses audiences digitales". Quant à Virbac, elle "a réalisé en six mois ce que le marché attendait pour l’ensemble de l’année. Le titre a très faiblement réagi à cette publication hors normes notamment parce que les analystes s’inquiètent d’une dynamique qui serait plus difficile au second semestre. Mais rassurons-nous, ils étaient déjà très inquiets avant la publication du premier semestre. En attendant, la société a publié une marge record et le titre est en baisse YTD…"

Le gérant a renforcé Virbac (4.5% du fonds), Chargeurs (3.5% du fonds) et même Voyageurs du Monde, signe d’un certain optimisme.

Pour terminer, voici quelques informations complémentaires sur la dizaine de fonds de petites valeurs sélectionnés.

Retrouver également notre entretien avec le gérant star du mois.

Les fonds ont été sélectionnés selon leur performance sur longue période (nous avons retenu une durée de 5 ans, durée généralement retenue pour l’investissement dans les fonds actions) et leur forte pondération en valeurs françaises capitalisant moins d’un milliard d’euros (minimum 20% du fonds).

On y remarque que le style de gestion "croissance" ou "growth" domine largement la sélection et que le nombre de titres en portefeuille varie facilement du simple (40 valeurs) au double (80 valeurs).

GLOSSAIRE : LES STYLES DE GESTION

Le style de Gestion "Croissance" ou "Growth" privilégie les valeurs de croissance. Ces valeurs sont choisies pour leur fort potentiel de développement, en mettant au second plan leur valorisation boursière au regard du chiffre d’affaires et des résultats actuellement réalisés. Ces sociétés sont en effet souvent populaires et chères car leurs perspectives sont élevées et leur valorisation anticipe une poursuite de la croissance des bénéfices. Les plus belles valeurs de croissance sauront croitre par-delà les cycles et prendre régulièrement des parts de marché par croissance organique ou externe.

Secteurs surreprésentés : la technologie, la santé. Ex. de valeur de croissance : Eurofins, Orpéa, Esker, Solutions 30…Typiquement, leur PER dépasse les 20x.

Le style de Gestion "Valeur" ou "Value" privilégie les valeurs décotées, mal valorisées, et souvent mal-aimées. Les gérants se focalisent alors sur les chiffres publiés, plus rassurants que des prévisionnels incertains par nature. Les valeurs de croissance sauront croitre par-delà les cycles et prendre des parts de marché par croissance organique ou externe.

Secteurs surreprésentés : les valeurs cycliques, l’automobile, les bancaires, la construction. Ex. de valeur : Quadient, Hexaôm, Plastiques du Val-de-Loire, ALD, NRJ Group… Typiquement, leur PER est inférieur à 10x.

Le style de Gestion "GARP" ou Growth At Reasonable Price ou Croissance à prix raisonnable, cherche à trouver un juste milieu entre les deux, à dénicher des valeurs de croissance certes, mais pas à n’importe quel prix.

Ex. de valeur : Alten, Delta Plus, Oeneo, Vétoquinol … Typiquement, leur PER se situe entre 10x et 20x.

Finissons par une citation de Warren Buffet : "Mieux vaut acheter une entreprise extraordinaire à un prix ordinaire qu’une entreprise ordinaire à un prix extraordinaire."