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(Easybourse.com) Quel a été le panorama du marché de l'assurance en 2007 ?
Le chiffre d'affaires des assurances de biens et de responsabilité poursuit son rythme de croissance en 2007 (+ 2 %), présentant une progression légèrement supérieure à celle enregistrée en 2006 (+ 1,9 %). Nous sommes en ligne avec l'évolution générale de la croissance économique, entre 1,5% et 2%

Les assurances de personnes atteignent  151 milliards d'euros de chiffre d'affaires, soit une baisse de 2% essentiellement due au recul de la collecte de l'assurance vie (-3%).  La collecte nette baisse de 18% et s'établit à 53,4 milliards d'euros.

Au total, le chiffre d'affaires en 2007 s'élève à 195 milliards d'euros. Cela représente une légère baisse par rapport à 2006 (-1,2%). Néanmoins, cela reste élevé comparé aux années précédentes, ainsi en 2005, nous étions à 176 milliards d'euros.

Comment expliquez-vous l'évolution de l'assurance vie?
En 2006, l'assurance vie avait particulièrement bénéficié des transferts des PEL des banques à la suite de la modification du régime fiscal. Il y a eu en 2007 un reflux de la  décollecte de ces PEL, et par conséquent une réduction des transferts vers l'assurance vie.

Ensuite, en  période électorale les Français préfèrent attendre de connaître l'orientation de la politique qui sera  menée au plus haut niveau pour prendre des engagements à long terme.

La réforme sur les droits de succession a également prolongé l'attentisme, le temps  de comprendre l'ampleur et les conséquences des changements apportés.

Enfin, du fait de la crise financière, l'augmentation brutale de la rémunération de l'épargne liquide a constitué un élément supplémentaire poussant à l'accentuation de la baisse dans la collecte de l'assurance vie. Le marché de l'assurance vie a baissé de 8% sur le seul mois de janvier, les gens ayant eu tendance à placer leur argent sur le court terme, dans des livrets faiblement taxés et  supportant peu de frais,

Quelles sont les perspectives ? Quel regard portez-vous sur la concurrence de ces produits d'épargne plus liquides ?
Nous ne pouvons pas réellement parler de concurrence car ces produits n'ont pas le même objet. Les gens qui continuent à avoir besoin de se constituer une épargne de long terme pour répondre aux différents objectifs de gestion patrimoniale et familiale ne font pas un arbitrage définitif entre un livret et un produit d'assurance vie.

Il y a  plutôt une position d'attentisme à l'égard d'une épargne plus longue. Les épargnants différent leur décision d'investissement dans un produit de plus long terme, le temps de voir comment les choses évoluent.

Cette tendance n'est donc pas préoccupante ?
L'expérience montre que les situations d'inversion de la courbe des taux dans lesquelles  la rémunération de l'épargne court terme est plus élevée que la rémunération de l'épargne long terme ne durent jamais très longtemps. Les marchés finissent par rétablir une hiérarchie normale du taux de rémunération de l'épargne qui doit augmenter au fur et à mesure que l'horizon de placement s'allonge.

On note dans le marché de l'assurance vie, un  transfert des contrats en unités de compte vers des contrats en euros ?
Nous avons observé en 2007 une certaine résistance des contrats en unités de compte. La collecte a en revanche baissé pour les contrats en euros en raison de la baisse de taux d'intérêt.

Depuis le début de l'année, sous l'effet de la crise financière, nous observons une inversion de la tendance. Sur le mois de janvier, nous avons eu une baisse de 35% de la collecte en unités de compte. Le réflexe sécuritaire par rapport à un environnement financier chahuté a conduit à une augmentation des contrats en euros, produits garantis en taux d'intérêt.

Diriez-vous que l'assurance vie demeure un produit incontournable ?
L'assurance vie reste un très bon produit quelles que soit les circonstances. Il y a lieu de distinguer deux aspects, le premier lié à la conjoncture financière, le second relatif à la modification de l'environnement réglementaire, fiscal…

Au plan conjoncturel, l'assurance vie continue d'être le principal véhicule pour une épargne longue, 8 ans au minimum, 10 à 12 ans dans la pratique.
Le fait qu'à un moment donné les taux d'intérêt ne soient pas très attractifs par rapport aux taux courts et que les valeurs boursières soient chahutées peut momentanément perturber la collecte d'épargne mais ne modifient pas le profil de gestion des portefeuilles d'assurance qui orientent la performance des différents fonds. Ces dernières s'appréciant sur des durées longues permettent d'absorber les cycles baissiers.

Par rapport à un environnement troublé et volatil, l'épargne longue notamment sous forme d'assurance est sans doute le meilleur moyen de protéger son patrimoine financier et de préparer les échéances fortes  comme la retraite ou l'investissement immobilier.

Au plan institutionnel, l'assurance vie est un produit bien inscrit dans le paysage financier français et apparaît comme le produit clé de l'épargne longue.

Quel a été l'impact de la réforme des droits de succession sur le marché de l'assurance vie ?
Nous avons pu nous poser la question du changement de l'environnement juridique et fiscal dans lequel s'inscrit l'assurance vie compte tenu de la réforme sur les droits de succession. Une des caractéristiques de l'assurance vie est de permettre la transmission du patrimoine selon les volontés du souscripteur. 
Après quelques mois de recul, les experts s'accordent à penser que cette réforme ne retire rien à l'intérêt que peut avoir l'utilisation de l'assurance vie en tant que complément d'exonération pour les patrimoines les plus importants, ou en tant que moyen efficace de gestion pour les situations familiales plus compliquées.

En dépit de la réforme des droits de succession,  il est toujours intéressant d'avoir une partie de son patrimoine financier constituée sous forme d'assurance vie.

Qu'en est-il du dispositif qui prévoit le déblocage de l'épargne salariale ?
Nous ne  comprenons pas très bien la logique de cette mesure. L'épargne salariale est un outil permettant de familiariser la population des travailleurs salariés avec l'épargne de long terme. Le déblocage s'inscrit en contre sens de la philosophie de ce dispositif.

Il n'est pas impossible que cette mesure affecte le marché de l'assurance vie. Mais tout dépendra de l'arbitrage qui sera fait par les bénéficiaires : conserver cette épargne et la reporter dans un autre instrument ou la consommer. Dans ce dernier cas, la question se pose de savoir si au final ce déblocage ne conduira pas à creuser le déficit du commerce extérieur de la France.

Quel est votre avis sur l'évolution de l'assurance de personnes ?
L'épargne collective de prévoyance, l'épargne de retraite, l'assurance santé sont le reflet des besoins fondamentaux de la population de plus en plus vieillissante. Nous continuerons à avoir une croissance de ces produits de protection indépendamment de la conjoncture financière.
 
En revanche, l'assurance vie est davantage fonction de l'analyse faite par les épargnants sur l'opportunité de renforcer leur épargne de long terme compte tenu des conditions que présentent les marchés financiers.

Quel regard portez-vous sur l'assurance emprunteur ?
Cette assurance est la clé de l'accès à l'emprunt immobilier ou à l'emprunt de consommation. C'est donc un outil indispensable pour le bon fonctionnement du marché du crédit.

Ce produit est très développé en France notamment grâce aux contrats collectifs qui permettent de fournir des couvertures à moindre frais en raison de l'association à la commercialisation du prêt et de la constitution de larges mutualités  autorisant des tarifications avantageuses.

Pensez-vous que les tensions qui existent sur le marché de l'immobilier sont à même d'atténuer le dynamisme de ce marché?
Il est certain que le produit suit la distribution de crédit. On observe pour le moment que les difficultés des banques rencontrées dans le domaine immobilier n'ont pas conduit à une restriction  significative de la distribution de prêts. L'assurance emprunteur reste ainsi à un niveau relativement élevé.

Quelle est finalement la principale problématique du marché de l'assurance ?
Pour l'avenir, la grande question est celle de la préparation à la retraite. Clairement les systèmes par répartition que nous connaissons ne sont pas suffisants. Ces systèmes ne fourniront pas aux générations futures les revenus nécessaires à leur période d'inactivité. Les familles françaises devront alors progressivement se doter d'un contrat d'épargne retraite leur permettant de compléter leurs revenus.

Différentes études mettent en avant le décalage existant entre d'une part la préoccupation existante chez les français et leur inaction?
Le fait de s'engager dans une démarche d'épargne à long terme lorsqu'on a 25/30 ans est une décision lourde et difficile à prendre. Cela suppose une perception suffisamment fine de ce que seront ses besoins sur le long terme.
Il manquait jusqu'à présent une information essentielle, en particulier pour les travailleurs salariés : la stipulation de ce que seraient leurs revenus retraite.
La loi Fillon a opéré un changement en mettant en place un système d'information sur ce point. Le déploiement de ce système à l'ensemble des salariés concernés demandera du temps. C'est le point de départ de la réflexion.

L'assurance vie constitue-t-elle  le moyen le plus efficace ?
L'assurance vie est l'outil par défaut de préparation de la retraite. Il n'existait pas jusqu'à une période récente de produits dédiés à la retraite. A présent que des dispositifs  spécifiques  ont été mis en place, ont doit s'attendre davantage à ce que l'épargne longue des Français s'oriente vers des produits dédiés à la retraite.

A quels types de produits pensez vous ?
Des produits d'adhésion individuelle comme le PERP, des contrats d'entreprise comme les PERE et des produits de capitalisation générateurs de droits complémentaires de retraite pour les salariés.

Propos recueillis par Imen Hazgui

- 27 Mars 2008 - Copyright © 2006 www.easybourse.com

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